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Une social-démocratie à la dérive

Comment le parti de René Lévesque a-t-il pu en venir à manquer de vision à ce point? Sans compter le «moment PKP», qui fut une autre ère d'errance vers la droite.
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Mine de rien, le Parti québécois a participé à la mise en œuvre (ou à la consolidation) de bon nombre des projets publics les plus périlleux des dernières années: Port-Daniel, Anticosti, amphithéâtre de Québec...

Et cela même si le gouvernement Marois n'a été en poste que durant 18 mois.

D'ordinaire, le PQ se trouve moins à droite que le Parti libéral, mais il arrive que ses décisions se révèlent tout aussi déconnectées du bien commun. Le champ gauche lui était pourtant ouvert depuis sa fondation en 1968.

N'était-ce pas son rôle de jouer les garde-fous vis-à-vis un Parti libéral qui menace toujours plus la survie du «modèle québécois»? À l'arrivée de Lucien Bouchard aux commandes du parti, il y a 20 ans, la priorité devint plutôt le dégraissage de la fonction publique comme instrument de l'atteinte du «déficit zéro».

Financement sectoriel

On a voulu ratisser large en créant une coalition arc-en-ciel gauche-droite - qui s'éloignait peu à peu des mouvements ouvriers - tout en adoptant des stratégies électoralistes similaires à celles du Parti libéral, afin de lui ravir le plus de sièges possibles.

À l'occasion de la Commission Charbonneau, des faits probants ont été avancés indiquant que les principaux partis ont tous deux reçu des millions$ en dons illégaux, entre 1998 et 2010.

En ce sens, une association d'ingénieurs a estimé à 13,5 millions$ le montant total versé frauduleusement aux partis politiques provinciaux par les dix plus grandes firmes d'ingénierie du Québec. 60% seraient allés au Parti libéral, 36% au PQ et 4% à l'ADQ (La Presse, 2013).

En moyenne, le Parti libéral s'avérait donc pire que le PQ, mais ce dernier parti a tout de même bénéficié grandement des largesses des entreprises privées, malgré son passage dans l'opposition. En voici deux exemples:

SNC-Lavalin a admis avoir donné 477 000$ au PQ, puis 570 000$ au PLQ via son système illégal de prête-noms (La Presse, 2016). Toujours entre 1998 et 2010, la firme Dessau aurait remis 400 000$ au Parti québécois, contre 600 000$ au Parti libéral (La Presse, 2015).

Et là encore, nous ne parlons que des grandes firmes d'ingénierie: on pourrait y ajouter le financement sectoriel provenant des cabinets d'avocats, des firmes comptables, d'autres entrepreneurs et fournisseurs, et ainsi de suite. On prête alors flanc à l'influence indue des intérêts privés au détriment du bien commun.

Dilapidation de fonds publics et dérives environnementales

Quand il s'agit de subventionner ou d'appuyer d'importants contrats publics, la formation de Pauline Marois s'est impliquée dans plusieurs dossiers controversés:

(1) Amphithéâtre de Québec: En février 2011, Jean Charest et Régis Labeaume s'entendent sur un plan financier pour construire le futur Centre Vidéotron à l'aide de 400 millions$ en deniers publics. Deux partenaires contesteront la légalité du contrat.

Au lieu de monter aux barricades pour dénoncer ce projet risqué favorisant essentiellement Québecor, l'entourage de Mme Marois - qui était dans l'opposition - a plutôt mis l'épaule à la roue en déposant la Loi 204, parrainée par Agnès Maltais.

Pour regagner le cœur des électeurs de Québec et de Pierre Karl Péladeau, on a ainsi fait adopter cette loi litigieuse qui interdit la remise en cause du contrat sur l'amphithéâtre. Indignés, quatre députés péquistes quittèrent le navire: Pierre Curzi, Lisette Lapointe, Louise Beaudoin et Jean-Martin Aussant.

«Comment le parti de René Lévesque a-t-il pu en venir à manquer de vision à ce point? Sans compter le «moment PKP», qui fut une autre ère d'errance vers la droite.»

(2) Port-Daniel: En janvier 2014, Mme Marois, accompagnée de l'homme d'affaires Laurent Beaudoin (Bombardier), proclame la mise en chantier d'une cimenterie, en Gaspésie, au coût total de 1 milliard$.

Cette initiative péquiste, dont on dit qu'elle représente «le projet industriel le plus polluant de l'histoire du Québec», fait face à d'importants dépassements de coûts. On parle aujourd'hui d'un projet de 1,55 milliard$ (la part publique s'élève à plus de 450 millions$), pour générer environ 250 emplois directs...

(3) Anticosti: En février 2014, le gouvernement Marois annonce un investissement de 115 millions$ de fonds publics sur l'île d'Anticosti. Déjà à cette époque, l'ingénieur-géologue Marc Durand multipliait les mises en garde quant à la non-rentabilité évidente du projet pétrolier, en plus des dommages environnementaux à prévoir.

Bref, comment le parti de René Lévesque a-t-il pu en venir à manquer de vision à ce point? Sans compter le «moment PKP», qui fut une autre ère d'errance vers la droite.

La course actuelle à la chefferie promet une opportunité de changement. Un système d'alternance bipartiste peut-il offrir autre chose que le pire et le moins pire?

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