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Manifestations en Turquie: 79 blessés et plus de 900 interpellations (PHOTOS)

Manifestations en Turquie: 79 blessés et plus de 900 interpellations (PHOTOS)
AFP

ISTANBUL - Les violents affrontements entre manifestants et policiers survenus à Istanbul et dans d'autres villes ont fait en deux jours 79 blessés, dont 53 civils et 26 policiers, et 939 manifestants ont été interpellés, a annoncé samedi le ministre turc de l'Intérieur, Muammer Guler.

Le ministre a précisé que ces 939 interpellations avaient été effectuées par la police au cours de plus de 90 manifestations survenues dans 48 villes de Turquie.

Le centre d'Istanbul en Turquie est le théâtre d'affrontements depuis le vendredi 21 mai entre les forces de l'ordre et des manifestants de l'un des plus importants mouvements de protestation dirigé contre le gouvernement islamo-conservateur turc depuis son arrivée au pouvoir en 2002.

De nouveaux affrontements ont éclaté samedi 1er juin. Après une trêve de quelques heures, les forces de l'ordre ont une nouvelle fois fait usage de gaz lacrymogènes samedi matin pour disperser un groupe de plusieurs centaines de personnes qui leur faisait face dans l'une des principales artères menant à la place Taksim, au coeur de la mégapole turque.

D'autres incidents ont éclaté autour de la place, moins violents que ceux qui l'ont embrasée la veille. Des petits groupes de manifestants ont riposté aux grenades lacrymogènes et aux canons à eau de la police par des jets de pierres, a constaté un journaliste de l'AFP.

Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a sommé les manifestants, samedi midi lors d'un discours, de cesser "immédiatement" leur mouvement et assuré que la police resterait sur place pour y maintenir l'ordre. "Je demande aux protestataires d'arrêter immédiatement leurs manifestations (...) pour éviter plus de dommages aux visiteurs, aux piétons et aux commerçants", a-t-il déclaré, ajoutant que "la police y était hier, elle y est de service aujourd'hui et le sera encore demain parce que la place Taksim ne peut pas être un endroit où les extrémistes font ce qu'ils veulent."

Recep Tayyip Erdogan a également affirmé qu'il ne retirerait pas le projet d'aménagement urbain à l'origine des manifestations d'Istanbul. "Nous allons reconstruire la caserne militaire" prévue dans le projet et qui cristallise la colère des opposants de ce projet, a-t-il lancé.

Calme précaire

Un calme précaire était revenu à la mi-journée, troublé par quelques tirs épisodiques de grenades lacrymogènes. D'autres échauffourées ont été signalées un peu plus tôt dans un autre quartier de la ville, Besiktas, lorsqu'un groupe de plusieurs centaines de personnes qui s'étaient rassemblées sur le versant anatolien de la ville pour rejoindre la place Taksim a traversé l'un des ponts qui enjambe le Bosphore et s'est retrouvé nez à nez avec la police. Là aussi, la police a dispersé à grand renfort de gaz lacrymogènes la foule, qui a répliqué par des jets de pierre.

En fin de matinée, les grands axes menant à la place Taksim étaient barrés par d'importantes forces de police, a constaté un journaliste de l'AFP. Au terme d'une journée et d'une nuit d'émeutes, cette place, célèbre pour être un des rendez-vous traditionnels de la contestation à Istanbul, et les rues environnantes étaient jonchées samedi matin de débris et leurs commerces n'ont rouvert leurs portes que très prudemment aux riverains et aux touristes.

Des dizaines de manifestants ont été blessés au cours des affrontements de vendredi, Amnesty International évoquant pour sa part "plus d'une centaine" de blessés.

Protestation politique

Les autorités n'ont donné aucun décompte précis. Vendredi en fin de journée, le gouverneur de la ville Huseyin Avni Mutlu s'est contenté d'indiquer que 12 personnes étaient toujours hospitalisées en fin de journée, dont une femme victime d'une fracture du crâne, et qu'au moins 63 personnes avaient été interpellées.

Le mouvement est parti vendredi à l'aube avec l'intervention musclée de la police pour déloger quelques centaines de militants qui occupaient depuis trois jours le parc Gezi, sur la place Taksim, pour y empêcher le déracinement de 600 arbres dans le cadre d'un projet d'aménagement urbain très contesté.

Ameutés par les réseaux sociaux, les militants associatifs ont afflué pour prêter main forte aux manifestants et dénoncer la politique du gouvernement islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002. Les affrontements se sont poursuivis jusqu'au petit matin. "Les arbres, c'est juste la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Les gens en ont ras-le-bol de tout ce que ce gouvernement leur fait", a déclaré dans la nuit un jeune manifestant à l'AFP.

Dès vendredi soir, la contestation partie d'Istanbul s'est propagée à d'autres villes du pays, comme à Izmir (ouest), Antalya (sud) ou la capitale Ankara, où des incident ont opposé la police à des manifestants qui voulaient marcher sur le parlement. Partout, les manifestants ont dénoncé la répression à Istanbul et accusé le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan d'atteintes aux libertés.

L'opposition politique a pris le relais de ces critiques en s'affichant avec les protestataires. Le président du Parti républicain du peuple (CHP), le principal rival du gouvernement, Kemal Kiliçdaroglu, a appelé Recep Tayyip Erdogan à retirer la police des rues d'Istanbul. A l'appel des réseaux sociaux et du CHP, une manifestation de protestation est prévue samedi après-midi sur la rive asiatique d'Istanbul.

Si le revenu par habitant a triplé en Turquie depuis l'arrivée au pouvoir de son Parti de la justice et du développement (AKP) en 2002, Recep Tayyip Erdogan est accusé de dérives autoritaires et de vouloir "islamiser" la société turque. La semaine dernière, le vote d'une loi restreignant la consommation et la vente d'alcool a ainsi suscité l'ire des milieux libéraux.

Muet sur ces événements depuis vendredi, le chef du gouvernement avait fait savoir mercredi qu'il ne reculerait pas. "Faites ce que vous voulez, nous avons décidé", avait-il lancé à ses détracteurs.

Revivez en images ces deux jours de manifestations:

Deux jours de manifestations à Istanbul

Deux jours de manifestations à Istanbul

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