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Kit de détection de l'islamophobie

La montée en puissance de préjugés anti-islam est l'un des plus importants enjeux de notre époque.
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Pourquoi pas un «kit de détection» des biais islamophobes pour se prémunir contre tous ces discours cryptoracistes qui parsèment désormais notre quotidienneté?

Pour bien des gens, l'«islamophobie» n'existe tout simplement pas au Québec. On a bien le droit de critiquer les religions sans être «phobique» pour autant. D'ailleurs, les «phobies» ne sont-elles pas des névroses ou maladies mentales, tandis que la mise en accusation rigoureuse de l'islam se voudrait constructive et indispensable à la défense de la laïcité?

En ce sens, l'éditorialiste Mathieu Bock-Côté affirme que l'islamophobie n'est rien de moins qu'un «concept frauduleux» destiné à verrouiller tout débat public sur l'islam et nous empêcher de «réfléchir».

Est-ce réel?

Ce genre d'offensive - chargée de mauvaise foi - contre le terme même d' «islamophobie» vise plutôt à nier l'un des plus importants enjeux de notre époque: la montée en puissance de préjugés anti-islam, provoquant notamment des discriminations ethniques en fonction de rapports réels ou supposés à la religion musulmane.

The Guardian, par exemple, a rapporté des sondages selon lesquels le sentiment islamophobe ne cesse de croître aux États-Unis. Peu après les attentats du 11 septembre 2001, 24 % des Américains reconnaissaient partager une attitude anti-islamique: le nombre grimpa à 46 % en mars 2006, puis à 55 % en décembre 2015!

Les opinions dénigrant l'islam s'inscrivent dans un contexte sociohistorique particulier qui s'avère un terreau fertile pour les va-t-en-guerre, les tenants d'un «choc des civilisations» et les populistes de droite.

Un Donald Trump a ainsi pu devenir candidat officiel à la présidence malgré ses menaces de faire fermer des mosquées, d'interdire l'entrée des musulmans aux États-Unis et de faire le «profilage» de tous les musulmans américains. Aurait-on toléré un discours similaire ciblant le catholicisme ou le judaïsme?

Entre temps, les préjugés islamophobes ostracisent au quotidien et provoquent des malaises et tensions, tout comme le racisme dit «ordinaire» (par exemple dans son milieu de travail).

Kit de détection rustique

Puisque les biais islamophobes existent bel et bien, comment les repérer dans la vie de tous les jours? À l'instar des remarques racistes, l'hostilité anti-islam peut prendre plusieurs formes, à divers degrés.

Sur une note un brin sarcastique, je mettrais donc en marché ce superbe «kit de détection» de biais islamophobes émaillant notre quotidien. En voici 10 indices détectés:

1- Si votre interlocuteur vous dit que l'islam est «la pire de toutes les religions», quand bien même il aurait pris la peine de lire des passages du Coran...

2- Si l'on critique les musulmans sur la base d'une seule expérience vécue sur la rue ou dans l'«ètobus».

3- Si vous vous en prenez violemment à une femme portant le hijab sous prétexte de l'aider...

4- Si je prétends critiquer toutes les religions, mais ne parle en mal que de l'islam à longueur de semaine...

5- Si j'estime que l'islam est une religion fondamentalement violente alors que j'ignore que plus d'un milliard de musulmans dans le monde vivent en paix et dans le respect d'autrui.

6- Si un chroniqueur vous dit qu'il y a actuellement un «choc des civilisations» - les «islamistes» voulant s'attaquer à notre mode de vie - omettant de mentionner que les premières victimes du terrorisme sont elles-mêmes musulmanes.

7- Si l'on se sent menacé par toute cette immigration «sauvage»...

8- Si un homme de droite vous reproche d'utiliser cette notion absconse qu'est l' «islamophobie», mais n'hésite pas à vous qualifier d'antisémite dès que vous critiquer la colonisation des territoires palestiniens...

9- Si l'on soutient qu'il faut condamner les gestes islamophobes extrêmes, mais que les discours et l'idéologie qui y mènent n'existeraient pas...

10- Bref, si votre interlocuteur se met à s'énerver (dans le ton et les traits du visage) dès qu'il entend les mots «islam», «arabe» ou «musulman» dans une conversation, ce pourrait bien être un autre signe d'islamophobie.

Mais bon, à quoi me servira ce «kit de détection», puisqu'on me répétera à nouveau que l'islamophobie n'existe pas?

Chose certaine, il faudrait un débat ouvert et public sur la question. La meilleure façon de combattre les différentes formes d'oppression et d'intolérance, quelles qu'elles soient, demeurera sans doute l'éducation.

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