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Test du Chromebook: Peut-on se passer de Windows ou Mac OS avec un ordinateur 100% web?

L'ordinateur 100% web de Google peut-il remplacer Windows ou Mac OS?
Montage HuffPost

CHROMEBOOK - Dans le royaume des ordinateurs personnels, il n'y a pas beaucoup de choix. Pour simplifier, soit vous avez un PC, soit vous avez un Mac (il y a aussi Linux, mais il est peu utilisé par le grand public). Mais depuis deux ans, un autre acteur veut faire concurrence aux deux géants: Google.

Plutôt méconnu du grand public, le système d'exploitation proposé par ce dernier s'appelle Chrome OS, et équipe une série d'ordinateurs portables nommés "Chromebook". Leur particularité? Ils fonctionnent à 100% sur le web, ce qui veut dire qu'il n'est pas possible d'installer des logiciels comme sur un PC ou un Mac.

Un ordinateur 100% web est-il viable? En 2013, peut-on se passer de Windows ou de Mac OS? Le Huffington Post France a testé la vie avec un Chromebook pendant un mois.

Les conditions du test

chromebook

Essayer quelques heures un appareil ne permet pas de se rendre compte de son potentiel et de ses limites. Google nous a donc proposé de tester deux Chromebook pendant deux semaines.

D'abord, un ordinateur made in Samsung, sorti fin mars en France. Il n'est pas très différent des autres modèles (en France comme au Canada, il n'y a que Samsung et Acer pour l'instant): peu cher, peu puissant, et adapté aux usages web. On est, au niveau technique, proche d'ordinateurs de type "ultraportable", mais à des prix compétitifs.Entre 230$ et 275$.

Google nous a ensuite prêté deux semaines son fleuron: le Pixel, un Chromebook haut de gamme, comparé par beaucoup de spécialistes à un Macbook Pro pour ses finitions et pour sa qualité technique. Cliquez ici pour lire le test du Pixel.

L'objectif de ce test était d'utiliser ces ordinateurs en situation réelle, à la fois personnelle et professionnelle.

Rapide, très rapide

J'étais sceptique. Autant l'avouer. Après plus de 15 années passées sur des PC Windows, j'ai mes habitudes. Je n'étais pas sceptique sur ma capacité à m'adapter à un nouveau système de navigation. J'ai eu l'occasion de travailler à la fois sur Mac et sur Linux, un nouvel "OS" (système d'exploitation) ne me faisait pas peur. J'étais surtout sceptique sur les possibilités offertes par le Chromebook.

Mais, dès l'allumage, je n'ai pu m'empêcher d'être bluffé. En moins de dix secondes, mon ordinateur est lancé, prêt à être utilisé. La sortie du mode veille est, elle, quasi instantanée. C'est un avantage indéniable qui se verra tout le long de l'utilisation: le Chromebook est rapide, vraiment rapide. Ce qui est assez impressionnant, car techniquement, les deux portables disponibles en France, l'Acer et le Samsung, ne sont pas spécialement puissants.

La prise en main est aussi très agréable. Utilisant régulièrement le navigateur de Google, Chrome, je n'ai pas été dépaysé. Si le Chromebook est plus qu'un simple navigateur (voir plus bas, notamment la gestion des applications), je suis arrivé en terre inconnue, mais avec une idée bien précise de la topographie des lieux.

Bienvenue dans le Cloud

Ce côté familier s'explique aussi par l'environnement Google. Pour lancer une session, il suffit de se connecter avec un compte Google (qui regroupe Gmail, YouTube, Google+, etc). Et là, surprise: mes options, mes extensions, mes favoris, bref, "mon" Chrome est là. Pas besoin de configurer quoi que ce soit. Et si c'est votre première utilisation, les personnalisations que vous apporterez à Chrome seront présentes si vous utilisez le navigateur sur un autre support. Bienvenue dans le Cloud ("nuage").

C'est LE pari de Google: bientôt, le stockage personnel, sur CD ou disque dur, sera, selon le géant du web, révolu. Toutes nos informations seront stockées en ligne. D'ailleurs, les Chromebook, y compris le très onéreux Pixel, ne disposent que de quelques dizaines de gigaoctets de disque dur.

Mais en achetant un Chromebook, on obtient un quota gratuit pendant deux ans sur Drive, le service de Cloud de Google, de 100Go de stockage. Petite précision: si au bout de deux ans vous ne souhaitez pas payer l'abonnement, vous ne perdez pas vos données, mais vous ne pouvez pas rajouter de nouveaux fichiers.

