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Brigitte M à l'Oratoire Saint-Joseph

Brigitte M à l’Oratoire Saint-Joseph
Marc Young

MONTRÉAL - Dans l'antre de l'Oratoire Saint-Joseph de Montréal, Brigitte M présentait jeudi soir la première de son spectacle From Metal to Crystal, un concept original qui consiste à s'approprier quelques-uns des plus grands classiques du rock pour les interpréter dans un hybride de musique classique et d'opéra. Entre le rêve et la réalité.

Paru l'an dernier, le disque From Metal to Crystal de Brigitte M prenait forme sur scène dans une formule à grand déploiement. De toute évidence, l'équipe avait mis le paquet : Denis Bouchard à la mise en scène, Peter Ranallo aux arrangements (puis à la direction musicale) et Michel Robidas aux costumes et aux décors.

Quant à la chanteuse, il faut résolument avoir beaucoup de cran pour s'attaquer à des monstres sacrés de la musique, surtout quand on transpose la force brute de la musique metal à la délicatesse du classique.

La reine ailée

Dans une atmosphère solennelle, un orgue perché dans les hauteurs de la vaste salle envoie ses premières notes. Au milieu de l'allée centrale, le guitariste Danny Ranallo, éclairé en plongée d'un faisceau lumineux, rétorque avec quelques salves électriques. Le premier instrument s'inspire du classique alors que l'autre emprunte au rock. Un duel à finir entre deux mondes qui allaient se marier pour la cause, du moins le temps d'un spectacle.

C'est par la suite que Brigitte M fait son apparition. Au milieu de la scène, elle est en quelque sorte juchée au somment d'un grand socle de tissu qui à l'apparence d'une tente romaine. Ça cache une surprise ?

Chevelure blanche baroque et robe de soie, elle a l'air d'une star d'un monde lyrique ensorcelé par le gothique. Autour d'elle, au bas, les musiciens que sont Peter Ranallo (accordéon et piano), Danny Ranallo (guitares), Domenic Romanelli (basse) et Mark Di Claudio (batterie). Soudain, la voix juste et puissante de Brigitte M s'envole dans la basilique en emportant avec elle l'air Nessun Dorma, tiré de l'opéra Turandot de Giacomo Puccini. Pas à dire, l'étonnement est grand dans l'audience.

En douceur, elle enchaînera avec I Was Made For Loving You (de la formation américaine Kiss), qui déstabilise tout autant.

Juste après, sur The Show Must Go On (du mythique groupe Queen), la reine se révèle au monde. La structure sous elle (le socle), se sépare au milieu en deux parties égales afin de se déployer lentement de chaque côté : des ailes géantes de tissu et de métal. Symbolique effet assez réussi qui découvre en même temps les musiciens d'un quatuor à cordes (Philippe Dunnigan comme premier violon, Christian Prévost au second violon, Christine Giguère au violoncelle et Madeleine Messier à l'alto).

Derrière le décorum

À Behind Blue Eyes (The Who), les violons se font rock et le clavier est joli, tout comme la voix. Bien que la proposition fonctionne ici, une drôle de sensation persiste d'une pièce à l'autre. Ce défi de taille permet-il de vivre à leur juste valeur les oeuvres du rock et du métal ? Tout l'effort mis au décorum est louable, mais a-t-on vraiment ici une valeur ajoutée en ce qui concerne le contenu ?

Poser la question, c'est en bonne partie y répondre. Quelque chose n'arrive pas jusqu'au spectateur. En fait, pas complètement. Certes, les éclairages sont impressionnants, l'emballage aussi. Mais on cherche l'émotion, qui peine à naître de cette lourde production et du concept. Trop artificiel ? Trop tiré par les cheveux ? C'est comme si Brigitte M avait de la difficulté à véritablement incarner tous ces classiques écrits par des icônes du rock.

Cela dit, on ne crie pas à l'échec. Pour preuve, le morceau suivant, et non le moindre, sera fort intéressant. Dans un éclairage rouge dramatique, la chanson Nothing Else Matters (pièce maîtresse de Metallica sortie en 1991) est sombre, poétique et prenante. La mélancolie est belle l'ambiance aussi. On remarque du même coup que la qualité sonore proposée dans cette gigantesque pièce (beaucoup de béton) de la basilique est étonnante.

Durant quelque 90 minutes, Brigitte M proposera ainsi des adaptations (un peu moins d'une vingtaine) de classiques du rock et du métal. Certaines interprétées avec finesse (My Immortal d'Evanescence), d'autres avec un peu plus de difficulté. Peut-on vraiment envoyer un solo de guitare électrique sur la majestueuse pièce italienne Con te partirò de Francesco Sartori ? Peut-on faire des vocalises sur le titanesque ver d'oreille The Final Countdown (offerte dans un medley) de la formation Europe sans dénaturer un brin l'œuvre originale ? Possiblement. Mais force est d'admettre que tout doit être impeccable, car sinon le spectre de la caricature n'est jamais bien loin.

Au final, un concert qui à la qualité de son défaut. Majestueusement audacieux, mais peu authentique.

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