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Zep publie "Une histoire d'hommes". Le père de Titeuf dénonce le rock devenu "une musique de pépés"

Zep, le père de Titeuf : "Le rap a toujours été plus pute que le rock"
AFP

Zep, le père de Titeuf, sort un nouvel album qui tranche avec son univers de prédilection. Fini les gamins qui zozotent, les cartables trop grands, les filles à queue de cheval, place désormais au roman graphique Une histoire d’hommes(lire la critique de l’album).

Zep s’était déjà essayé à la BD "pour les grands", remportant de beaux succès avec Carnets intimes (Gallimard) et sa série d’ouvrages humoristiques Happy Books (Delcourt) dont 700.000 exemplaires d’Happy sex vendus. Pour Une histoire d’hommes, le pari semble déjà gagné, avec un tirage à 115.000 exemplaires et 95.000 albums placés en librairie, une très belle diffusion pour de la BD adulte.

L’auteur met en scène des quadragénaires blessés, trahis et immatures, qui gagnent au fur et à mesure leur place dans l’harmonie de la vie. Tout cela dans une ambiance rock légèrement désenchantée. Plutôt que d’essayer de comprendre pourquoi Zep avait envie de changer de registre (après 13 albums de Titeuf, la réponse nous paraissait évidente), LeHuffPost a essayé de décortiquer cet amour pour le rock’n’roll et la critique qu’il en fait dans son album.

Le HuffPost : Pourquoi le rock en trame de fond de votre album?

Je joue dans des groupes depuis toujours. Depuis mes 12 ans précisément. D’ailleurs, certains d’entre eux figurent dans la dédicace du début de l’album : Cop lib, Titi and the Raw minets, Zep’n’Greg, Bluk bluk, Alice in Kernerland…

Le HuffPost : Vous avez une lecture un peu critique de ce monde. Qu’est-ce que cela signifie, faire du rock de nos jours?

Zep : A mon époque, dans les années 1980, cette musique traduisait une quête identitaire. Un joueur de rock ne pouvait pas adresser la parole à quelqu’un qui n’en écoutait pas. Ou pire, qui écoutait autre chose. Vous ne pouviez même pas sortir avec une fille qui n’était pas biberonnée aux Doors. Mon pseudo, Zep, vient de ma passion pour Led Zeppelin. Mais aujourd’hui, le rock, c’est devenu de la variété.

Regardez les Stones. Je suis tombé il y a peu sur une vieille interview de Mick Jagger. Il disait: "Si je fais du rock après 40 ans, tuez-moi". Bon. Il en a 70. Qu’est-ce qu’on fait? Il continue à chanter Satisfaction, mais depuis le temps, il doit être satisfait, non? Quand je vais le voir sur scène, c’est génial, mais c’est devenu du cirque.

Le HuffPost : Qu’est-ce qui vous fascinait dans la scène rock et qui ne vous émeut plus aujourd’hui?

Zep : Les rockers ne se sont jamais imaginé vieillir. Au-delà de 27 ans, il n’y a pas de mode d’emploi. On reste adolescent. La séduction et le sexe sont racontés abondamment dans les chansons. En revanche, tout ce qui concerne les projets à long terme (prendre un appartement, se marier, faire des gamins) est occulté.

L’idée principale est d’être en rébellion. Point barre. Certains ont tout de même écrit des choses sur l’art d’être parents, voire grand-parents, à l’instar de Bob Dylan, mais le phénomène reste isolé.

Quand j’ai commencé à en faire en 1980, cette musique était encore perçue comme dangereuse et rapide, vouée à disparaître. Or, elle n’a pas du tout disparu ! Et tous les leaders de l’époque, non seulement ils ne sont pas morts, mais ils sont devenus des pépés… Le rock, c’est devenu une musique de pépés!

Le HuffPost : Vous êtes Suisse. Alors on doit savoir: avez-vous déjà joué avec Stéphane Eicher?

Zep :Sourire. Je le connais, on s’est croisés à plusieurs reprises, mais c’est tout. Je n’ai jamais joué avec des gens de ce calibre. Ah si ! Jean-Jacques Goldman m’a fait l’amitié de m’inviter à monter sur scène deux fois avec lui.

Le HuffPost : Nous sommes déçus. Sinon, vous avez déjà fait de grandes scènes?

Zep : Dans les années 1990, je jouais dans un groupe de rythm’n’blues, qui se produisait dans de gros festivals, avec des publics de 3000 personnes. Mais aucun des groupes que je côtoyais n’a fait carrière. C’est difficile de tenir le choc. Soit l’un gobait des trucs avant un concert, ce qui foutait en l’air notre prestation, comme dans l’album d’ailleurs, soit l'autre n’arrivait pas à gérer le stress et faisait tout péter.

Le HuffPost : Le rock’n’roll n’a donc plus de sens pour vous aujourd’hui ?

Zep : Je dirais plutôt qu’il a perdu son sens premier. C’est ridicule de faire du rock de rébellion aujourd’hui. C’est pour les bobos, les riches, étant donné que le matériel est cher. Et les derniers grands groupes comme Radiohead n’ont plus la prétention d’étrangler les parents! Donc, jouer du Rolling Stone dans une cave, c’est super sympa, mais c’est un peu comme faire une partie de foot. Voilà, le rock, c’est comme le foot désormais.

Ou comme la politique! Nos hommes et femmes politiques ont été bercés par les rockeurs. Une fois au pouvoir, ils leur ont remis des médailles et de récompenses. Le rock a vieilli et il doit l’assumer.

Le HuffPost : Vers quelle musique se tourner alors? Vers le rap?

Zep : Je n’ai pas de conseils à donner. Mais je tiens à préciser que le rap a toujours été plus "pute" que le rock. Il affiche qu’il aime l’argent et le succès. Le rock, lui, refusait l’ordre établi et véhiculait des valeurs comme le partage, la sincérité et la volonté de tendre vers un monde plus juste. Même si au fond, j’imagine bien que les rockeurs ne sont pas moins égoïstes que les rappeurs. Seul leur discours le prétend.

Pour découvrir les premières pages de "Une histoire d'hommes", cliquez ici :

Une histoire d'hommes, scénarisé et illustré par Zep, aux éditions Rue de Sèvres, groupe L'Ecole des loisirs.

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