J'utilise déjà plusieurs fonctionnalités en Cloud, chez Google ou ailleurs, alors ça ne m'a pas spécialement dérangé. Le stockage de mes fichiers sur Google Drive et de ma musique sur Play permet d'y accéder tout le temps. Ma compagne, par contre, est encore bien habituée à enregistrer ses documents Word sur son PC. Cela ne l'a pas empêché d'utiliser le Chromebook autant, si ce n'est plus que moi. L'adaptation est rapide et relativement intuitive.

Au revoir les virus?

La sécurité, c'est aussi un des arguments de vente de Google. Les Chromebook ne fonctionnant ni sous Windows, ni sous Mac OS (qui est de plus en plus concerné par les virus), pas besoin d'anti-virus. De plus, les mises à jour de sécurité sont automatiques et il n'est pas possible d'installer de logiciel sur un Chromebook.

Enfin, si, mais seulement des "applications web", soit des petits programmes basés sur le navigateur Chrome. Sauf qu'il est impossible d'en installer sans que celles-ci ne soit validées par Google. Une fois cette vérification effectuée, l'application est disponible sur le Chrome web store, un magasin d'applications similaires à ceux disponibles sur Android et iOS (iPhone, etc).

Fier de cette sécurité, Google communique abondamment à ce sujet:

L'un des avantages que j'ai trouvé au Cloud, c'est que mes données sont elles aussi sécurisées (enfin, en partant du postulat que Google va respecter ses conditions d'utilisation). Fini la peur de la défaillance technique du disque dur, fini les multiples copies sur CD.

Seul risque pour mes données: que quelqu'un ne pirate mon compte Google. C'est là que l'application "Google authenticator" entre en jeu. Comme de nombreuses sociétés, le moteur de recherche propose un deuxième niveau de vérification pour se connecter à son compte. Après avoir rentré son mot de passe, le site vous demande un numéro à 6 chiffres de confirmation, reçu sur son téléphone.

LE REVERS DE LA MÉDAILLE

En un mois, le Chromebook s'est intégré dans ma vie numérique. Portable, rapide, assez complet et clairement orienté "web", il possède des atouts indéniables. Mais les choix tranchés de Google n'ont clairement pas que des avantages, loin de là. Et certaines fonctionnalités manquante pourraient en rebuter plus d'un.

100% web

C'est surement le principal frein à l'utilisation du Chromebook. Une connexion internet est nécessaire pour bien utiliser l'ordinateur. A priori, le handicap me semblait énorme. Dans les faits, c'est un peu plus contrasté.

Sans connexion internet, pas de Cloud. On se retrouve ainsi limité avec un disque dur de 16 à 32 Go (équivalent au stockage d'un smartphone haut de gamme). C'est peu, et sur le long terme, mieux vaut prévoir un disque dur externe à côté.

Google a tout de même fait évoluer son offre depuis le lancement en 2011 et propose maintenant d'accéder hors ligne à quelques fonctionnalités basiques. J'ai pu ainsi consulter ma boite mail et mes documents hors ligne. Mais l'option reste limitée: impossible par exemple de travailler sur le document qu'un collègue m'a partagé.

Les abonnés absents

Qui dit environnement 100% web dit limitations. Et l'impossibilité complète d'installer des programmes comme sur n'importe quel autre ordinateur m'a posé quelques problèmes. Impossible pour moi de faire du montage photo ou vidéo avec Photoshop, Premiere ou Final Cut, les logiciels de ce type n'étant pas disponible sur le Chromebook. Fans de montage, passez donc votre chemin. A noter qu'il existe une application web sur le Chrome store pour faire du montage photo: Pixlr. On est loin de Photoshop, mais c'est suffisant pour mon activité.

Aussi, iTunes n'est pas disponible sur le Chromebook. Si des solutions de rechange, tel Google Play, existent pour écouter sa musique ou ses films, impossible donc de synchroniser un produit Apple. Si je ne suis pas concerné, la chose a posé problème pour ma compagne, qui possède un iPhone.

Encore plus problématique, surtout pour un ordinateur portable: utilisateur de Skype, je me suis vu dans l'impossibilité de contacter mes amis par ce biais. Certes, Google propose Hangout, qui permet de chatter en vidéo à l'instar de Skype. Mais mes amis ne l'utilisent pas. A moins de les convaincre de faire le saut, échec et mat.

