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Élection présidentielle au Vénézuela après la mort de Chavez : Maduro largement favori devant Capriles

Élection au Vénézuela: Maduro largement favori devant Capriles
AFP

Un remake du film Un jour sans fin semble se jouer à Caracas. Ni marmotte ni chapeaux haut-de-forme dans ce cas, mais des survêtements aux couleurs du Vénézuela et le souvenir d'un président charismatique.

Appelés aux urnes dimanche 14 avril, les électeurs de la République bolivarienne doivent désigner le successeur d'Hugo Chavez, réélu en octobre 2012 mais décédé le 5 mars dernier après 14 années de règne sans partage. "Désigner le successeur d'Hugo Chavez", ou plutôt confirmer le choix fait par l'ancien leader avant sa mort.

Avec une confortable avance atteignant jusqu'à vingt points dans les sondages, Nicolas Maduro, ancien bras-droit d'Hugo Chavez, président par intérim adoubé par l'ancien chef de l'Etat, devrait transformer l'essai sans trop de difficultés. Une élection à l'issue inéluctable, mais une tension montée graduellement entre les deux camps avant même le début de la campagne officielle le 2 avril.

Face à cet ancien chauffeur de bus de 50 ans se dresse un seul et unique candidat. Chef de l'opposition, gouverneur de l'État le plus peuplé du pays, Henrique Capriles est décidé à sonner la fin de la "révolution socialiste". Selon toute vraisemblance, il devra patienter. Candidat malheureux en octobre dernier (44% contre 55% pour Chavez), l'avocat de 40 ans a déjà réussi un tour de force en rassemblant sous sa bannière les partis d''opposition naguère réputés pour leurs divisions.

Nicolas Maduro a durci le ton

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Maduro remercie sa banane, mais c'est bien à Chavez qu'il doit sa carrière

Auto-déclaré "fils spirituel d'Hugo Chavez", Nicolas Maduro tente à tout prix de marcher dans les pas de son ancien mentor. Connu pour son caractère conciliant et sa grande capacité à négocier, il a durci le ton à l'égard des "ennemis de l'intérieur et de l'extérieur" depuis son intallation au palais de Miraflores, reprenant à son compte la rhétorique chaviste.

Henrique Capriles ? "Un fasciste prince de la bourgeoisie parasite". L'opposition ? Elle complote pour le faire assassiner. L'Amérique d'Obama ? Elle complote également, cette fois pour éliminer son opposant et faire porter le chapeau aux chavistes. Hugo Chavez ? Un saint dont le cancer lui a été inoculé par "les pays impérialistes ennemis du Vénézuéla".

Entre paranoïa et harengues anti-impérialistes, Nicolas Maduro a aussi -un peu- parlé politique. Le candidat chaviste a tout de même pris un certain risque en s'emparant du thème de l'insécurité, un des plus flagrants échecs de son ancien mentor. "Je serai le président de la paix et de la sécurité", a-t-il affirmé. Une gageur dans un pays qui détient le taux d'homicide par habitants le plus élevé d'Amérique du Sud.

Pour rappeler son passé de chauffeur de transports en commun, Nicolas Maduro est parfois arrivé au volant d'un autobus à ses meetings :

Pour le reste, l'héritier politique n'a pas changé un iota à la méthode du "Comandante". Il a d'ailleurs repris intégralement le programme d'Hugo Chavez pour la présidentielle qu'il avait remportée en octobre 2012.

Nicolas Maduro, simple messager à la fois garant et courroie de transmission de ce qu'il reste du souffle chaviste ? Dans un accès de mysticisme, le président par intérim a sérieusement assuré avoir ressenti la présence de Chavez dans un oisillon entré par sa fenêtre alors qu'il était en train de prier. Dans les rues de Caracas, c'est toujours le visage de l'ancien leader qui s'affiche à chaque coin de rue. Et à la télévision publique, les discours du président défunt sont largement rediffusés depuis sa mort.

Deuxième chance pour Henrique Capriles, qui cultive sa différence

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Qui ne saute pas n'est pas Ca-pri-les !

Déjà doté d'une solide expérience politique et misant sur une forte poussée de l'abstention, Henrique Capriles a pris soin de ne pas trop écorner le mythe de l'ancien homme fort du pays. En annonçant sa candidature pour le scrutin du 14 avril, il avait mis en doute la date de la mort du président Chavez, resté invisible entre son retour de Cuba le 18 février et l'annonce de son décès. Bien mal lui en a pris : le candidat avait présenté ses excuses quand des membres de la famille Chavez l'avaient accusé de ne pas respecter la mémoire du défunt.

S'il est encore trop tôt pour écorner l'héritage chaviste et ses partisans, Henrique Capriles s'est par contre consciencieusement appliqué à attaquer son adversaire, fustigeant notamment le supposé manque de charisme et d'envergure du candidat moustachu. Il "n'a jamais été un travailleur, il n'a jamais travaillé, c'est un rond de cuir professionnel, un paresseux, un fainéant ! Tous ceux qui le connaissent le savent", a-t-il par exemple accusé dans un tweet acide.

Adepte de la social-démocratie à la brésilienne et de l'économie de marché, Capriles promet habilement de ne pas supprimer les "missions bolivariennes" (des programmes sociaux à destination des plus pauvres financés par la manne pétrolière, seule ressource du pays doté des plus grandes réserves de brut au monde). "Je ne suis pas l'opposition, je suis la solution", lance-t-il à l'envie.

En revanche, il assure qu'il coupera le robinet du pétrole à Cuba, l'allié de toujours du Vénézuela, qui reçoit plus de 100.000 barils quotidiens en provenance du Vénézuéla, en échange de l'envoi de médecins et autres coopérants. Il pointe aussi les fléaux quotidiens des Vénézuéliens : l'insécurité, l'inflation la plus forte de la région, les fréquentes pénuries alimentaires, ou les coupures de courant à répétition.

Des "élections profondément anti-démocratiques"

L'élection présidentielle sera irréprochable et transparente d'un point de vue technique, mais le scrutin sera "profondément antidémocratique" en raison de l'inégalité d'exposition entre candidats, a estimé Vicente Diaz, membre du Conseil national électoral (CNE).

Le responsable relève en premier lieu la différence de traitement par les médias des campagnes des deux candidats. A titre d'exemple : seule la chaîne Globovision, "relais des antichavistes", a diffusé la déclaration de candidature d'Henrique Capriles.

Signe de la tension de cette fin de campagne, les frontières vénézueliennes sont closes depuis près d'une semaine, entre 125.000 et 150.000 militaires ont été déployés à travers tout le pays, et il est interdit d'acheter de l'alcool ou de porter des armes à feu... À quelques jours du scrutin, les autorités électorales du Venezuela ont même proposé aux deux candidats de s'engager à reconnaître le résultat du scrutin.

Outre la lourde tâche de succéder à Chavez, le vainqueur héritera aussi d'une économie très fragile, qui a enregistré l'an dernier d'inquiétants indicateurs avec un déficit explosif (15% du PIB) et l'inflation la plus forte d'Amérique latine (plus de 20%).

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