Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Une étude fait un lien entre jeux vidéo et culture du viol

Un lien entre jeux vidéo et culture du viol?
Crystal Dynamics

La menace de viol de Lara Croft était sous-entendue dans Tomb Raider et cela n'a pas choqué tout le monde. L'affaire Joystick a déjà plus d'un an. @Mar_Lard, blogueuse, dénonçait la culture du viol et le machisme inhérents à la communauté des jeux vidéo. Depuis, la polémique a fait couler beaucoup d'encre, et une étude de l'université de Stanford, pourrait bien envenimer un peu plus la situation.

Selon ses résultats, publiés dans la revue Computers and Human Behavior, la conception des personnages de jeux vidéo jouerait un rôle dans l'image que les filles ont de leur corps ainsi que sur l'acceptation de ce qu'on appelle aujourd'hui la culture du viol. C'est-à-dire le fait que tout notre environnement, social, économique, politique, culturel, banalise ce qui est un crime.

Dans les jeux vidéo, les filles, on doit souvent les sauver. Link délivre Zelda des mains de Ganondorf. Mario sauve la princesse Peach des griffes de Bowser. Quand, à l'inverse, on joue un personnage féminin - ce qui n'est pas si fréquent - on a le droit à des shorts très courts et/ou des poitrines qui débordent. L'étude note d'ailleurs qu'il existe dans les mondes virtuels une forte disparité entre les personnages homme et femme, celles-ci étant toujours bien plus sexualisées que leurs homologues masculins.

On peut affirmer que les personnages de jeux vidéo sont conçus pour les hommes. Le hic, c'est que 46% des joueurs seraient en fait des joueuses. Pour une fille, jouer l'un de ces personnages n'est pas sans conséquence.

Le Time, qui diffuse cette étude, rappelle que de précédentes études ont déjà prouvé l'existence d'une corrélation entre la sexualisation des femmes et l'image qu'elles ont d'elles-mêmes. Entre des filles qui portent un bikini et d'autres qui sont vêtues d'un sweat à capuche, l'écart se creuse. Par exemple, les premières se sentent honteuses, réussissent moins bien en mathématiques, que les secondes.

Plus le personnage est sexualisé, plus la culture du viol est intériorisée

Les chercheurs de Stanford ont voulu se pencher sur l'impact que peut avoir cette sexualisation des femmes dans les jeux vidéo sur les joueuses. Pour cela, ils ont fait jouer 86 femmes âgées de 18 à 40 ans. Certaines avec des personnages sexualisés (donc très peu vêtues, type Lara Croft), les autres avec des personnages non-sexualisés. Dans tous les cas, il était conçu de sorte à ce qu'il ressemble plus ou moins physiquement à la joueuse.

Pourquoi? Parce que des études ont montré que plus le personnage joué ressemble au joueur, plus il a une influence sur la vie réelle de la personne. Selon une étude de 1972 détaillée dans celle de Stanford, on infère nos croyances et attitudes des comportements qu'on observe. C'est ce qui s'appelle "l'effet Proteus".

Les joueuses doivent, a posteriori, évaluer une série d'affirmations sur une échelle de 5 (de vraiment pas d'accord, à vraiment d'accord), telles que "Dans la majorité des viols, la victime a des mœurs légères ou une mauvaise réputation" ou encore "Les femmes qui se font violer en faisant du stop n'ont que ce qu'elles méritent". Les résultats sont inquiétants. Les femmes qui ont joué des avatars très sexualisés avaient bien plus tendance à être en accord avec ces affirmations que les autres. C'est d'autant plus problématique lorsqu'on sait qu'en moyenne, 31% des joueuses sont âgées de 8 à 18 ans. Elles grandissent en même temps qu'elles assimilent la culture du viol.

Omniprésence de cette culture

Et la ressemblance entre la joueuse et le personnage n'arrange pas les choses. Elle renforce même cette acceptation de la culture du viol. L'identification est plus forte dans un jeu vidéo que lorsqu'on regarde un film ou une série, car on se met à la place du personnage. Lorsque les femmes ne ressemblent pas à leur avatar, elles sont moins susceptibles d'être en accord avec les affirmations qui leur sont présentées. La question est de savoir dans quelle mesure se fait l'identification au personnage joué. En attendant, cette étude montre que les risques existent.

La culture du viol est omniprésente. C'est, comme on l'a dit, le viol clairement sous-entendu dans Tomb Raider. Ce sont aussi des paroles de chanson qui encouragent le fait de se passer de consentement sexuel. Ce sont les articles qui prônent des "techniques de drague" violentes. Et ce sont, tous les jours, ces femmes qui se font agresser et qui n'osent pas porter plainte parce qu'elles ont intériorisé que c'est de leur faute: il était trop tard pour errer dans la rue, ou elles n'étaient pas assez habillées.

Le blâme ne revient donc pas entièrement aux jeux vidéo mais à l'ensemble de notre environnement. Le problème, perçu dans cette étude, c'est que la culture du viol est rendue possible parce que les femmes l'intériorisent au même titre que les hommes. A quand une Zelda qui sauve un Link ou une Lara Croft moins sexualisée?

Et parce que les jeux vidéo ne nous font pas que du mal...

Ils amélioreraient l'acuité visuelle

Quelques bienfaits des jeux vidéo

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.