Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

La loi de retour au travail pour Postes Canada, pas justifiée selon l'OIT

La loi de retour au travail pour Postes Canada, pas justifiée selon l'OIT
PC

OTTAWA - Le gouvernement Harper se fait taper sur les doigts par l'Organisation internationale du travail, une institution de l'ONU, qui juge injustifiée sa loi de retour au travail imposée aux employés de Postes Canada.

Ottawa avait fait adopter sa loi de retour au travail forcé en juin 2011, pour mettre fin au conflit qui opposait les employés à la direction de Postes Canada.

L'organisation onusienne a émis ses commentaires dans son plus récent rapport sur la liberté syndicale, après qu'une plainte ait été déposée contre le Canada par le syndicat des employés canadiens des Postes.

L'Organisation internationale du travail (OIT) en arrive à sa conclusion parce qu'elle estime que les services postaux ne constituent pas des «services essentiels» au sens strict du terme.

L'OIT note que le droit de grève peut être limité lorsqu'il s'agit de fonctionnaires de l'État, lorsque les employés concernés assurent la prestation de services essentiels ou encore lorsque l'interruption de ces services mettrait en danger la santé ou la sécurité publique.

Ce qui n'était pas le cas en juin 2011, note le comité du Bureau international du travail. Même s'il dit avoir pris bonne note de tous les arguments du gouvernement à l'effet qu'un arrêt de travail menaçait la fragile reprise économique, le Bureau croit que les difficiles conditions économiques de l'époque ne pouvaient justifier une loi de retour au travail visant des employés postaux.

«Bien qu’il ait toujours été sensible au fait que l’interruption prolongée des services postaux est susceptible d’affecter des tiers totalement étrangers aux différends opposant les parties et qu’elle peut par exemple avoir de graves répercussions pour les entreprises et affecter directement les individus (en particulier les allocataires des indemnités chômage ou d’aide sociale et les personnes âgées qui dépendent du versement de leur pension de retraite), le comité a néanmoins considéré que, quoi qu’il en soit, pour aussi regrettables que soient ces conséquences, elles ne sauraient justifier une limitation des droits fondamentaux à la négociation collective, à moins qu’elles n’atteignent une telle gravité qu’elles mettent en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population», est-il écrit dans le rapport, faisant référence à une plainte antérieure visant également le Canada.

Le comité a de plus exprimé «sa préoccupation» face à la décision du gouvernement d’imposer la reprise du travail par voie législative.

Vu qu'un accord de services minimums avait déjà été convenu entre les travailleurs et le patronat, «le gouvernement aurait dû se contenter de veiller au respect des services minima négociés», notamment pour les chèques d'aide sociale. Et non pas imposer une loi, insiste le comité.

L'agence de l'ONU enjoint le gouvernement d'éviter de recourir à l’avenir à de telles interventions législatives et encourage plutôt des négociations collectives véritablement libres. Elle lui demande de veiller «à ce qu’elles ne se déroulent pas sous la menace qu’un accord soit imposé».

Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes estime qu'il s'agit là d'une belle victoire pour le mouvement syndical canadien, est-il indiqué dans un communiqué diffusé mardi. Il avait à l'époque dénoncé ce qu'il qualifiait d'«ingérence gouvernementale».

«La décision de l'OIT est claire, a précisé Denis Lemelin, président national du syndicat. Le droit de grève est un droit fondamental. À l'avenir, le gouvernement canadien devra respecter le droit des travailleuses et travailleurs de négocier collectivement et, au besoin, de faire la grève.»

Le gouvernement du Canada avait demandé à l'OIT de rejeter la plainte.

Personne au cabinet de la ministre du Travail, Lisa Raitt, n'a jugé bon de rappeler mardi.

Ottawa avait fait adopté la loi de retour au travail le 25 juin 2011, après que Postes Canada eut mis en lock-out ses employés deux semaines auparavant. Ils avaient auparavant entrepris une série de grèves tournantes.

Le gouvernement affirmait alors n'avoir d'autre choix que d'agir rapidement pour protéger l'économie canadienne qui souffrait de l'arrêt du service postal.

Mais les travailleurs ont mal digéré la loi fédérale qui a coupé court à leurs négociations avec l'employeur. Ils ont d'ailleurs contesté la loi devant les tribunaux canadiens afin de la faire annuler. Les procédures sont toujours en cours, a fait savoir le syndicat.

En juin 2011, la société d'État avait estimé que le conflit lui avait coûté entre 250 et 300 millions $.

L'OIT est l'agence des Nations unies responsable de l'élaboration et de l'encadrement des normes internationales du travail.

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.