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Peine de mort aux États-Unis : face à la pénurie de barbituriques, le pays tente de trouver comment exécuter ses condamnés

Peine de mort : vers un retour de la chaise électrique aux États-Unis ?
AFP

Alors que se tenait jeudi 10 octobre la journée mondiale contre la peine de mort, les États-Unis exécutaient au même moment leur 30e condamné à mort depuis le début de l'année.

Une coïncidence malheureuse qui n'a pas manqué de relancer le débat sur la peine capitale outre-Atlantique, où les méthodes douteuses utilisées pour faire face à une large pénurie de barbituriques nécessaires aux injections létales sont d'ailleurs sous le feu des critiques.

La controverse est telle que le gouverneur du Missouri a été même été contraint d'annoncer vendredi 11 octobre la suspension d'une exécution prévue pour la fin du mois, la toute première qui devait se faire avec du propofol, l'anesthésiant qui a coûté la vie à Michael Jackson.

La situation est compliquée et amène plusieurs des 32 États où la peine de mort est autorisée à penser à de nouvelles méthodes d'exécution, voire à envisager de revenir à des pratiques d'un autre temps comme la chambre à gaz ou la chaise électrique.

Pour comprendre comment le pays s'est retrouvé dans une telle position, Le HuffPost revient sur l'évolution récente de la peine capitale par injection létale à travers cinq dates-clés.

09/2010 : Fini le "cocktail de la mort"

Le laboratoire pharmaceutique Hospira, le seul aux États-Unis qui fabrique le thiopental, le barbiturique utilisé dans les exécutions par injection mortelle, annonce d'abord en septembre 2010 une rupture de stock. Puis en janvier 2011, l'entreprise explique en fait cesser tout bonnement la production.

Ce laboratoire, le seul à avoir reçu l'approbation de l'Agence américaine du médicament pour fabriquer l'anesthésiant en question, insiste alors qu'elle fabrique ce produit "pour les hôpitaux, pas pour les exécutions capitales, et n'encourage pas son usage dans ce type de procédure".

À cette époque, les exécutions se déroulent de manière quasi-identique sur tout le territoire: un cocktail mortel -- composé de trois produits -- est injecté aux prisonniers par intraveineuse. D'abord le thiopental endort, puis le pancuronium paralyse et enfin le chlorure de potassium tue. Impossible donc de se passer de l'anesthésiant, cela rendrait cette pratique incroyablement douloureuse donc inconstitutionnelle.

07/2011 : Impossible de trouver un substitut à l'étranger

Les dernières doses fabriquées par Hospira approchent rapidement de leur date de péremption. Pour faire face et ne pas avoir à reporter les exécutions en attendant de trouver une solution, certains États choisissent de changer de barbiturique et optent pour le pentobarbital. Bien qu'il serve habituellement pour euthanasier les animaux, ce produit est alors administré en surdose qui provoque une mort par l'inconscience, remplaçant ainsi le "cocktail de la mort" composé de trois injections.

Mais le Danois Lundbeck, seul laboratoire pharmaceutique européen qui accepte encore d'exporter son pentobarbital, ne tarde pas à céder sous la pression d'associations et d'investisseurs et annonce en juillet 2011 ne plus vouloir que son produit soit utilisé pour l'exécution de prisonniers outre-Atlantique.

Son exportation se complique fortement: une surveillance étroite est mise en place empêchant ainsi les Américains de s'en servir pour infliger les peines capitales. Une fois encore, les États-Unis se retrouvent coincés.

10/2012 : De nouveaux fournisseurs douteux

La pénurie menace donc à nouveau. Pour contourner le problème, certains États du pays se tournent alors vers les sociétés de préparation en pharmacie dont les produits ne sont pas agréés par l'Agence fédérale de contrôle des médicaments.

Dans les faits, dès le mois d'octobre 2012, ces officines -- qui ne sont pas de vrais laboratoires -- délivrent des anesthésiants qui ne sont pas contrôlés au niveau national. Et cela alors qu'au même moment l'une d'entre elles est pointée du doigt pour ses problèmes d'hygiène à l'origine d'une dramatique épidémie de méningite.

Selon le dernier bilan en date, cette infection a touché 750 personnes et fait plus de 60 morts dans 20 États.

09/2013 : Le Texas tente de s'approvisionner secrètement

In extremis, les autorités réussissent à se procurer le barbiturique utilisé pour les injections létales mais refusent de divulguer leur fournisseur. Inquiets de la provenance du produit, trois condamnés portent plainte et le Texas se voit contraint de faire la lumière sur l'affaire.

Résultat, l'État du Sud s'est fourni auprès d'une des fameuses sociétés de préparation en pharmacie et a de quoi procéder à toutes les exécutions programmées jusqu'à la fin de l'année. Mais l'entreprise -- la Woodlands Compound Pharmacy -- est furieuse car elle voulait rester anonyme et ne semble pas assumer sa décision de vendre du pentobarbital:

"Maintenant que cette information est publique, mon nom se retrouve partout sur internet", explique le responsable de la pharmacie. "Si j'avais su [...], je n'aurais jamais accepté de fournir ces médicaments au département de la justice pénale du Texas (TDCJ)".

"Je dois exiger que le TDCJ renvoie immédiatement les fioles de la préparation de pentobarbital en échange d'un remboursement", conclut-il. Ce que le ministère texan de la Justice refuse de faire, avançant que les produits ont été achetés en toute légalité.

10/2013 : Le retour de la chaise électrique et de la chambre à gaz ?

La plainte déposée par des condamnés au Texas est rejetée par la Cour Suprême et l'un d'entre eux est exécuté le 10 octobre, date de la journée mondiale contre la peine de mort. Il s'agit de la 30e exécution cette année aux États-Unis, la 14e pour le Texas à lui seul.

Pour éviter la pénurie de pentobarbital, l'État du Missouri s'était préparé, de son côté, à avoir recours au propofol, l'anesthésiant qui a entraîné la mort de Michael Jackson. Mais entre une controverse sur le produit et l'attention qu'a attiré la peine capitale, son gouverneur annonce vendredi 11 octobre la suspension de la première exécution avec ce produit programmée le 23 octobre.

Selon la presse locale, des élus du Missouri proposent en guise d'alternative de construire une nouvelle chambre à gaz, cette méthode d'exécution -- utilisée pour la dernière fois en 1965 -- étant toujours possible dans l'État.

Autre hypothèse envisageable, qui semble tout aussi barbare, la chaise électrique. Cette option reste effectivement possible dans une demi-douzaine d'États, si pour une raison ou une autre l'injection létale n'était pas possible. Probablement comme en cas de pénurie de barbituriques.

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