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Afrique du Sud: Bombardier confirme avoir payé un intermédiaire pour un contrat

Bombardier a payé 30 millions $ à un marchand d'armes
AP

MONTRÉAL - Bombardier (TSX:BBD.B) a confirmé vendredi avoir payé un intermédiaire tunisien à la réputation douteuse pour décrocher un juteux contrat ferroviaire en Afrique du Sud, mais a assuré avoir agi dans le respect des règles d'éthique.

Selon le quotidien de Johannesburg Mail & Guardian, la multinationale montréalaise a versé 35 millions $ US au marchand d'armes Youssef Zarrouk, proche du régime déchu du dictateur tunisien Zine el-Abidine Ben Ali.

La commission a permis à Bombardier d'obtenir avec des partenaires le contrat de construction, d'exploitation et d'entretien du Gautrain, un train rapide qui relie Johannesburg à Pretoria, la capitale administrative de l'Afrique du Sud.

Dans un entretien téléphonique avec le Mail & Guardian depuis la Tunisie, M. Zarrouk a confirmé avoir été payé à titre d'«agent» en lien avec le Gautrain, mais a soutenu qu'il ne s'agissait pas d'un pot-de-vin dans le but d'influencer des politiciens, insistant pour dire que Bombardier «ne veut pas de corruption».

Youssef Zarrouk a dit ne pas se souvenir du montant reçu de la part de Bombardier, mais une source anonyme a indiqué au Mail & Guardian qu'il s'agissait de 35 millions $ US.

Un porte-parole de Bombardier Transport a d'abord affirmé vendredi matin que la somme versée était «nettement inférieure» à 35 millions $ US. En après-midi, toutefois, le vice-président aux affaires publiques du constructeur québécois, John Paul Macdonald, a rectifié le tir et reconnu qu'«un chiffre de cet ordre-là ne serait pas inhabituel pour ce type de services».

«Quand Bombardier commence à être présent dans une région avec laquelle nous ne sommes pas familiers, c'est normal pour nous — et pour d'autres compagnies de la même taille — de retenir les services d'un agent qui a les connaissances locales et qui peut nous aider à bien promouvoir nos produits et à répondre aux appels d'offres», a expliqué M. Macdonald.

Selon lui, M. Zarrouk «était la meilleure personne pour le travail» puisqu'il avait déjà réalisé des mandats semblables pour le compte d'entreprises des secteurs de la défense et de l'énergie.

«Nous avons vraiment fait nos vérifications et nous étions à l'aise et contents d'avoir ce monsieur-là comme agent, a commenté John Paul Macdonald. (...) Il avait tout ce qu'il fallait pour nous aider et (...) c'est en partie grâce à ses efforts que nous avons pu obtenir le contrat.»

L'affaire fait penser au scandale qui a secoué SNC-Lavalin (TSX:SNC) cet hiver. Une enquête interne a démontré que le géant de l'ingénierie a fait des versements irréguliers totalisant 56 millions $ US à des agents commerciaux.

Ces commissions, qui avaient été associées à des projets auxquels elles n'étaient aucunement reliées, avaient été autorisées par le chef de la direction de l'époque, Pierre Duhaime, lequel a été relevé de ses fonctions en avril.

John Paul Macdonald a assuré vendredi que les commissions versées à Youssef Zarrouk ont été correctement comptabilisées dans les livres de Bombardier.

«Il n'y a rien d'irrégulier», a-t-il dit.

Réactions

Jack van der Merwe, chef de la direction de la Gautrain Management Agency, a déclaré au Mail & Guardian ne pas être au courant du paiement consenti à Youssef Zarrouk et a promis de demander des explications.

M. Macdonald a assuré que Bombardier allait offrir toute sa collaboration à Gautrain. Quand on lui a demandé si l'entreprise allait revoir ses façons de faire à la lumière de cette affaire, il s'est contenté de dire que la direction les réévaluait constamment pour s'assurer qu'elles soient conformes aux meilleures pratiques.

Le député d'opposition Jack Bloom, qui siège au parlement de la province du Gauteng, a allégué vendredi que «des gens bien branchés politiquement ont profité» du projet du Gautrain.

«Les contribuables ont payé cher pour le Gautrain et nous devons savoir si des fonds ont été gaspillés par le biais de versements secrets (...) qui laissent croire à de la corruption», a-t-il lancé.

En compagnie notamment du français Bouygues Travaux Publics et du sud-africain Murray & Roberts, Bombardier fait partie du consortium Bombela, qui a obtenu le contrat de construction, d'exploitation et d'entretien du Gautrain, évalué à près de 4 milliards $ US. La part de Bombardier est de quelque 950 millions $ pour le train et de 491 millions $ pour l'exploitation et l'entretien.

Le service, qui desservait d'abord la région de Johannesburg, a débuté en juin 2010, juste avant la tenue de la Coupe du monde de soccer. Depuis août 2011, le train se rend jusqu'à Pretoria.

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