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Al-Jazira ferme son bureau anglophone en Chine

Al-Jazira ferme son bureau anglophone en Chine
Reuters

La chaîne Al-Jazeera English se voit forcée de fermer son bureau à Pékin à la suite du refus des autorités chinoises de renouveler l'accréditation de sa journaliste Melissa Chan.

La Chine refuse même d'octroyer des visas aux autres journalistes de la chaîne anglaise d'Al-Jazira, ce pour quoi elle n'a d'autre choix que la fermeture.

Un certain flou règne sur les raisons de l'expulsion de la journaliste. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la Chine, Hong Lei, a répété plusieurs fois, mardi, que Melissa Chen avait enfreint les lois et règlements de la Chine, mais sans spécifier lesquels.

Le Club des correspondants étrangers en Chine (FCCC) se dit scandalisé par cette décision, estimant qu'elle équivaut à une expulsion pure et simple. Le FCCC croit que cela représente une « grave menace pour la capacité de la presse étrangère de travailler en Chine ».

Melissa Chan, une Américaine d'origine chinoise, était reconnue pour ne pas avoir froid aux yeux. Selon notre correspondante à Pékin, Catherine Mercier, il est clair que plusieurs de ses reportages ne plaisaient pas aux autorités chinoises.

« Elle parle couramment le mandarin et elle arrivait à se faufiler dans des endroits où les journalistes blancs de peau, comme moi et comme bien d'autres correspondants de la BBC ou de CNN, n'arrivent pas à avoir accès », constate Catherine Mercier.

Le FCCC rapporte que des responsables chinois avaient exprimé leur mécontentement après la diffusion par la chaîne anglaise d'Al-Jazira d'un documentaire diffusé en novembre 2011, auquel Mme Chan n'avait d'ailleurs pas participé. « Nous pensons que le documentaire qui a provoqué l'ire des autorités chinoises concernait le travail forcé dans les prisons en Chine », précise le FCCC.

Beaucoup estiment aussi que l'un des reportages de Melissa Chan qui portait sur les prisons secrètes, des lieux de détention extrajudiciaires en Chine, a certainement nui à la journaliste, ce sujet étant extrêmement sensible en Chine.

« Nous sommes fortement engagés dans notre couverture de la Chine. De même que les services des médias chinois couvrent l'actualité mondiale librement, nous aimerions la même liberté pour tout journaliste d'Al-Jazira en Chine », a dit Salah Negm, responsable éditorial de la chaîne en anglais d'Al-Jazira.

La chaîne arabe d'Al-Jazira, dont la ligne éditoriale est beaucoup plus pro-Chine, maintient de son côté ses opérations depuis Pékin.

La Chine dit fournir un environnement de travail « libre »

Quant au gouvernement chinois, il affirme offrir un environnement de travail libre aux journalistes étrangers. « Nous encourageons les journalistes étrangers à rendre compte objectivement de la Chine. Nous avons également apporté beaucoup d'aide et facilité le travail des journalistes étrangers », a affirmé Hong Lei, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, assailli de questions lors du point de presse quotidien.

Pour le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York, « le refus de renouveler l'accréditation de Melissa Chan marque une vraie détérioration de l'environnement pour les médias en Chine ».

Quelles conditions pour les journalistes étrangers en Chine?

Cette situation particulière survient peu de temps après l'affaire Chen Guangcheng, qui a plongé la Chine dans un certain embarras. Bien que cette décision ait été prise avant l'affaire Chen, Catherine Mercier affirme qu'il est clair qu'à bien des égards, l'étau se resserre pour les correspondants étrangers en Chine. Elle estime que cela est plus marqué depuis le printemps arabe : « les autorités chinoises ont une peur panique de voir ce vent de révolution souffler sur la Chine », observe-t-elle.

Selon notre correspondante à Pékin, il est fréquent qu'on interdise à des journalistes de tourner des images. « Ça devient parfois un peu lourd, mais cela fait partie du travail : bien sûr, plus les sujets sont sensibles, plus cela devient compliqué », dit-elle.

Catherine Mercier affirme qu'il y a tout de même du progrès. « Des correspondants qui étaient ici il y a 20 ans vous diraient à quel point il était difficile d'obtenir des entrevues, de parler aux gens. Mais la Chine formule aujourd'hui un avertissement très clair : vous êtes invités chez nous, mais si votre travail ne nous plaît pas, nous pouvons essentiellement vous chasser à tout moment », explique notre correspondante à Pékin.

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