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Ici Chez soi de l'ONF: Lukas, dans les tranchées de Winnipeg (VIDÉO)

Ici Chez soi de l'ONF: Lukas, dans les tranchées de Winnipeg (VIDÉO)

Il faut avoir le cœur solide pour livrer, tous les jours, des médicaments à des personnes souvent vulnérables, malades et brisées, à qui Chez soi procure un toit et du soutien. C'est le quotidien de Lukas, un travailleur social de Winnipeg.

Ici, Chez soi est un documentaire Web de l’ONF dans les coulisses de Chez soi, une grande enquête de la Commission de la santé mentale du Canada pour stopper l’itinérance chronique. Le concept? Donner un toit aux sans-abri.

70 % des participants de Chez soi à Winnipeg sont autochtones. Dans la capitale du Manitoba, l'héritage de la colonisation du territoire est bien présent : des milliers d'individus voyagent chaque année entre les réserves et la ville à la recherche d'opportunités... ou d'une façon d'échapper à leurs problèmes. Tissées serrées, les communautés amérindiennes sont des habituées des programmes gouvernementaux et autres projets pilotes.

Le réalisateur Darryl Nepinak, lui-même d'origine amérindienne, est au fait de cette situation. Dans le film Quelque chose de profond, il laisse Lukas décrire l'état des choses à Winnipeg. Les pires statistiques de consommation de solvants chez les adultes au Canada proviennent d’ici. Les plaies du déracinement de générations entières d'Autochtones envoyés dans les pensionnats tenus par des blancs sont encore vives. Des abus de toutes sortes ont ouvert la porte à des problèmes de santé mentale lourds. L'entraide et la discrimination marchent sur les mêmes trottoirs.

Habitué des tranchées de la pauvreté et de l'itinérance à Vancouver, Lukas reconnaît que la situation est unique dans la capitale du Manitoba, où 70 % des sans-abri sont issus des communautés amérindiennes; seulement 8 % de la population totale de la ville est autochtone. À Winnipeg, Chez soi intègre des services psycho-sociaux adaptés à la culture amérindienne.

Plusieurs approches

Lukas et les autres travailleurs sociaux sont en contact avec les chercheurs de l'étude, puisque ceux-ci veulent connaître l'efficacité de leurs interventions auprès des « clients », comme on appelle les individus recrutés pour Chez soi.

Afin d'évaluer le meilleur moyen d'offrir des services aux participants du groupe logé (275 personnes à Winnipeg), les chercheurs de Chez soi ont choisi deux approches d'intervention connues dans le milieu du travail social. La première, appelée « ACT », est destinée aux individus qui ont des besoins élevés. La deuxième, « ICM », est plutôt réservée aux participants qui ont des besoins « modérés ». Voici ce qui les caractérise :

ACT – Assertive Community Treatment

L'équipe ACT visite habituellement les participants chaque jour.

Les participants suivis par l'équipe ACT ont des besoins élevés (médication, maladies chroniques, condition grave).

Pour déterminer si les participants avaient des besoins élevés, l'équipe de Chez soi a fait passer deux évaluations : le Mini International Neuropsychiatric Interview (MINI) et le Multnomah Community Ability Scale (MCAS).

L'équipe ACT est multidisciplinaire (travailleurs sociaux, psychiatres, infirmières, etc.)

C'est l'approche de traitement utilisée à Calgary et Edmonton, où des programmes de logement pour des personnes en situation d'itinérance touchées par la maladie mentale existent déjà.

Selon des résultats préliminaires des chercheurs de Chez soi, cette approche se révèle avantageuse financièrement : pour chaque somme de 2 $ investie, on ferait faire des économies de 3 $ au système en frais hospitaliers, judiciaires et d'hébergement.

ICM – Intensive Case Management

L'équipe ICM visite habituellement les participants une fois par semaine.

C'est l'approche de traitement utilisée à Toronto, où un programme de logements pour des personnes en situation d'itinérance a été lancé en 2005.

Selon les chercheurs, cette approche est particulièrement utile pour les participants qui n'ont pas des « besoins élevés », c'est-à-dire qui n'ont pas à être vus tous les jours.

Pour faire partie de ce groupe, les participants devaient simplement ne pas s’être qualifiés pour recevoir les traitement de l'équipe ACT.

L'approche ICM est aussi moins coûteuse que l'approche ACT, mais ne serait pas nécessairement avantageuse d'un point de vue coût/bénéfice.

À Montréal, un groupe communautaire est responsable du soutien d'un groupe de participants grâce à l'approche ICM; on veut comparer leur travail à celui du système conventionnel (CLSC, hôpitaux, etc.).

Le traumatisme intergénérationnel?

Lukas n'hésite pas à aborder le sujet de l'itinérance et de la santé mentale chez les Autochtones. Dans Quelque chose de profond, il reconnaît que les conditions de vie des sans-abri autochtones sont directement liées aux traumatismes intergénérationnels vécus par nombre d'entre eux. Le réalisateur Darryl Nepinak a d'ailleurs raconté l'histoire d'un participant autochtone, Robert, qui reconnaissait ne jamais s'être senti chez lui après avoir grandi dans des familles d'accueil et des refuges.

Invité à présenter le portrait de Lukas sur le pendant anglophone du projet Ici, Chez soi, la chercheuse Julia Christensen a justement été frappée par ce constat du travailleur social : « C'est un portrait clair de l'histoire de la colonisation et de son impact sur les gens. »

Selon Julia Christensen, les plaies de la colonisation sont encore présentes, et même si les travailleurs sociaux comme Lukas font de leur mieux pour accompagner les participants vers une plus grande stabilité, il y a peu d'espoir de régler la situation une fois pour toute à moins que les communautés se mobilisent pour mettre fin à la discrimination.

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