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Joe Borsellino, un témoin récalcitrant devant la commission Charbonneau

Borsellino, un témoin récalcitrant
Ceic

Un texte de François Messier

La commission Charbonneau a commencé lundi après-midi à entendre le témoignage de Giuseppe (Joe) Borsellino, fondateur, actionnaire et président de Garnier Construction, un entrepreneur en construction qui a été associé à un cartel des égouts actif à Montréal par plusieurs témoins.

Le procureur de la commission Simon Tremblay, qui mène son interrogatoire, a précisé d'entrée de jeu que le témoin avait refusé de rencontrer les enquêteurs de la commission pour une entrevue préalable, ce qui laisse planer un doute sur sa volonté de collaborer.

Giuseppe Borsellino s'est effectivement montré évasif sur la quasi totalité des questions que lui a posées Me Tremblay. Il s'est même montré étonné lorsque le procureur lui a dit qu'il était président d'une entreprise d'arpentage. « C'est une petite compagnie », dira-t-il ensuite, en guise d'explications.

Après avoir fait le tour des entreprises dans lesquelles M. Borsellino est impliqué, le procureur Tremblay a posé de nombreuses questions au témoin au sujet de sa relation avec l'ex-directeur général de la FTQ-Construction Jocelyn Dupuis.

Il a laissé entendre que le témoin avait contacté Jocelyn Dupuis en 2008 pour s'informer de la possibilité d'obtenir des contrats dans le cadre d'un projet de rénovation d'une usine de Rio Tinto au Saguenay.

Selon lui, six entreprises ont été invitées à soumissionner pour ce contrat de 40 millions de dollars, dont Opron, qui fait partie du groupe que dirige Giuseppe Borsellino.

Le témoin a longtemps tergiversé à ce sujet. Il a dit ne jamais avoir fait de démarches pour Opron, avant d'admettre qu'il avait bel et bien contacté « des amis » pour s'informer de la possibilité d'obtenir des contrats. Jocelyn Dupuis était l'un d'eux, a-t-on finalement appris.

Giuseppe Borsellino a convenu que Jocelyn Dupuis ne pouvait pas l'aider, mais a ajouté qu'il était peut-être au courant des possibilités de travailler chez Rio Tinto. « Je veux savoir comment ces multinationales-là marchent », a-t-il fait valoir.

Le témoin a aussi admis du bout des lèvres que Jocelyn Dupuis l'avait déjà appelé pour l'intéresser à un projet. Un tas de gens pouvaient cependant faire de même, a-t-il prestement ajouté.

Devant les réponses évasives du témoin, le procureur Tremblay lui a demandé de « réfléchir à cela ce soir ». Il l'a prévenu que l'on reviendrait sur le sujet dès mardi matin.

Il est à noter que le patron de Garnier Construction porte le même nom qu'un autre promoteur qui dirige le groupe Petra-St-Luc, et dont les activités ont été évoquées lors du témoignage de Joseph Farinacci, lundi avant-midi.

Le témoignage de Giuseppe Borsellino sera interrompu à 14 h. Les avocats des médias tenteront alors de convaincre les commissaires de lever l'ordonnance de non-publication concernant une partie des témoignages de Joseph Farinacci et du PDG de Genius Michel Lalonde, ainsi que celui de Jacques Victor, un spécialiste des appels d'offres.

Un nom évoqué à plusieurs reprises

Le nom Joe Borsellino a déjà été évoqué à plusieurs reprises devant la commission. L'ex-propriétaire d'infrabec, Lino Zambito, l'ingénieur retraité de la Ville de Montréal Gilles Surprenant et l'entrepreneur Michel Leclerc y ont notamment fait référence.

Lors de son témoignage, Lino Zambito a identifié Garnier Construction comme l'une des entreprises faisant partie du cartel des égouts actif à Montréal au cours des années 2000.

Lino Zambito a soutenu que ces entreprises devaient verser 2,5 % de la valeur des contrats truqués obtenus à Nicolo Milioto, alors dirigeant de Mivela Construction, un homme identifié comme un intermédiaire entre les entrepreneurs et le clan mafieux Rizzuto par un enquêteur de la commission.

L'ex-entrepreneur avait précisé que les mêmes entrepreneurs versaient une autre ristourne de 3 % sur les contrats obtenus à Nicolo Milioto pour le financement d'Union Montréal, et ce, à compter de 2005 ou 2006.

En octobre dernier, Gilles Surprenant a aussi désigné Garnier Construction comme une des dix entreprises de construction impliquées dans un système de collusion à la Ville de Montréal entre 2000 et 2008.

M. Suprenant a révélé avoir reçu quelque 700 000 $ en pots-de-vin de la part des membres de ce cartel, dont 102 500 $ de Giuseppe Borsellino.

Luc Leclerc, qui a longtemps été ingénieur chargé de la surveillance des chantiers à la Ville de Montréal, a aussi dit qu'il recevait de l'argent de Giuseppe Borsellino, en échange de l'approbations de faux extras. Il dit avoir déjà reçu 25 000 $ de ses mains.

De son côté, Michel Leclerc de Terramex a expliqué avoir découvert la réalité de la collusion à Montréal au contact de Giuseppe Borsellino, à la fin des années 1990. Ce dernier lui avait alors, à deux reprises, demandé de se « tasser » pour des contrats lancés par la Ville de Montréal en 1997.

À la première occasion, a-t-il dit, Giuseppe Borsellino lui a offert 50 000 $ pour qu'il se retire d'une soumission qu'il avait remportée. Michel Leclerc a raconté que quelques jours après avoir refusé l'offre, M. Borsellino et un autre homme l'avaient intercepté dans son camion pour insister de nouveau, mais en vain. « Il y a eu un petit peu d'intimidation », a-t-il dit.

« Dans les jours qui ont suivi cette rencontre-là, on a eu un appel à la bombe au bureau, et puis on a eu de l'équipement qui a été volé et endommagé. J'en ai déduit que c'était peut-être en rapport avec cet événement-là », a conclu Michel Leclerc.

Enfin, son nom est ressorti lorsqu'il a été révélé que l'ex-grand patron des travaux publics à la Ville de Montréal, Robert Marcil, avait remis sa démission en juin 2009 après avoir été interrogé par des enquêteurs de la Ville au sujet d'un voyage en Italie en sa compagnie.

Aucun de ces sujets n'a été abordé par le procureur Tremblay lundi après-midi.

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Tony Accurso

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