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Ann Romney vole le show à la convention républicaine: grosses ficelles et corde sensible

Les grosses ficelles de la corde sensible
AFP

CONVENTION RÉPUBLICAINE - Qui osera dire du mal de Ann Romney? Devant la convention républicaine de Tampa, l'épouse de l'adversaire de Barack Obama a livré mardi 28 août au soir un discours unanimement salué par la presse américaine. Apparaissant drapée d'une robe rouge digne des années 50, maquillage scintillant et brushing impeccable sur fond de photos de famille, cette incarnation parfaite de la housewife moderne, mère de cinq garçons et grand-mère de 18 petits-enfants, s'est pliée sans fausse note à cet exercice incontournable de storytelling, mêlant confidences intimes et messages politiques subliminaux.

"Ce soir, je veux vous parler avec mon coeur. Ce soir, je veux vous parler d'amour, pas de politique ou du parti", a-t-elle débuté tard dans la nuit, un oeil rivé sur son téléprompteur, l'autre sur la foule en délire brandissant des pancartes "We love you Ann". Un show aussi sirupeux que maîtrisé qui pourrait bien doper les chances encore hésitantes de l'ancien gouverneur du Massachusetts de conquérir la Maison Blanche.

Femmes, cancer et conte de fée: "humaniser" Romney à tout prix

A 63 ans, Ann Romney a donc fait une entrée tonitruante dans la campagne présidentielle qui s'emballe, s'imposant comme le principal atout personnel de son mari. Ancien homme d'affaires multi-millionnaire propre sur lui et un rien gaffeur, Mitt Romney, qui talonne voire devance Barack Obama dans les sondages, peine à améliorer son image dans l'électorat centriste et féminin, encore largement acquis au président en exercice.

Les éditorialistes américains s'attendaient donc à voir Ann jouer de la corde sensible pour tenter de rallier ces centaines de milliers de voix qui feront basculer l'élection. Ils ont été servis.

"Mères, célibataires, mariées, veuves, qui tiennent ce pays ensemble. Vous êtes le meilleur de ce pays, vous êtes l'espoir de ce pays", a déclamé la rivale de Michelle Obama, s'offrant un vigoureux "Femmes, je vous aime!", avant de dresser un portrait sensible de son époux, rencontré lors d'un bal dans leur prime jeunesse.

"A chaque tournant de notre vie, cet homme que j'ai rencontré lors d'une soirée dansante au lycée, a aidé à tirer les autres vers le haut. Il l'a fait lors des jeux Olympiques (de Salt Lake City), quand beaucoup voulaient abandonner. C'est l'homme dont l'Amérique a besoin".

Et d'évoquer les difficultés de ce couple "ordinaire": "Un mariage de contes de fées ? Non, pas du tout. Ce que nous avons est un vrai mariage". "Dans les contes que je lis, il n'y a jamais eu de longs après-midis d'hiver pluvieux, avec cinq garçons criant tous à la fois. Et ces contes ne semblent jamais avoir des chapitres appelés sclérose en plaque ou cancer du sein", a-t-elle ajouté, référence à deux maladies qui ont mis sa vie en danger.

Derrière l'émotion, un discours politique ciselé

Zigzaguant de la confidence au tacle politique, Ann Romney n'en a pas moins livré un argumentaire mordant contre l'héritage de l'administration Obama. "Nous sommes trop intelligents pour savoir qu'il n'y a pas de réponse facile, mais nous ne sommes pas assez bêtes pour accepter qu'il n'y a pas de meilleures réponses", a-t-elle déclamé, en justifiant un à un les points faibles de son époux.

"Soyons honnêtes, si ces quatre dernières années avaient été un succès, croyez-vous que l'on assisterait à de telles attaques sur le succès de Mitch?", a-t-elle ironisé, faussement candide, alors que le couple Romney refuse encore et toujours de dévoiler sa feuille d'impôt.

Quittant des yeux son écran pour un bref instant, Ann Romney a expliqué à sa manière la discrétion de son mari sur ses affaires. "Mitt n'aime pas parler de ce qu'il fait pour aider les autres, parce qu'il considère que c'est un privilège, pas un argument politique".

La presse américaine sous le charme, ou presque

Passant outre cette avalanche de bons sentiments, dont on peine à imaginer l'équivalent en France, les médias américains, particulièrement sensibles à l'image de la Première dame, ont finalement consacré la réussite de cette opération "sortez les violons". "Romney et son équipe devraient s'estimer chanceux d'avoir une femme de candidat qui peut regarder les Américains dans les yeux en ayant l'air sincère et chaleureux", s'enthousiasme une éditorialiste du Washington Post.

The New Yorker, qui salue la performance de Ann Romney, émet toutefois une nuance après le portrait "plein d'amour" de cette épouse "émouvante" : "Il y a sans aucun doute beaucoup de choses et de gens que Mitt Romney aime. La question est de savoir quel rapport cela a avec le fait d'être président".

Le New York Times va encore plus loin et se demande si le succès de Ann ne se fait pas au détriment de Mitt. Dans un article intitulé "Ann Romney sort de l'ombre de son mari et lui fait peut-être de l'ombre", la journaliste Alessandra Stanley estime que les qualités de l'épouse révèlent les défauts du mari. "Ann Romney est tellement douée en politique qu'elle pourrait donner l'impression que son mari est mauvais. Il se pourrait qu'elle soit trop bonne".

Mardi soir, l'idée n'a visiblement pas dérangé Mitt Romney qui a rejoint son épouse à la tribune, tout sourire. Un baiser, de longs applaudissements, des photos, un peu de musique, et le couple a quitté la scène main dans la main.

La convention républicaine en photos, par nos collègues du HuffPost américain:

Republican National Convention 2012

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