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L'Europe a-t-elle un avenir?

La période de fortes instabilités que traverse l'Europe depuis la crise grecque semble sans fin. Elle réveille inévitablement une question récurrente si ce n'est existentielle, l'Europe a-t-elle encore un avenir?
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La période de fortes instabilités que traverse l'Europe depuis la crise grecque semble sans fin. Elle réveille inévitablement une question récurrente si ce n'est existentielle, l'Europe a-t-elle encore un avenir?

Déjà, lorsque l'Europe débordait de projets à la fin des années 80 et au début des années 90, de nombreux observateurs s'interrogeaient sur son avenir: l'union monétaire serait-elle viable sans fédéralisme budgétaire? Est-ce qu'une union économique et monétaire pourrait exister sans union politique? La chute du mur de Berlin et la fin du système bipolaire signifiaient une Europe enfin retrouvée, mais posaient aussi cette délicate question: quelles sont les frontières de l'Europe, où s'arrête l'Europe? À chaque étape cruciale de la construction européenne, la question du devenir de l'Europe s'est posée.

Ce questionnement récurent est inévitable puisque la construction européenne est un processus gradualiste, itératif, inachevé. Le champ des possibles demeure toujours très ouvert et conséquemment l'incertain fait partie de la dynamique européenne.

L'objet Europe est d'autant plus difficilement définissable qu'il y a un grand nombre de bâtisseurs. On connaît la fameuse réplique de Kissinger: "l'Europe, quel numéro de téléphone?". Que répondre à cette question sinon qu'il y a eu 6, puis 9, 10, 12, 15, 25 et qu'il y aura bientôt 28 numéros de téléphone, tandis qu'au niveau institutionnel le leadership est partagé entre plusieurs présidences, celle du Conseil européen, de la Commission, de l'Eurogroupe, des Affaires étrangères. Cette surabondance d'acteurs pose inévitablement problème, car chacun (ou presque) possède son propre horizon européen. Le futur de l'Europe n'est donc pas consensuel, il est potentiellement conflictuel.

Cette Europe des États est une histoire au long cours, histoire qui pesait lourdement hier, et pèse encore aujourd'hui. En ce cinquantenaire du Traité de l'Élysée, et sans bien sûr minimiser le chemin parcouru depuis l'après-Seconde Guerre mondiale par ces deux pays, ces deux peuples au nom de l'unité européenne, il est frappant de constater que la France et l'Allemagne continuent d'évoluer sur des planètes différentes. En période de calme, les différences sont peu visibles, en période de tempête, elles sont criantes et complexifient la résolution des problèmes: les Français vantent les mérites du volontarisme politique, les Allemands ceux de l'ordolibéralisme. L'absence d'une vision commune rend difficile la projection dans un avenir commun.

Si la surabondance pose problème, le vide en pose aussi. S'il n'y a pas un leader suffisamment charismatique, c'est le cas des différents présidents de la Commission européenne depuis près de 20 ans, l'impression donnée est que l'Union européenne n'existe pas en tant que telle et qu'en conséquence elle est incapable de se donner un objectif collectif clair à atteindre. La stratégie de Lisbonne illustre magnifiquement nos propos, elle illustre le quasi vide en termes d'intégration.

L'absence de leadership de la construction de l'Europe est l'originalité de sa construction, mais aussi sa faiblesse en période de tensions fortes. Cette absence de leadership explique sans doute les nombreuses interrogations concernant l'avenir de l'Europe.

En cette période de crise profonde, nous sommes en effet autorisés à nous interroger sur la capacité de l'Europe à incarner l'avenir. L'Europe est actuellement davantage vécue comme une contrainte destructrice que comme un projet collectif. Destructrice puisque l'institution nationale séculaire qu'est l'État est en voie de quasi-défaut de paiement par l'action d'une troïka qui n'a que peu de légitimité démocratique. Ce grondement grandissant empêche d'envisager un avenir commun. L'Europe n'est plus un rêve rifkinien, c'est un cauchemar cameronien. La montée progressive des partis extrémistes, mais aussi une augmentation des voix eurosceptiques à l'intérieur des partis établis exprime ce rejet croissant de l'Europe et ne peut qu'être source de profondes inquiétudes. En même temps, l'enjeu de l'intégration européenne pèse pour la première fois dans les élections nationales comme nous avons pu le voir en Italie, en Grèce, en Espagne ou encore en Irlande. L'Union européenne n'est plus si éloignée des citoyens -ils s'y intéressent de plus en plus même si cet intérêt renvoie à un rejet de l'Union ou de certaines de ses politiques.

Le billet de Yann Echinard, Sabine Saurugger etFabien Terpan

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Faut-il pour autant suivre l'exemple britannique et penser l'Europe de manière binaire, être ou ne pas être?

La réponse est clairement non. L'Europe est évidemment l'avenir, car, si le monde des États européens était celui du XIXe siècle, il n'est aucunement celui du XXIe siècle. L'Europe de demain est celle des grands ensembles régionaux et des États à dimension continentale, chacun pensant immédiatement à l'émergence des BRICS. Cette nouvelle donne est inscrite dans les relations géopolitiques et géoéconomiques amorcées à la fin de la décennie 70, nouvelle donne qui n'a cessé de s'amplifier depuis. Le projet européen a permis de plonger le continent dans la paix, a permis d'assurer des relations interétatiques pacifiées, a permis d'assurer une croissance économique importante, a permis l'unité du continent après la chute du mur de Berlin. Le prix Nobel de la paix décerné à l'Union européenne n'a fait que reconnaître ces 60 années d'évolutions centripètes.

Le défi actuel est indéniablement de trouver ensemble des solutions communes à la crise bancaire et financière en minimisant les coûts sociaux, produire de nouvelles dynamiques centripètes vertueuses. Mais, quelle que soit la difficulté de la tâche, le grand défi de l'Europe est de poursuivre son unification pour ne pas être engloutie par la tectonique des plaques émergentes. Au risque de choquer, le grand défi européen n'est pas de résoudre la crise actuelle, le grand défi européen est d'être capable de faire face à cette nouvelle donne mondiale et, en lien direct avec cette nouvelle donne, en particulier de faire face aux défis énergétiques.

Ces quelques lignes de force impliquent néanmoins des révolutions intérieures importantes. Il est symptomatique de constater que les affaires européennes sont conduites en France par un ministre délégué rattaché aux Ministères des Affaires étrangères. Il est symptomatique d'entendre des discours de hauts responsables politiques français expliquant que la souveraineté budgétaire n'est pas remise en cause par le TSCG alors que 75 % de l'endettement public est déjà détenu par des non-résidents pouvant du jour au lendemain rendre insoutenable la trajectoire des finances publiques. Comme si les crises grecque, irlandaise, portugaise, chypriote, espagnole etc. étaient des crises de pays lointains n'ayant aucune résonance sur la façon de gérer le bien public et l'action publique. Comme si l'européanisation et l'internationalisation n'avaient pas pénétré le cœur des institutions nationales.

Cette crise est une formidable opportunité pour comprendre la fragilité des États et pour comprendre que le projet européen est la réponse à aux problèmes de l'Europe et non la cause de ses problèmes. À condition, bien sûr, que la classe politique européenne joue la bonne partition, celle de l'action collective et non pas celle de la préservation des souverainetés nationales.

Ci-dessous, la carte interactive des plans d'aide européens:

Afficher Les plans d'aide européens sur une carte plus grande

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