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Lucien Bouchard veut en savoir plus sur le rapatriement de 1982

Lucien Bouchard veut en savoir plus sur le rapatriement de 1982
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Un texte de Marc-Antoine Ménard

L'ancien premier ministre du Québec Lucien Bouchard a réagi à son tour aux récentes révélations concernant le rapatriement de la Constitution de 1982, contenues dans un livre de l'historien Frédéric Bastien, La bataille de Londres.

En entrevue à l'émission 24 heures en 60 minutes, jeudi, M. Bouchard a affirmé avoir eu une « double impression de surprise, pour ne pas dire d'incrédulité, et d'inquiétude » en prenant connaissance des informations voulant que le juge en chef de la Cour suprême de l'époque, Bora Laskin, ait tenu les gouvernements canadien et britannique au courant des délibérations du plus haut tribunal du pays, faisant fi de la séparation entre les pouvoirs exécutif et judiciaire.

L'ancien chef du Bloc québécois et du Parti québécois estime que le gouvernement fédéral devrait rendre public les documents confidentiels concernant le rapatriement, en s'entendant avec ceux qui les réclament. « Que les instances autorisées le fassent ensemble, il y a une façon de le faire d'une façon tout à fait convenable, pour que cela se situe au plus haut niveau des intérêts publics », a-t-il dit.

Loin d'en limiter l'importance au Québec, M. Bouchard a replacé le rapatriement de la Constitution dans son contexte historique canadien, lui qui affirmait en octobre 1995, quelques jours avant le deuxième référendum sur la souveraineté du Québec, que celle-ci avait été « enfoncée dans la gorge » des Québécois.

Lucien Bouchard a rappelé le discours prononcé à Sept-Îles en 1984 par celui qui allait devenir le premier ministre du Canada, Brian Mulroney. M. Bouchard a souligné que M. Mulroney avait lui-même parlé du rapatriement en des termes forts, le décrivant comme un « traumatisme collectif » et un « ostracisme constitutionnel ».

Ce discours, dont le contenu a en grande partie été attribué à Lucien Bouchard, qui travaillait alors à la campagne du chef du Parti progressiste-conservateur, a été un événement marquant de cette campagne qui a conduit Brian Mulroney à la tête d'un gouvernement majoritaire et pavé la voie au processus qui allait mener à l'accord constitutionnel du lac Meech. Un accord décrit par M. Mulroney comme « un remède à des blessures à guérir », a rappelé M. Bouchard.

« Le Canada a voté pour lui, les gens voulaient la réconciliation, les gens n'étaient pas d'accord avec ce qui s'était passé en général », a rappelé Lucien Bouchard. Brian Mulroney a été élu le 4 septembre 1984, avec 211 sièges sur 282 à la Chambre des communes (58 sur les 75 du Québec), du jamais vu depuis John Diefenbaker, en 1958.

Réaction « inacceptable » de Legault

Au passage, l'ancien premier ministre péquiste critique le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, qui a minimisé l'importance de se pencher sur les révélations de La bataille de Londres. Lucien Bouchard juge cette réaction « inacceptable » et « légère ». « On est en plein cur de l'histoire contemporaine et d'une histoire qui continue de se répercuter chaque jour », a-t-il insisté.

M. Bouchard a notamment insisté sur la réaction, rare, de la Cour suprême qui se penche sur les allégations de l'historien Frédéric Bastien. « Elle a dit qu'elle allait examiner la teneur des allégations parce qu'elle s'inquiète », a-t-il souligné.

« Même si ce n'était que le greffier qui avait fait une intervention, on se poserait des questions aussi », a-t-il ajouté.

Quant à l'importance de ces allégations, Lucien Bouchard ne croit pas qu'elles ont changé le cours de l'histoire. « Cela montre qu'il y en a qui ont traversé la ligne de la séparation des pouvoirs qui est au cur du fonctionnement de toutes les démocraties constitutionnelles », souligne-t-il.

Gomery ajoute sa voix

Par ailleurs, au cours de la même émission de 24 heures en 60 minutes, le juge à la retraite John Gomery a aussi affirmé qu'Ottawa devrait libérer les documents concernant le rapatriement de la Constitution, plaidant que tôt ou tard, ces informations finiront par être connues. « Comment les citoyens peuvent juger efficacement le comportement de leurs politiciens s'ils n'ont pas les faits? C'est quoi l'intérêt du gouvernement de cacher ces faits? Je ne vois pas l'intérêt », estime M. Gomery.

L'ancien président de la commission sur le scandale des commandites critique au passage la loi canadienne sur l'accès à l'information, « l'une des plus faibles du monde moderne », selon lui. « Jusqu'ici, nous avons seulement le côté anglais de l'histoire et pas le côté canadien », souligne-t-il. L'historien Frédéric Bastien n'a en effet obtenu que des documents caviardés du Conseil privé à Ottawa. Son travail est basé sur la documentation obtenue du Foreign Office à Londres et des entrevues réalisées avec des acteurs de l'époque.

Le gouvernement du Québec a indiqué plus tôt cette semaine qu'il évaluait les moyens qu'il pourrait prendre pour qu'Ottawa ouvre ses livres. Le gouvernement fédéral, par la voix du porte-parole du premier ministre Stephen Harper, Carl Vallée, a refusé de rendre publics les documents confidentiels.

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