HALIFAX - Le rétablissement des populations de poissons surexploitées, comme la morue, est plus lent que prévu et plusieurs stocks pourraient bien ne jamais s'en remettre, conclut une nouvelle étude.
L'étude, qui doit paraître ce vendredi dans le journal Science, a été réalisée par des chercheurs qui ont étudié les stocks de 153 espèces de poissons et d'invertébrés de partout sur la planète.
La plupart des espèces de poissons sont assez résistantes pour reprendre des forces d'ici une décennie si des gestes rapides sont posés pour réduire la pression sur les stocks épuisés, soutiennent les scientifiques.
Mais selon Jeff Hutchings, professeur de biologie à l'Université Dalhousie, et l'un des auteurs de l'étude, si ces gestes ne sont pas posés assez rapidement, la période de récupération devient alors plus longue, et l'incertitude quant à la capacité de ces espèces à s'en remettre augmente de façon exponentielle.
Au dire du professeur Hutchings, cela peut expliquer pourquoi la morue n'a toujours pas repris du poil de la bête plus de 20 ans après qu'Ottawa eut déclaré un moratoire sur la pêche commerciale de l'espèce, qui était autrefois une industrie florissante dans les provinces atlantiques.
Selon le chercheur, l'étude porte à croire que le retour à la croissance des stocks de morue est improbable puisqu'aucun geste n'a été posé lorsque cela était possible.
M. Hutchings ajoute que le gouvernement fédéral doit établir un niveau minimal pour les populations de poissons, niveau qui pourrait déterminer le moment où des décisions doivent être prises afin de réduire la pression exercée sur une espèce. Une loi est nécessaire pour permettre aux stocks épuisés de se reconstituer, comme cela existe aux États-Unis, affirme-t-il.
En territoire américain, lorsqu'une espèce commerciale est victime de surpêche, son exploitation cesse immédiatement et un plan doit être mis en place en moins de deux ans pour que la population retrouve son niveau normal en moins d'une décennie, poursuit le chercheur.
«Le Canada ne possède actuellement pas ce type d'obligations pour des plans de reconstitution ou de reconstruction, et nous n'avons pas non plus d'automatisme législatif pour de telles actions», mentionne-t-il.
«J'aimerais croire que ce genre de travail offrirait encore davantage d'incitatifs scientifiques pour développer des cibles et des objectifs de reconstruction pour l'ensemble de nos stocks de poissons épuisés.»
Selon M. Hutchings, cela serait non seulement bénéfique d'un point de vue biologique, mais permettrait également d'assurer une sécurité alimentaire et la pérennité des emplois dans l'industrie de la pêche.»
Depuis le début des années 1960, les populations de morue au large de la côte nord-est de Terre-Neuve-et-Labrador ont décliné de plus de 97 pour cent, et sont désormais à des niveaux historiquement bas, selon Pêches et Océans Canada.
L'étude s'est penchée sur des espèces de poissons telles que le hareng et la limande à queue jaune, dont les populations ont chuté sous leur seuil minimal de rendement durable, qui est établi par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.