Avis à tous ceux qui accusent les féministes de «manquer à l'appel» au sujet des événements de Cologne:
Rien ne m'empêche de dénoncer ces événements. Les actes de violence sexuelle sont condamnables, peu importe qui les commet. Dans ce cas-ci, nous avons peut-être affaire à des actions concertées, planifiées. Une horreur sans nom, que je n'hésite pas à dénoncer. On pourra en discuter plus longuement, si l'occasion se présente.
Simplement, voyez-vous, comme bon nombre de ces «féministes de gauche» que vous désignez avec mépris, il se trouve qu'en dehors des moments où j'essaie modestement de faire valoir la légitimité de mes propos dans l'espace public, j'étudie le droit à temps plein, je fais de la recherche à temps partiel, je complète une série de conférences portant sur mon livre, je prépare un concours de plaidoirie et j'essaie, au possible, de manger, dormir et passer un peu de temps avec les gens que j'aime.
Je ne le dis pas pour me dégager de quelconque responsabilité. Je le dis pour mettre le doigt sur un élément qui m'énerve profondément: les féministes - que vous ignorez le reste du temps - ne sont pas là pour alimenter vos lubies. Vous ne pouvez pas nous convoquer seulement lorsque ça vous fait une belle jambe. Nous ne sommes pas des chiennes dressées, arrêtez de nous traiter comme telles.
Si vous ne m'avez pas lue ou entendue sur le sujet, ce n'est pas parce que je «faillis à ma tâche». Ce n'est pas parce que je m'empêtre dans quelque fétiche gauchiste. C'est simplement parce que, comme tout le monde, il m'arrive de préférer vivre un peu. Je n'ai pas à passer mon temps à «prouver» la constance de mon indignation par rapport à la violence sexuelle. Tenez-vous le pour dit: l'indignation des féministes EST constante et généralisée. Mais vous n'avez pas à exiger que chacune d'elles monte aux barricades à chaque fois qu'il y a, quelque part sur la planète, une nouvelle démonstration de misogynie.
Nous ne «manquons pas à l'appel», nous ne sommes ni plus, ni moins présentes que d'habitude. La différence étant cependant que vous ne nous écoutez que lorsque nous servons votre agenda.
Voilà peut-être qui illustre un phénomène que nous déplorons constamment: il n'est pas facile, figurez-vous, de mettre de l'avant des propos féministes dans le débat public et de voir ces propos repris, valorisés. Je lance la réflexion comme ça, à tout hasard... Allez, bonne journée!
AUSSI SUR LES BLOGUES
- Les évènements de Cologne et le multiculturalisme - Michel Seymour
- Habillées ou nues, les femmes ne sont pas des proies sexuelles - Salimata Sall
VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST