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Coït interrompu pour l'OSM et DJ Champion à la Maison symphonique de Montréal

L'OSM et DJ Champion: coït interrompu
Flickr: Lord Strobey

La Maison symphonique de Montréal, plutôt habituée aux têtes blanches et aux colliers de perles, s'est transformée en un lieu hip où tous les jeunes professionnels montréalais voulaient être vus vendredi soir. Après tout, ce n'est pas tous les jours que DJ et maestro partagent planches et platines. C'est pourtant l'expérience audacieuse à laquelle nous avaient convié DJ Champion et Kent Nagano.

L'événement «OSM éclaté» présentait Bondye kon bay, men li pa kon pataje («Dieu sait donner mais ne sait pas partager», en créole), une oeuvre originale de Maxime Morin, alias DJ Champion, et du compositeur Maxime McKinley. Le maestro Nagano leur avait confié le mandat ambitieux de déconstruire des marches classiques (Stravinski, Prokofiev, William Byrd, notamment) pour en faire une pièce originale d'une vingtaine de minutes.

Kent Nagano l'a d'ailleurs dit à l'audience avec humour après l'entrée en scène de DJ Champion sous les acclamations: «Merci d'être venus. Vous êtes extrêmement courageux d'être ici ce soir!»

Juste avant, l'Orchestre symphonique de Montréal avait interprété magistralement Le sacre du printemps d'Igor Stravinsky. On n'en finit plus de s'étonner de l'acoustique de cette Maison symphonique qui a célébré son premier anniversaire le 7 septembre dernier.

Malgré la performance remarquable de l'OSM au cours de cette première partie, c'est bien DJ Champion que cette horde de jeunes trentenaires en vestons et robes de soirée était venue entendre. Le DJ a d'ailleurs été accueilli avec des «wouhou» peu usuels dans une salle de concert.

Concert pour spectateur averti

DJ Champion nous avait pourtant prévenu dans les entrevues pré-concert: son travail se trouvait dans la composition Bondye kon bay, men li pa kon pataje. Il ne souhaitait pas imposer un scratching ou de lourds beats qui auraient écrasé violons et haut-bois. Après tout, il était l'invité de l'OSM.

On a d'ailleurs cherché la trace du DJ pendant les 13 premières minutes. Lui qui nous a habitué aux beats viscéraux et aux envolées enivrantes s'est d'abord fait discret, envoyant uniquement quelques notes stridentes pour rappeler sa présence. Puis le maestro et lui se sont échangé la direction musicale. Kent Nagano signalait au DJ et l'orchestre s'arrêtait pour l'écouter créer des loops. Plusieurs musiciens de l'OSM souriaient alors d'un plaisir sincère, tandis qu'une harpiste hochait de la tête en suivant le tempo. DJ Champion, qui s'est retenu de sauter sur scène comme à son habitude, renvoyait ensuite la direction au maestro et l'orchestre reprenait. Plus tard en entrevue, il expliquera qu'il s'est d'abord laissé diriger par le maestro comme les autres musiciens, pour ensuite imposer son rythme à l'orchestre en seconde partie. À ce moment-là, l'OSM s'est vraiment laissée dicter la marche par les codes de la musique électronique.

Le tout a culminé par une fusion tonitruante entre le DJ et l'OSM qui a duré environ trois minutes. Puis le silence s'est installé dans la Maison symphonique. Quoi? Déjà? La salle a offert une ovation debout aux musiciens, DJ et maestro pour cette proposition audacieuse. Quand Kent Nagano a présenté DJ Champion au public, celui-ci semblait sincèrement ému. Belle image, que ce maestro aux cheveux longs aux côtés d'un DJ Champion bien peigné, habillé d'un costume trois-pièces pour l'occasion.

Le dur désir de durer

À la sortie du concert, le même commentaire revenait constamment: on a aimé, mais on aurait voulu plus. Plus de DJ Champion, plus de beats et un concert plus long. Vingt minutes, c'est court. Surtout que les spectateurs n'ont réellement retrouvé le son de leur DJ chouchou que dans les dernières notes de cette pièce peu commune. Certains auraient même aimé voir des projections visuelles. Des mélomanes avertis auraient sûrement mieux apprécié, mais la plupart des spectateurs ce soir-là n'étaient pas des abonnés de l'OSM.

DJ Champion lui-même aurait aimé faire durer le plaisir. «C'était génial, débile, malade!», a-t-il lancé après le concert. «Vingt minutes, c'était trop court. J'aurais voulu faire une heure.» Il faut quand même souligner que la composition de la pièce en compagnie de Maxime McKinley a nécessité quatre mois de travail.

Quand on lui dit qu'on aurait aimé une plus grande présence du DJ dans le concert, il rappelle qu'il a participé à la composition des morceaux joués par l'orchestre. «Je voulais laisser la place à la musique classique, dit-il. Mais quand vous entendez les enchaînements de l'orchestre, il y a ma touche. J'étais là même quand je ne jouais pas.»

Au final, le spectateur moyen est resté un peu sur sa faim avec ce «Bon dieu sait donner». La prochaine fois, on aimerait voir DJ Champion inviter l'OSM «chez lui», que ce soit dans le cadre d'un festival en plein air ou d'un spectacle en salle. Cette fois, l'électro pourrait s'imposer et l'OSM pourrait vraiment s'éclater.

Attirer un jeune public

L'événement l'OSM éclaté avec DJ Champion s'inscrit dans une volonté de l'orchestre symphonique de rajeunir son auditoire. Dans le passé, Kent Nagano et son équipe ont déjà partagé la scène avec Fred Pellerin, Simple Plan et Marie-Mai. Pari réussi vendredi soir, alors que près de 1 200 jeunes adultes ont assisté au concert.

L'événement était organisé conjointement avec le Club des jeunes ambassadeurs de l'OSM. Ce groupe de 50 jeunes professionnels a réuni près de 640 personnes pour un événement-bénéfice. Pour 150$, les invités ont pu assister à un cocktail avant le concert, puis à une soirée animée par DJ Akufen.

La soirée-bénéfice a permis d'amasser 60 000$. Les dons serviront à initier 20 000 élèves à un premier concert de l'OSM.

Il s'agissait du deuxième événement-bénéfice organisé par le Club des jeunes ambassadeurs. En mars dernier, un événement similaire avait été organisé pour l'inauguration du complexe d'art contemporain L'arsenal.

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