Un ancien maire de la région de Montréal soutient avoir reçu une offre de pot-de-vin de Bernard Trépanier pour que l'entreprise Astral puisse décrocher un contrat d'affichage publicitaire dans sa municipalité.

Joint par La Presse, cet homme affirme avoir refusé l'argent comptant que lui proposait M. Trépanier, qui agissait alors comme consultant pour Astral, au tournant des années 2000. De plus, M. Trépanier lui aurait précisé que cette façon de faire avait cours dans les villes voisines sans encombre. «Trépanier m'a expliqué comment ça fonctionnait, comment on choisissait un site pour l'affichage et qu'il y avait une cote qui allait au maire. Le montant était négociable», a affirmé l'ancien maire, qui a demandé à ne pas être identifié pour ne pas nuire à ses activités commerciales. «J'étais estomaqué. Ça s'est terminé là parce que je n'ai pas montré d'intérêt», a-t-il ajouté, en précisant que l'offre était d'environ 5000$.

Trépanier nie tout

Témoignant hier devant la commission Charbonneau, Bernard Trépanier a affirmé sous serment ne jamais avoir versé une partie de l'argent obtenu d'Astral à des élus en échange de l'autorisation d'utiliser les terrains municipaux pour y ériger des panneaux publicitaires de grande dimension. «Je n'ai jamais donné de ristourne à personne», a-t-il soutenu.

Joints hier par La Presse, deux ex-maires et un maire toujours en poste ont soutenu ne pas avoir reçu d'offre de pot-de-vin de la part de M. Trépanier relativement à des panneaux d'affichage d'Astral.

Bernard Trépanier a empoché 570 000$ d'Astral entre 2002 et 2011. Astral lui a versé personnellement 208 700$ (incluant une somme forfaitaire de 500$ par mois) et une somme de 361 300$ à son entreprise Bermax.

À cette époque, M. Trépanier travaillait «bénévolement» dans les différentes organisations électorales des municipalités du Grand Montréal; c'était un «hobby», selon lui.

Entre 2004 et 2009, il a été collecteur de fonds pour le parti Union Montréal. Devant la commission Charbonneau, il a reconnu avoir été impliqué dans le partage des contrats d'ingénierie attribués par la Ville de Montréal. Selon des témoins, il aurait aussi coordonné un système de ristournes équivalant à 3% de la valeur des contrats - d'où son surnom de Monsieur 3%.

Hier, la commission Charbonneau a interrogé M. Trépanier sur ses liens contractuels avec Astral, qui lui versait en échange de ses relations une commission sur les revenus générés par les panneaux implantés. «J'ouvrais la porte. Quand Astral avait identifié un site, ils voulaient aller le présenter à la municipalité. Connaissant le maire, je les introduisais», a-t-il expliqué.

Contrats lucratifs

Les enquêteurs de la Commission ont passé au peigne fin les états financiers de Bermax et ceux de Bernard Trépanier. Entre 2002 et 2011, M. Trépanier a obtenu 109 850$ pour des contrats de panneaux à Longueuil, 68 000$ à Laval, 52 000$ à Saint-Léonard, 50 000$ à Sherbrooke, 36 700$ pour l'échangeur Turcot et 31 000$ pour le Port de Montréal.

Joints hier par La Presse, deux ex-maires (Claude Gladu à Longueuil et Jean Perrault à Sherbrooke) et un maire toujours en poste (Hubert Meilleur à Mirabel) ont soutenu ne pas avoir reçu d'offre de pot-de-vin de la part de M. Trépanier en échange d'autorisation pour des panneaux d'affichage. La Ville de Mirabel procède par appel d'offres public, a précisé M. Meilleur. En 2010, les paiements d'Astral à Bernard Trépanier ont cessé.

Loin d'y voir un lien avec la mise sur pied de l'escouade Marteau, M. Trépanier affirme que le développement des panneaux-réclames avait atteint ses limites. «Le mot chez Astral, c'était qu'on a assez tapissé, on va attendre. On peut pas seulement faire une ville avec des panneaux.»

Joint hier en après-midi, Astral n'a formulé aucun commentaire.