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Jean Charest préparait sa sortie, même s'il avait été réélu le 4 septembre

Il serait parti, même en cas de victoire
CP

QUÉBEC - Même si le Parti libéral avait été reporté au pouvoir le 4 septembre dernier, Jean Charest voulait quitter la vie politique avant longtemps.

C'est du moins ce qu'ont soutenu à La Presse Canadienne quelques-uns de ses proches collaborateurs, dans le cadre d'une série d'entrevues effectuées au cours des dernières semaines dans le but de connaître les scénarios échafaudés par l'ex-premier ministre en cas de victoire ou de défaite lors du dernier scrutin.

Si certains assurent que M. Charest n'a rien laissé paraître de ses intentions, d'autres sont formels et soutiennent qu'il préparait sa sortie depuis plusieurs mois, sans égard au résultat des élections.

Cela laisse croire que la présente course au leadership du Parti libéral du Québec (PLQ) paraissait incontournable, à plus ou moins court terme.

Dans sa tête, M. Charest «était déjà parti ailleurs» le soir du 4 septembre, confie un conseiller de longue date qui a requis l'anonymat, comme les autres personnes interviewées dans le cadre de ce reportage.

Depuis quelque temps, à 54 ans, heureux d'être bientôt grand-père pour la première fois, M. Charest donnait à son entourage tous les signes d'un homme qui envisageait son avenir loin des lieux du pouvoir.

«Il était prêt à passer à autre chose», renchérit un autre proche adjoint. «Son idée était faite», assure-t-il.

Selon un scénario évoqué, s'il avait été réélu pour un quatrième mandat, minoritaire ou majoritaire, M. Charest aurait dirigé un temps ses troupes, puis, au moment jugé opportun, «il était pour envoyer un signal qu'il était prêt à passer à autre chose, à passer la main», confie un de ses hommes de confiance.

D'autres ont cependant exprimé un avis plus nuancé, en disant que M. Charest était prêt à composer avec les deux scénarios, «gagner ou perdre», sans planifier de scénario précis de retraite en cas de victoire. «Il était prêt à vivre avec les deux conclusions», selon un conseiller et ami.

Quoi qu'il en soit, tout un chacun qualifie son attitude depuis le soir du 4 septembre de «très zen».

L'hiver dernier, son épouse et ses enfants avaient tenté de le dissuader de faire une autre campagne électorale. Mais malgré les sondages défavorables et un taux record d'insatisfaction dans la population, M. Charest a quand même tenté le tout pour le tout l'été dernier, essayant de donner aux libéraux un quatrième mandat d'affilée.

Les pressions familiales n'ont quand même pas été vaines, car l'idée de tourner la page a fait son chemin. Entre-temps, il a été particulièrement touché, dit-on, d'apprendre que sa fille aînée, Amélie, qui habite New York, était enceinte. Il a d'ailleurs prévu effectuer un séjour à New York, en décembre, pour faire connaissance avec sa petite-fille, avant de réorienter sa carrière dans un grand cabinet d'avocats de Montréal dès le mois de janvier.

Cette distance prise au cours de la dernière année par rapport au pouvoir peut expliquer en partie la grande sérénité affichée le soir de la défaite et le lendemain, en annonçant sa démission comme chef du PLQ.

Chose certaine, en cas de défaite, il estimait qu'il n'avait d'autre choix que de tirer sa révérence, selon un de ses proches. Il savait que «le PLQ n'a aucune pitié pour les perdants», selon cette source.

Soirée électorale

Le soir du 4 septembre, M. Charest s'est présenté à l'Hôtel Delta à Sherbrooke pour attendre les résultats électoraux. Bien qu'il savait qu'une défaite était probable, il paraissait très calme, indiquent plusieurs témoins.

Deux suites avaient été mises à sa disposition, une pour sa famille, l'autre pour quelques conseillers, amis, organisateurs et dirigeants du parti.

M. Charest, qui s'attendait à un résultat très serré, a dit à ses conseillers qu'il ne s'accrocherait pas au pouvoir à tout prix s'il était défait de justesse. Pas question d'alliance avec la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault. Pas question, non plus, de contester le résultat, si le Parti québécois l'emportait de justesse, voire par un seul siège.

Il savait aussi que sa défaite était probable dans sa circonscription de Sherbrooke. Il a demandé à ses conseillers de ne jamais critiquer publiquement le choix des électeurs, s'estimant «privilégié» d'avoir eu la confiance de la population de Sherbrooke à maintes reprises dans le passé.

Il a informé sa garde rapprochée que s'il était reporté au pouvoir, mais défait dans son comté, il allait demander à un de ses députés de lui céder son siège. Il a dit qu'il avait déjà choisi lequel, mais n'a pas révélé son nom.

Jusqu'à la fin, il aura espéré se faufiler entre la CAQ, si elle avait mieux performé dans le 450, et le Parti québécois.

Quand les résultats ont été connus, en fin de soirée, M. Charest a paru très serein, nullement amer, dit-on. Quand même, l'émotion était à fleur de peau: il savait que sa carrière politique venait de prendre fin. «Je ne l'ai jamais vu aussi ému», confiera une des personnes présentes.

Parmi ses anciens collaborateurs, les avis sont partagés sur les chances de revoir un jour Jean Charest en politique active. Certains sont persuadés que ce n'est pas dans ses plans, qu'il veut effectuer «une assez longue transition» en pratiquant le droit avant de faire d'autres projets d'avenir. D'autres croient «qu'il ne faut jamais dire jamais», surtout quand on parle d'un homme aussi passionné de politique que lui. «C'est sur la glace», résume un proche de longue date, sourire en coin.

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