Enfin, pas vraiment. Au moment où je me démenais pour trouver un moyen de contacter un de mes proches, Microsoft annonçait qu'il sera bientôt possible (d'ici l'été en France) d'utiliser Skype avec un simple navigateur internet, en se connectant à Outlook (anciennement Hotmail).

C'est de toutes façons le pari de Google: à terme, tous les logiciels installables seront disponibles via un simple navigateur web. Enfin, presque tous.

Angry Birds sinon rien

Qui dit pas de programmes dit pas de jeux. Même si je ne m'attendais pas à pouvoir lancer Call of Duty sur un ordinateur peu puissant, j'aurais apprécié pouvoir jouer à d'autres jeux évolués, mais un peu moins gourmands. Impossible, tout simplement.

Si vous souhaitez un divertissement ludique et actif sur votre Chromebook, il faudra se retrancher sur les jeux par navigateurs, comme le très célèbre Angry Birds. Sympa, mais pas suffisant pour un joueur, loin de là, même s'il est vrai que de plus en plus de jeux sur navigateur sont assez bluffants.

A noter tout de même, pour les plus bidouilleurs: il est possible de jouer à quelques jeux sur un Chromebook via une petite astuce. Il "suffit" d'installer le système d'exploitation Linux sur le Chromebook pour profiter de quelques jeux et notamment de Steam, la plus célèbre des plate-formes de distribution de jeux en ligne. Mais d'une, l'opération n'est pas simple (je n'ai pas tenté ma chance, le Chromebook étant seulement prêté) et de deux, peu de jeux sont disponibles sous Linux.

Enfermé sur le web de Google

Le dernier point est moins pratique qu'idéologique. Avec un Chromebook, je me suis retrouvé complètement bloqué dans un univers Google. Impossible d'installer des programmes qui n'ont pas été validés par Google. Création obligatoire d'un compte Google pour utiliser l'ordinateur.

Alors qu'Android permettait une plus grande souplesse qu'Apple, le Chromebook est lui aussi rigide que la pomme. Je comprends la logique: plus de sécurité, plus de facilité, plus de complémentarité via le Cloud. Et c'est le sens de l'histoire: tous les géants de l'informatique se dirigent, doucement mais sûrement, vers un troc idéologique: plus de sécurité contre moins de liberté. Mais il n'empêche.

CONCLUSION

Parti sceptique, je reviens tiraillé. Dans un sens, il me serait impossible, demain, de justifier l'achat d'un Chromebook. L'absence de la liberté d'installer des programmes disponibles sur d'autres systèmes est clairement mon principal frein. Ce n'est pas l'encapsulage dans l'univers Google qui me pose problème -j'y suis déjà plus ou moins- mais l'interdiction de s'en éloigner.

D'un autre côté, le Chromebook est peut-être un aperçu du futur. De plus en plus de services sont accessibles en ligne, via un simple navigateur. Et l'accès à Internet en Wifi est maintenant disponible dans de plus en plus de lieux. Maître incontesté du web via son moteur de recherche, innovateur reconnu sur ce terrain (Gmail, Google Docs, etc); Google veut pousser son avantage et cherche à montrer avec le Chromebook ce que sera peut-être l'ordinateur de demain.

En l'utilisant pendant un mois, cela m'a sauté aux yeux: il y a peu, vraiment peu de choses que je ne peux plus faire sans un simple navigateur. Et elles caractérisent toutes un usage relativement intensif de l'informatique, qui ne devraient pas manquer à une majorité d'utilisateurs.

Accessible, rapide, simple et sécurisé

Les Chromebook ne poseraient pas de problème à la majorité des utilisateurs d'ordinateurs en France. Cela leur simplifierait même la vie. Si mes parents devaient racheter un PC, je leur conseillerais peut-être un Chromebook, cela m'évitera de devoir faire le soutien technique chaque fois que Windows a un petit problème. Si j'étais encore étudiant sans le sous, un tel outil pourrait être parfait comme support de travail bon marché.

Accessible, rapide, simple et sécurisé, le Chromebook est en fait destiné non pas aux gros utilisateurs, mais à l'immense majorité des internautes. Son prix est d'ailleurs pensé en conséquence (entre 230 et 275$ pour les modèles disponibles actuellement au Canada). C'est peut-être pour cela qu'il a été si mal perçu dans les tests des sites spécialisés: il ne leur était tout simplement pas destiné.

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