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Projet de loi C-31: Ottawa offre quelques concessions

Changements au projet de loi C-31
CP

OTTAWA - Ottawa cède à la pression et offre quelques concessions à l'opposition sur le controversé projet de loi en immigration qui vise notamment à fermer la porte du Canada aux faux réfugiés.

Malgré cela, les changements proposés par le gouvernement n'ont pas calmé les opposants à C-31, qui estiment que les conservateurs n'en font pas assez.

Le ministre de l'Immigration, Jason Kenney, a pourtant annoncé mercredi qu'il mettra de l'avant des amendements à l'imposant projet de loi C-31 qui regroupe de multiples éléments de sa réforme du système d'immigration canadien.

La période de détention obligatoire de 12 mois sans possibilité de révision pour les réfugiés qui arrivent en groupe — qui avait soulevé les foudres de l'opposition — fera l'objet d'un amendement gouvernemental. M. Kenney suggère une première évaluation de leur détention en deçà de 14 jours, et une autre après six mois.

Cette disposition visait les réfugiés qui arrivent en grand nombre, le plus souvent par bateau, et a été incluse dans la pièce législative pour décourager les passeurs clandestins.

«L'intention n'a jamais été de maintenir les réfugiés en détention. L'intention est d'avoir une plus grande capacité à traiter les immigrants clandestins qui arrivent en grand nombre», a expliqué le ministre.

Il va aussi préciser les termes d'une disposition afin d'éviter que le statut de résident permanent d'un réfugié ne soit révoqué si les conditions s'améliorent dans son pays d'origine. La mesure inquiétait le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui proposait lui-même un amendement à ce sujet.

Car le projet de loi, tel que rédigé, pouvait être utilisé pour enlever le statut aux réfugiés qui allaient en visite dans leur pays natal, prouvant alors que leur vie n'y est plus en danger.

M. Kenney a précisé que là n'avait jamais été son objectif et il a corrigé le tir.

«Je suis d'avis que ces amendements sont la preuve que le gouvernement est ouvert aux suggestions raisonnables permettant d'améliorer le projet de loi C-31», a déclaré mercredi le ministre Kenney en point de presse pour faire part des changements.

Il reconnaît que les amendements proposés font suite aux témoignages de douzaines de personnes en comité parlementaire et aux critiques de l'opposition.

«Nous pouvons maintenant compter sur un projet de loi plus solide grâce auquel nous pourrons continuer à protéger les véritables réfugiés tout en nous assurant que les faux demandeurs d'asile sont mis en détention, traités et rapidement renvoyés dans leur pays d'origine», a-t-il poursuivi.

Mais ces concessions ne vont pas satisfaire l'opposition officielle, dont la propre liste d'amendements est beaucoup plus longue.

Le NPD veut que le gouvernement retourne à la planche à dessin et revienne avec un meilleur projet de loi, sans quoi ses députés voteront contre C-31.

Questionnée peu avant la proposition du ministre à savoir si le retrait de la détention sans revue pendant 12 mois pouvait entraîner le soutien de son parti au projet, la porte-parole du NPD en matière d'immigration, Jinny Sims, a été tranchante.

«Ce n'est pas suffisant pour corriger les failles fondamentales du projet de loi», juge-t-elle.

«L'effet ultime (de C-31) sera de nuire aux demandeurs légitimes du statut de réfugié», a-t-elle insisté.

Sa collègue néo-démocrate Sadia Groghué a qualifié le projet de loi d'«anticonstitutionnel».

Le NPD s'objecte notamment à ce que le ministre dispose du pouvoir discrétionnaire de déterminer une liste de pays dits «sûrs», ce qui restreint l'accès des demandeurs d'asile au statut de réfugié, en plus de leur retirer un droit d'appel si leur demande était refusée. Les pays d'Europe sont généralement considérés comme «sûrs» par Ottawa, mais les Roms continuent de faire l'objet de discrimination et de violences.

Or, M. Kenney ne bougera pas sur cette disposition, ni sur la détention de réfugiés mineurs de 16 et 17 ans.

Michael Bossin, un avocat oeuvrant en droit de l'immigration, est aussi d'avis que C-31 viole la Charte canadienne des droits et libertés.

Il croit qu'il y aura une pluie de contestations de ses dispositions devant les tribunaux. Le gouvernement devrait mieux le modifier dès maintenant, plutôt que d'attendre de se le faire dire par des juges.

Selon le ministre Kenney, les mesures proposées dans C-31 visent à éliminer les demandes de réfugiés frauduleuses, tout en accélérant l'aide aux réels demandeurs d'asile.

Outre la réforme du système d'octroi d'asile, le projet de loi vise à ajouter des mesures pour lutter contre les passeurs clandestins, ainsi que pour obliger les demandeurs de visas temporaires à fournir systématiquement des données biométriques (empreintes digitales et photo).

C-31 est en fait un projet de loi semblable à celui que le gouvernement avait déposé antérieurement sur les réfugiés, mais sans les amendements alors obtenus par l'opposition lorsque les conservateurs étaient minoritaires. Cet autre projet de loi avait fait l'unanimité chez les partis à Ottawa et avait été dûment adopté.

La réforme de l'immigration est actuellement étudiée article par article par un comité des Communes.

Le ministre Kenney veut que C-31 soit adopté rapidement, et avant le 27 juin, afin d'éviter que le projet de loi précédent n'entre en vigueur.

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