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Marc Ouellet a confié avoir été surpris de son ascension au sein de l'Église

Marc Ouellet a été surpris de son ascension

LA MOTTE, Que. - Le cardinal Marc Ouellet — qui pourrait devenir le prochain pontife — a souvent déclaré à des amis qu'il avait été surpris de sa rapide ascension au sein de l'Église catholique.

Dans un état «d'euphorie total», Marc Ouellet a appelé Claudette Boucher, une amie de longue date, peu de temps après avoir appris que le pape Jean Paul II allait bientôt le consacrer évêque, en 2001.

Selon Mme Boucher, Mgr Ouellet lui a demandé, ainsi qu'à son mari, de prier pour lui parce qu'il ne se considérait pas digne de cette nouvelle fonction. «Il nous a dit qu'il avait besoin de nous», a confié Mme Boucher lors d'une entrevue accordée à La Presse Canadienne de sa résidence de Val d'Or, non loin de La Motte, le village natal du cardinal Ouellet.

«C'était un grand moment d'émotion... C'est un homme qui est toujours surpris.»

Mgr Ouellet leur a dit qu'il avait senti ses jambes s'engourdir pendant la cérémonie, a rappelé Mme Boucher.

Une fonction plus prestigieuse encore pourrait lui être confiée, alors que les cardinaux se réuniront à l'historique chapelle Sixtine, à 11 h 45 mardi, pour lancer le processus de sélection du prochain pape. Certains observateurs classent Mgr Ouellet parmi les favoris pour devenir le nouveau leader de l'Église catholique, mais d'autres ne mentionnent même pas son nom.

S'il est élu, cet amateur de plein air et de hockey deviendra le premier religieux venant d'un continent autre que l'Europe à accéder au trône de Saint-Pierre depuis le VIIIe siècle.

Au fil de son ascension au sein de l'Église, Mgr Ouellet avait été étonné par le simple fait d'être nommé archevêque de Québec et primat du Canada en 2002, selon Mme Boucher. Il oeuvrait à l'étranger depuis des décennies lorsque ses nouvelles fonctions l'ont ramené au Québec.

Mais la transition a été cahoteuse pour un homme dont la province d'origine avait été touchée par d'importantes transformations durant toutes ces années où il s'était éloigné.

À compter des années 1960, les églises du Québec, traditionnellement bondées, ont commencé à se vider. Ce changement dans les moeurs québécoises a graduellement sapé l'influence de la religion sur la société et la politique dans la province.

Après son arrivée à Québec à titre d'archevêque, les positions plus traditionnelles de Mgr Ouellet sur des sujets comme l'avortement et le mariage homosexuel faisaient contraste avec les opinions généralement avancées dans un Québec laïcisé.

Mgr Ouellet, qui avait passé plusieurs années à titre de missionnaire en Colombie, manquait d'expérience au Québec et n'était pas sur place pour vivre l'évolution de la relation entre l'Église et l'État.

«Il n'était pas dans la situation idéale, disons. Et lorsqu'on n'est pas préparé, c'est plus risqué et le défi est plus grand, estime Gilles Routhier, doyen de la Faculté de théologie de l'Université Laval. Ça n'a pas facilité les choses.»

Dans un cas typique où sa façon de voir les choses ne correspondait pas à l'opinion populaire, Mgr Ouellet a déclaré aux médias, lors d'une manifestation pro-vie en mai 2010 à Québec, que l'avortement était injustifiable, même dans le cas d'un viol. Ses propos ont soulevé l'ire de politiciens, d'éditorialistes et de militantes des droits des femmes.

Mgr Ouellet est retourné au Vatican plus tard cette année-là, lorsque le pape Benoît XVI l'a nommé à l'influente Congrégation pour les Évêques, qui supervise et confirme la nomination des évêques partout au monde.

Robert Dennis, un chargé de cours à l'Université Queen's et spécialiste du Vatican moderne, croit que Mgr Ouellet a appris de son passage au Québec. Il pense que ce séjour lui a enseigné ce que représentait le rôle de ministre de l'Évangile dans une société laïque, une expérience qui pourrait s'avérer utile si jamais il succédait à Benoît XVI.

«Dans un sens, les moments passés au Québec représentent une très importante répétition, car il pourrait avoir une occasion semblable sur une scène beaucoup plus grande.»

M. Dennis ajoute que Mgr Ouellet tentait simplement de rester à ses croyances théologiques, sur les plans théologique et social, plutôt que de s'adapter à la province. «Peut-être n'était-il pas tout à fait conscient de l'état de la province lorsqu'il y est revenu, bien que je n'y crois pas vraiment (à cette théorie).»

Mgr Ouellet a manifesté son inquiétude parce que, selon lui, les Québécois n'ont jamais remplacé leur dévotion pour l'Église, un trait de caractère si immuable dans le passé, par rien de significatif.

«Je vois la société québécoise et je me dis: "ne sommes-nous pas en train d'assister à une sorte d'implosion?"», avait-il déclaré à l'interviewer Pierre Maisonneuve dans le livre «Le journaliste et le cardinal», en 2006.

«Il n'y a pas d'explosion violente, mais une implosion: quelque chose est cassé à l'intérieur, il règne dans notre collectivité un vide, un malaise profond.»

De son coin de pays du nord-ouest québécois, Claudette Boucher assure que Mgr Ouellet n'affiche aucun pessimisme lorsqu'il est question du futur de l'Église au Québec. «Il reste optimiste face à tout ça. C'est juste que (les gens) ont mis leur esprit en repos, et que ça va revenir», raconte Mme Boucher.

Mais Mgr Ouellet, qui avait également été surpris d'être ordonné cardinal par Jean-Paul II en 2003 selon Mme Boucher, n'aime pas discuter de la possibilité qu'il devienne, un jour, le leader des 1,2 milliards de catholiques sur la planète.

Interrogé à ce sujet par le quotidien québécois Le Soleil, en 2011, Mgr Ouellet avait dit qu'il s'agirait d'un «cauchemar».

«Je vois le travail que le pape a à faire. Ce n'est peut-être pas très enviable. C'est une responsabilité écrasante. Enfin, à la grâce de Dieu! Il y a l'aide du Saint-Esprit, évidemment, mais c'est une très grosse responsabilité. Personne ne fait campagne pour ça».

Les Boucher, dont les liens d'amitié avec Mgr Ouellet remontent à plus de 40 ans, le taquinent depuis un certain temps déjà à l'effet qu'ils pourraient devoir l'appeler «Sa Sainteté» la prochaine fois qu'ils le verront.

«'Oh, non, non, non', dit-il en riant», relate Mme Boucher, qui héberge Mgr Ouellet lorsque celui-ci s'arrête dans la région.

«'C'est le monde sur les épaules'».

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