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D'un lock-out à un autre, huit ans plus tard dans la Ligue nationale de hockey

Ce n'était pas censé se produire de nouveau
New York Rangers center Derek Stepan (21) and Washington Capitals center Brooks Laich (21) battle for the puck during the first period of Game 6 of a second-round NHL hockey Stanley Cup playoff series at the Verizon Center, Wednesday, May 9, 2012, in Washington. (AP Photo/Susan Walsh)
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New York Rangers center Derek Stepan (21) and Washington Capitals center Brooks Laich (21) battle for the puck during the first period of Game 6 of a second-round NHL hockey Stanley Cup playoff series at the Verizon Center, Wednesday, May 9, 2012, in Washington. (AP Photo/Susan Walsh)

À la suite du lugubre lock-out qui a englouti toute la saison 2004-05, la LNH avait refait surface sur une énorme vague d'espoir et d'enthousiasme. Le sentiment général, au final, était que tous ces mois de tergiversations n'avaient pas été en vain. Le hockey était de retour et la LNH s'était donné une structure économique faisant en sorte qu'il était là pour rester.

En cette journée de juillet au cours de laquelle le commissaire Gary Bettman avait apposé sa signature au bas de la nouvelle convention collective — celle-là même qui arrive à échéance samedi à minuit — il avait parlé de nouveau «partenariat» entre la ligue et les joueurs, en prédisant qu'ils étaient en position maintenant d'élever le sport à des «sommets spectaculaires».

«Nous pouvons y arriver pour le mieux-être du sport, et plus particulièrement pour nos amateurs», avait déclaré Bettman, qui a vu la ligue remplir ses promesses la plupart du temps pendant les sept dernières saisons.

Et puis voilà. Un autre lock-out. Un autre exemple d'un sport qui ne peut pas se libérer de son cycle de conflits de travail.

Un des aspects les plus frappants de l'imminent arrêt de travail dans la LNH, le quatrième au cours des deux dernières décennies, c'est qu'il a peu en commun avec celui qui l'a directement précédé.

En 2004, l'animosité entre Bettman et Bob Goodenow, directeur exécutif de l'Association des joueurs de la LNH, était palpable. Un fossé philosophique majeur - le plafond salarial - séparait les deux parties, et chacune avait clairement indiqué qu'elle était prête à en découdre.

Les propriétaires s'étaient dotés d'une armure de guerre de 300 millions $US afin de défrayer le coût des factures d'une saison perdue, et les joueurs évoquaient en coulisses la possibilité de tenir le coup pendant deux années complètes dans un effort de conjurer «la certitude des coûts».

Ce fut laid.

«Personne ne souhaite revivre ce qui est arrivé il y a huit ans», disait d'ailleurs Bettman, récemment.

L'AJLNH avait durement encaissé le coup. La belle solidarité des joueurs avait fini par s'effriter et ils avaient finalement plié, en acceptant l'imposition d'un plafond salarial, en plus d'une importante diminution de salaire de 24 pour cent.

Un dénouement qui fait encore hocher la tête d'incrédulité le capitaine des Sénateurs d'Ottawa, Daniel Alfredsson. À titre de vice-président de l'AJLNH, il a été l'un des sept joueurs qui ont contribué à l'aboutissement de l'entente de 2005, qui lui a coûté 14 millions $ en salaire, tout compte fait.

Mais ce n'est pas ce qu'il retient le plus du conflit. Comme la quasi-totalité de ses collègues à l'époque, il ne peut s'empêcher de se demander ce qu'aurait pu être la saison qui n'a jamais eu lieu.

«Avec le recul, dans 20 ans, je suis sûr qu'on va dire que nous aurions dû jouer, a dit Alfredsson. Je n'estime pas que de perdre une année entière en vaut toujours la peine.»

Étonnamment, Alfredsson est disposé à courir de nouveau le risque. L'un des quelque 200 joueurs qui ont subi le dernier lock-out, l'attaquant âgé de 39 ans sait qu'un autre long arrêt de travail pourrait sonner le glas de sa carrière. Mais il était plus déterminé que jamais à lutter pour les droits des joueurs, au sortir de la réunion syndicale de cette semaine à New York.

