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DJ Champion ou Maxime Morin : la part de l'autre avec son nouvel album, «°1» (ENTREVUE/VIDÉO)

DJ Champion : la part de l'autre avec «°1»

MONTRÉAL - Maxime Morin, alias DJ Champion, a cet élan particulier, cette affirmation convaincue que l’on retrouve rarement chez les artistes québécois. Il fait de la musique qui lui ressemble. Et il crée à sa façon. Son tout récent album °1 (Degré un ou Degree One), témoigne de cette démonstration artistique sans compromis. À la fois poétique, douce, moderne, orchestrale et fougueuse (mais loin des sonorités électro dont il nous avait habitués), cette œuvre exprime la transformation, ou du moins une autre sensibilité. Plus de Morin et moins de Champion.

Dès la première pièce du disque intitulée 40#@%&!, le Montréalais donne le ton. Tout flotte dans cette fresque de musique classique qui inspire «le drame à l’italienne». Une véritable musique de film (tout comme Ursula, Je t’aime et autres Half a Mile qui émergent des 17 chansons de l’opus): magnifique mélodie au piano, enveloppantes ambiances de cuivres (tous issus de banques de sons numériques ultras sophistiquées) et tristes lignes de violons. Une entrée en la matière gracieuse qui confirme un état d’esprit qui diffère des territoires électro-rock pop explorés précédemment par Champion sur les albums Chill’em All et Resistance, outre ses récentes collaborations avec les Orchestres symphoniques de Québec ou encore de Montréal.

«Cette toune a été écrite au passage de la quarantaine, il y plus de deux ans», explique Maxime Morin, dans un état de sérénité complète. «Au départ, elle s’appelait I’m 40, Fuck!, mais ce titre faisait moins de sens aujourd’hui. Je l’ai donc changé un peu. Cela dit, c’est la chanson qui a pratiquement initié le projet. Elle m’habitait depuis un bon moment, bien avant ma collaboration aux deux orchestres. C’est juste que, pour ce disque, j’ai pris mon temps. Et l’avantage de prendre son temps, c’est qu’on peut aller plus loin. En classique, on est concept d’abord, alors qu’en rock c’est souvent le contraire. Avec °1, je pense me situer entre les deux.»

«Quand j’ai composé Chill’em All, j’avais besoin de délivrance [il est en rémission d’un cancer qui, de toute évidence, a changé sa vision de la vie], de cracher le méchant en sortant de ma maladie», poursuit le multi-instrumentiste. «J’assumais pleinement ma souveraineté. Je voulais dire au monde comment je me sentais. Je continue de croire aujourd’hui qu’il faut d’abord que la musique parte de soi. Qu’elle exprime une part de soi. C’est ce que j’ai voulu transmettre avec °1. C’est comme ça que je me sentais durant la composition. Je suis tout à fait conscient que l’album risque de connaître un succès commercial moindre, mais j’avais envie de cette musique, qui me ressemble aussi. J’adore faire bouger les gens et j’assume à cent pour cent mes deux premiers disques […] Mais bon, cette mosaïque de genres (classique, électro, rock, indie pop) représente aussi le gars.»

Mise à nu

Il est bon de rappeler que la musique de Champion a longtemps été guidée par des beats accrocheurs, des guitares électroniques énergiques et des voix (mélange d’échantillonnages et de chants livrés à l’occasion par les membres de son groupe de musiciens les G-Strings) qui livrent souvent des refrains d’une efficacité désarmante.

D'où ce léger étonnement à la première écoute de °1. Bien que la formation des Strings soit toujours impliquée dans son travail, Champion délaisse la pop (des touches sont néanmoins notables ici et là sur l’encodé comme sur No Love Enough) pour un monde musical plus métissé (pensons aux paroles de la rappeuse Fab de Random Recipe, envoyées sur des violons dramatiques) symphonique, introspectif, basilique.

La seule présence des Mommies on the Run et de leurs cordes majestueuses apporte un indéniable contraste avec la traditionnelle électro de DJ Champion. Un approche distinctive aussi pour le talentueux touche-à-tout Pierre-Philippe Côté (dit Pilou), qui chante plus et encore mieux (que sur Chill’em All). Notons son interprétation torturée et à fleur de peau sur Requiem Dem. Plus posée, plus soignée, plus en contrôle.

Et que dire de cette «mise à nue», de cette trace d’éclectisme (que l’on ressent passablement sur tout l’album) bien grasse, placée volontairement à la fin du disque. On parle ici des quatre morceaux – 356, 357, 358, 359 – ou degrés folk-blues-garage (tous chantés par Morin) qui détonnent complètement du raffinement des autres pièces, mais qui complètent le tout circulaire d’un artiste qui refuse de tourner en rond.

«Ramassées à la fin, ces chansons sentent l’organisation. C’est un clin d’œil. L’idée était de démontrer que je peux faire du raw, et que je peux me mettre en danger. J’aime ce moment qui prouve l’imperfection… C’est comme si je refusais le poli, le tout léché, le trop ordonné, le parfait. L’art ce n’est pas ça. La vie ce n’est pas ça. Et la mienne non plus […] Je suis un green dans la musique classique. Je voulais le souligner en finale. Ces chansons ont été d’ailleurs faites d’un souffle. C’était peut-être aussi une manière de dédramatiser cette œuvre qui fait d’abord passer une émotion de douceur, de liberté, de fragilité.»

Un lancement formule 5 à 7 aura lieu au Club Soda ce lundi.

L’album sortira quant à lui le lendemain.

Des concerts (dont au Festival international de jazz de Montréal) sont à prévoir dans les prochains mois.

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