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Tuerie de Newtown: le débat sur le port d'armes à feu est relancé mais va-t-il aboutir un jour?

Pourquoi les Américains ne sont pas prêts de lâcher les armes
AFP

TUERIE DE NEWTOWN - À chaque nouvelle tuerie, la question se pose avec insistance. Pourquoi est-il si facile de posséder une arme aux États-Unis? Pourquoi et comment un jeune homme de 20 ans peut surgir dans une salle de cinéma près de Denver, armé de deux pistolets et d'un fusil à pompe? Pourquoi et comment un étudiant peut, sur le campus de son université en Virginie, circuler avec trois armes à feu et tuer 32 personnes? Pourquoi et comment Adam Lanza, 20 ans, a pu prendre les armes de sa mère et assassiner froidement 26 personnes dans une école primaire? Pourtant, le débat n'est pas si simple aux États-Unis.

Si Barack Obama appelle à des "mesures significatives"

La tuerie de Newtown est l'un des pires carnages jamais commis dans un établissement scolaire aux Etats-Unis avec 20 enfants et 6 adultes tués. Barack Obama, ému aux larmes, a appelé à des mesures "significatives" pour éviter de nouvelles tragédies quelques heures après la fusillade vendredi 14 décembre alors que la Maison Blanche avait tout d'abord déclaré que ce n'était "pas le jour" pour engager le débat. Après la tuerie d'Aurora, en juillet dernier, le président en campagne pour sa réélection était très silencieux. Cette fois-ci encore, à aucun moment, il n'a utilisé le mot "arme" dans son allocution. Le terrain est miné et Barack Obama le sait bien.

Mais ses soutiens se sont rapidement manifestés. Le maire de New York, Michael Bloomberg, militant de longue date pour un renforcement de la loi de contrôle des armes à feu, a appelé le président à "envoyer un projet de loi au Congrès". Le réalisateur Michael Moore, Oscar 2003 du meilleur film documentaire pour "Bowling for Columbine", qui revenait sur le massacre du lycée de Columbine (Colorado, ouest), a pour sa part jugé sur Twitter que "la seule manière d'honorer ces enfants morts était d'exiger une réglementation stricte des armes". Au Canada voisin, le chef de l'opposition de gauche, Thomas Mulcair (Nouveau parti démocratique), a estimé que "le temps viendra de réfléchir à ce qui s'est passé et aux moyens à prendre pour empêcher d'autres tragédies semblables". Et une pétition a été lancée sur le site de la Maison Blanche pour un plus grand contrôle du port d'armes. Pétition rapidement suivie d'une autre qui demande à l'inverse la présence systématique d'armes dans les écoles.

Il fait face à un droit constitutionnel et fondamental à se défendre

Les opposants à une telle réforme continuent en effet de souligner que le droit de posséder des armes est inscrit dans la Constitution, dans le fameux Deuxième Amendement, défendu bec et ongles par le lobby des armes. Alan Gottlieb, fondateur de la Fondation pour le Second Amendement, s'est dit auprès de l'AFP "sûr que la personne qui a commis cet horrible crime savait qu'il pouvait y aller et que personne ne pourrait l'arrêter", les écoles étant "des lieux où il est interdit d'avoir des armes". Une défense par l'attaque donc qui n'est pas pour déplaire à un grand nombre d'Américains.

Le deuxième amendement de la Constitution américaine dit: "A well regulated Militia, being necessary to the security of a free State, the right of the people to keep and bear Arms, shall not be infringed". Autrement dit en français: "Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d'un État libre, le droit qu'a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé."

Si un jugement de la Cour suprême de 1939 interprétait le deuxième amendement de manière restrictive, estimant que le port d'arme ne devrait être permis qu'au sein d'une milice ou d'une organisation militaire, un certain libéralisme a ramené une interprétation de l'amendement en tant que droit individuel au port d'armes durant les années 1960, époque des luttes pour les droits civils. Chaque année, environ 100.000 personnes sont blessées par arme à feu aux Etats-Unis et plus de 31.500 en meurent, selon des statistiques officielles.

Certains États comme celui de New York ont bien tenté de contrôler le port d'armes, mais la NRA (National Rifle Association), le lobby des armes milite activement pour le Deuxième Amendement ne soit en rien entravé. Avec ses 4,3 millions de membres et ses 202 millions d'euros de dons, il est le lobby le plus puissant des États-Unis depuis une décennie.

Résultat, il est plus facile d'acheter une arme qu'un camembert

Même s'il est un peu simpliste de comparer de telles choses, le droit est tel qu'il est, en effet, extrêmement difficile de trouver un fromage au lait cru sur le territoire américain, plus encore lorsqu'il s'agit d'un fromage importé de France. Pour la bonne et simple raison, que ce type de fromages est considéré comme "dangereux pour la santé". De même qu'un simple et inoffensif Kinder Suprise est tout bonnement introuvable dans les supermarchés américains. La raison d'une telle interdiction? Le danger d'étouffement que représentent les jouets contenus dans les célèbres œufs. Il existe pourtant un vrai marché de la contre-bande de Kinder Surprise.

Pire encore, comme le soulève vendredi 14 décembre, le site Thinkprogress.org, il est désormais plus facile pour un américain de s'acheter une arme que de pouvoir accéder aux soins psychiatriques. Ce dernier paradoxe prend tout son sens, alors que l'on commence à mieux connaître la personnalité d'Adam Lanza, l'auteur de la fusillade de Newtown qui était atteint d'une certaine forme d'autisme.

La plupart des meurtres aux États-Unis sont le fait d'armes à feu, il est assez facile de s'en procurer avec un budget de 250 à 500$, l'arme utilisée par Adam coûte elle entre 700 et 1200$. Dans le même temps, l'accès aux services psychiatriques reste inégal, son financement et les besoins des bénéficiaires sont soumis aux caprices des gouvernements de chaque État. Dans le Connecticut, l'État dans lequel a eu lieu la tragédie, seul 1 patient sur 5 souffrant de graves troubles mentaux est pris en charge par le système de santé.

Le débat est loin d'être tranché mais les arguments sont là.

Las imágenes de la tragedia

Masacre en una escuela de Connecticut

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