Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

L'heure des explications a sonné pour Yves Themens (DIRECT)

EN DIRECT - Au tour d'Yves Themens
SRC

Un texte de François Messier

L'ingénieur Yves Themens, qui a été responsable de la planification de l'ensemble des travaux de construction à la Ville de Montréal entre 2004 et 2011, a entrepris son témoignage devant la commission Charbonneau mardi après-midi.

Au cours des 90 premières minutes de son interrogatoire, mené par la procureure Claudine Roy, il n'a donné prise à aucune des multiples allégations faites à son endroit par l'ex-propriétaire d'Infrabec, Lino Zambito, et ses collègues Luc Leclerc et Gilles Suprenant.

Yves Themens a notamment contredit qu'il fournissait la liste des entrepreneurs intéressés à soumissionner pour un contrat en 2007 ou en 2008, après que cette liste eut cessé d'être publique, comme l'avait affirmé Lino Zambito.

L'ingénieur dit qu'il a bel et bien transmis de telles informations à plusieurs entrepreneurs, dont des responsables des firmes Soter, ATG, TGA et CSF, mais que cela était parfaitement légal jusqu'au 30 octobre 2009. Il dit même qu'il s'était renseigné à ce sujet auprès du service juridique de la Ville.

M. Themens soutient que ces listes étaient devenues disponibles le 27 août 1999, en vertu d'un avis juridique fourni par le greffier Léon Laberge. Les listes étaient auparavant secrètes, mais une entreprise avait contesté cette façon de faire et avait eu gain de cause. La Ville n'avait pas fait appel.

En 2003, a dit le témoin, la greffière Suzanne Jalbert avait d'ailleurs confirmé cette décision, en précisant que seuls les noms des personnes morales pouvaient être divulgués.

Selon Yves Themens, cette façon de faire a été en vigueur jusqu'au 30 octobre 2009, date à laquelle des modifications à la Loi sur l'accès à l'information sont entrées en vigueur, dans la foulée de modifications législatives consécutives au rapport Coulombe.

Il a alors été décidé qu'« aucun document permettant de connaître l'identité ou le nombre de soumissionnaires potentiels ne peut être divulgué à quiconque, sauf par le responsable de la Loi d'accès à l'information, et ce, après l'ouverture des soumissions ».

Ce fait avait précédemment été souligné par M. St-Jean, l'avocat de la Ville de Montréal, lors du contre-interrogatoire de Lino Zambito.

Après cette date, Yves Themens dit n'avoir transmis « aucune liste » à « aucun entrepreneur ».

En 2007 et 2008, a dit Yves Themens, les renseignements que Lino Zambito disait obtenir auprès de lui étaient en fait disponibles dans un cartable qui était accessible à tous ceux qui daignaient se présenter au comptoir de vente des documents d'appels d'offres de la Ville.

À partir du 7 octobre 2009, a-t-il ajouté, aucun appel d'offres n'a été piloté par sa direction, en raison notamment des élections municipales. En mai 2010, la conception de la liste avait été transférée à la division de l'administration.

Les allégations auxquelles il fait face avaient poussé la Ville de Montréal à le suspendre avec solde le 2 octobre de son poste actuel de chef de section, contrôle des matériaux et expertise. Son salaire lui a finalement été retiré le 5 novembre.

Pas de modification d'appels d'offres

Yves Themens a aussi affirmé sous serment qu'il n'a jamais modifié un document d'appel d'offres, comme l'a allégué un ex-ingénieur responsable des plans et devis dans le domaine des canalisations, Gilles Surprenant.

« Si c'était fait [des modifications aux appels d'offres], c'était fait par un addenda de l'ingénieur responsable de l'appel d'offres », a-t-il dit. « Chaque ingénieur était responsable de son appel d'offres. C'était signé scellé par l'ingénieur responsable de son dossier ».

Gilles Surprenant a déclaré sans détour devant la commission qu'Yves Themens collaborait avec lui pour gonfler les estimations du système informatique Gespro, qui ne correspondaient pas aux budgets que souhaitaient obtenir les collusionnaires dans le cadre de certains contrats.

M. Surprenant a affirmé que dans de tels cas de figure, il écrivait des notes explicatives « en collaboration avec M. Themens, qui était chargé, lui, de transmettre les dossiers vers le comité exécutif de la Ville de Montréal ».

« On mettait des notes explicatives, puis moi j'écrivais un texte, puis ça arrivait que M. Themens corrigeait mon texte ou me disait : "Mets ça, puis ça va bien passer" », a raconté Gilles Surprenant.

« Selon vous, est-ce que M. Themens était au courant que, techniquement, c'était de votre propre chef? C'est-à-dire, c'était pour accoter ce que les entrepreneurs vous demandaient? », lui a demandé le procureur Denis Gallant.

« M. Themens était au courant de toute cette situation-là », a répondu Gilles Surprenant.

L'ex-ingénieur a aussi affirmé qu'Yves Themens avait déjà brandi devant lui « une liasse de billets de 100 $ bien cordés », en disant qu'elle venait de Tony. M. Surprenant dit avoir compris qu'il s'agissait de Tony Conte, de Conex Construction.

Cette histoire n'a pas été abordée par la commission mardi.

Un voyage de golf avec Tony Conte

Yves Themens a par ailleurs admis qu'il avait joué au golf avec l'entrepreneur Tony Conte pendant une semaine en mars 2005, à Cuba. Luc Leclerc et Gilles Surprenant complétaient le quatuor.

M. Themens a dit que M. Leclerc avait passé une première semaine de vacances seule avec son épouse, et que M. Surprenant et lui devaient aller le rejoindre pour jouer au golf pour une deuxième semaine.

Selon l'ingénieur, c'est Luc Leclerc qui l'a appelé pour lui demander s'il avait objection à ce qu'un « autre joueur » se joigne à eux. Il s'agissait finalement de Tony Conte. M. Themens a donné son accord.

« Ça n'a pas été organisé par M. Conte, c'est M. Leclerc qui m'a invité et je n'ai pas eu d'objection », a-t-il expliqué à la commission.

Luc Leclerc, un ex-ingénieur chargé de la surveillance des travaux à la Ville, avait aussi déclaré que M. Themens avait participé à un autre voyage de golf en compagnie d'Éric Giguère du groupe Soter.

M. Themens n'a pas mentionné ce voyage, et la procureure Roy ne lui a pas posé de question à ce sujet.

Luc Leclerc avait aussi dit croire qu'Yves Themens savait que Gilles Surprenant et lui avaient joué au golf avec le parrain de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto, lors d'un voyage organisé par Tony Conte en République dominicaine en 1997.

Cette question n'a pas été abordée non plus mardi.

Le témoignage d'Yves Themens se poursuivra mercredi.

Suivez la commission en direct avec François Messier :

INOLTRE SU HUFFPOST

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.