Alfredsson souligne avoir fait ses débuts dans la LNH, juste après le lock-out de 1994-1995 qui a écourté la saison à 48 matchs, et qu'il en a récolté les dividendes.

«Plusieurs ont renoncé à des sacrifices pour les joueurs venant après (eux)», a-t-il déclaré.

Situation pourrie

En 2004, les parties étaient tellement campées dans leur position qu'il leur a fallu trois mois avant de revenir se parler à la table des négociations, après le début du conflit. Pendant tout ce temps, plus de 300 joueurs avaient pu se dénicher du travail ailleurs, dans les ligues européennes.

D'autres, comme Bobby Holik, sont demeurés à la maison. L'entente de 9,5 millions $ en moyenne annuellement qu'il avait avec les Rangers de New York — un salaire qui ferait de lui le deuxième plus haut salarié de la LNH actuellement — était trop élevée pour l'assurer contre les risques de blessure.

Il s'avère que le vétéran a savouré cette pause fortuite.

«Je me suis changé les idées avec d'autres choses, a mentionné Holik, qui a pris sa retraite en 2009. C'était la première fois en presque deux décennies que je pouvais le faire. C'était vraiment agréable.»

D'autres, comme le gardien Olaf Kolzig des Capitals de Washington, ont moins apprécié d'encaisser des pertes financières.

«J'ai perdu de l'argent dont je ne reverrai jamais la couleur, a commenté Kolzig, dernièrement. J'étais au sommet de ma carrière. Plusieurs joueurs arrivaient en fin de parcours. C'était une situation pourrie que je ne crois pas que personne veut revoir se produire, peu importe le sport.»

La reprise des négociations en décembre 2004 avait été douloureuse pour les joueurs, confrontés à une offre incluant une diminution de salaire de 24 pour cent et d'autres concessions, comme la baisse du salaire maximum pour les joueurs recrues. Ces deux éléments se sont retrouvés dans l'accord final, mais les joueurs n'étaient pas au bout de leur peine.

Bettman a annoncé l'annulation de la saison le 16 février, qualifiant cela de «tragédie» pour les joueurs.

Pareil au même

À ce moment, le commissaire avait dépeint un sombre portrait de la situation financière de la ligue. Il défendait la nécessité d'avoir un plafond salarial sur la base du rapport Levitt, qui concluait que la ligue perdait 250 millions $ par année tandis que les propriétaires disaient défrayer en salaire aux joueurs 75 pour cent des revenus.

On peut comprendre l'enthousiasme de la ligue après avoir conclu une entente dans laquelle les équipes étaient assurées de ne pas dépenser plus que 57 pour cent des revenus totaux.

Mais, sept ans plus tard, nous revoilà à la case départ, ou presque. Malgré des revenus qui ne cessent d'augmenter et qui ont atteint de 3,28 milliards, la saison dernière, la ligue veut de nouveau abaisser la part des joueurs.

Elle veut aussi s'attaquer au problème des faramineux contrats, de durée 3XL, qu'on accorde aux joueurs, en colmatant les brèches de l'actuel contrat de travail.

Les joueurs, eux, ne veulent pas accepter de diminution de salaire ou de réduction de leurs droits. Ils ont proposé à la ligue de figer le plafond salarial à l'aide de montants pré-établis, au cours des trois prochaines années, et de favoriser un plus grand partage de revenus entre les équipes.

Avec le lock-out qui se profile à l'horizon, tant Bettman que le directeur exécutif de l'AJLNH Donald Fehr ont déploré cette semaine leur incapacité à trouver un terrain d'entente. Cependant, une forme de résignation plane sur le processus depuis le début, ce qui contribue à expliquer pourquoi chacune des parties accuse l'autre de ne pas être animée d'un sentiment d'urgence.

Maintenant qu'il est minuit moins une, que va-t-il se passer?

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