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Chaque femme musulmane a son rapport propre avec le voile

Certaines ne le considèrent pas comme obligatoire, certaines aiment le porter de manière moderne, d'autres sont plus traditionnelles, d'autres encore ont besoin de plus, comme moi.
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Au fil des ans et de mon apprentissage (qui ne se terminera jamais, car l'islam est si riche et complexe qu'une vie n'est pas assez pour tout savoir et comprendre), ma manière de me couvrir a évolué.
Montes-Bradley via Getty Images
Au fil des ans et de mon apprentissage (qui ne se terminera jamais, car l'islam est si riche et complexe qu'une vie n'est pas assez pour tout savoir et comprendre), ma manière de me couvrir a évolué.

S'il y a bien une chose de certaine, c'est qu'il est difficile de plaire à tous. Entre ceux qui voudraient que je me taise et ceux qui sont curieux d'en apprendre plus, ceux qui s'intéressent à mon cheminement et ceux qui se questionnent plus sur mes idées, parfois je ne sais plus quelle direction prendre pour rendre cet exercice le plus efficace possible. Ma démarche est peut-être maladroite, traitez-moi de folle ou de naïve, j'ai tout de même envie de continuer. Avant de poursuivre, j'aimerais vous remercier, vous qui participez en commentant et en me partageant vos opinions dans le respect même si vous n'êtes pas d'accord avec ce que je défends dans mes textes. Je suis heureuse de voir le dialogue se rehausser au lieu de s'enfoncer dans les insultes (même si bien entendu, on trouve de ces dernières à la pelletée, il faut souligner que même quand on m'envoie promener, on le fait plus poliment qu'avant, ce qui est une avancée selon moi), car on a tout à fait le droit d'être en désaccord, tant que cela se passe dans le respect. J'aimerais aussi dire qu'il est normal de trouver des similitudes entre mes textes, j'avance dans mon sujet, mais je veux aller plus loin que seulement de parler de qui je suis et de mon voile. Nous avons beaucoup d'idées à échanger.

La semaine dernière, je vous parlais de ma grand-mère. Certains ont commenté que je manquais de respect à sa mémoire avec mes choix, elle qui s'est émancipée d'une vie qu'elle ne voulait pas. Voyez-vous, ma grand-mère, je l'adore. Et je lui ressemble, côté curiosité, sociabilité, ouverture à l'autre. Quand j'ai décidé de faire comme beaucoup de musulmans convertis et de changer mon prénom, je voulais quelque chose de significatif. Du genre qui dit je change mon mode de vie, mais je reste la même personne et je n'oublie pas d'où je viens. Alors j'ai tout simplement pris le prénom de ma grand-mère, traduit en arabe. Donc peu importe ce que certains ont dit à ce sujet, je suis fière de mes racines et je n'ai aucunement le sentiment de leur manquer de respect.

Le voile a toujours été naturel pour moi, probablement à cause de ces années passées au couvent.

Le voile a toujours été naturel pour moi, probablement à cause de ces années passées au couvent. Il invoque pour moi, entre autres, la modestie. Aller au-delà des apparences pour se concentrer sur l'essence de la personne. Ainsi, ce que je retiens le plus de sœur Fernanda ce n'est pas tant son apparence que sa personnalité forte. Selon moi, l'un n'empêche pas l'autre. Pour certains, le voile (peu importe comment il est porté) représente l'oppression de la femme, le rejet de l'identité féminine, fait de la femme une personne soumise, sans droit. Pour moi, il me permet de me mêler à la société tout en demeurant fidèle à ma foi, en accord avec moi-même. Je voyais ces femmes, drapées de dignité (ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, les femmes qui ne sont pas voilées ne sont pas pour autant indignes, juste c'est ce que le voile m'inspire) et de piété et oui je voulais leur ressembler et oui je sentais qu'il manquait quelque chose à ma pratique religieuse et j'avais le sentiment qu'en me voilant, je me sentirais plus entière.

Déjà, prendre la décision de se voiler c'est une chose, l'appliquer en est une autre. Au début, n'ayant pas de vêtements couvrants, j'ai appliqué la méthode de superposition des vêtements et je portais un petit chignon en tissu. Quelque chose de simple et de moderne. Croyez-le ou non, dès cet instant, mes relations avec mes voisins ont changé du tout au tout. Alors qu'avant c'était « bonjour, ça va? », c'est vite devenu « sale pute à arabes » accompagné de crachats. Cela en aurait peut-être arrêté certaines, mais pas moi. Peut-être parce qu'on m'a insultée et intimidée toute ma vie. Ça ne fait jamais du bien, mais on finit par se construire une armure, surtout quand on comprend que l'autre nous juge sans même nous connaître, alors pourquoi le prendre personnellement? Les gens se sont fait une image d'une chose (dans ce cas-ci l'islam et le voile peu importe sa forme) et appliquent cette vision à tout, sans chercher au-delà. Ce n'est pas grave, ils n'ont pas à comprendre, juste à me respecter en tant qu'être humain comme moi je les respecte aussi, même quand je ne partage pas les mêmes idées.

Chaque femme musulmane a son rapport propre avec le voile.

Au fil des ans et de mon apprentissage (qui ne se terminera jamais, car l'islam est si riche et complexe qu'une vie n'est pas assez pour tout savoir et comprendre), ma manière de me couvrir a évolué. Mes vêtements se sont rallongés, épaissis. Du chignon en tissu je suis passée au hijab. J'étais heureuse de le porter, pourtant je ne me sentais pas complète. Du moment que j'ai appris, dans mes lectures, que non seulement les épouses du prophète, mais aussi les femmes des premiers croyants se couvraient le visage, j'ai senti que le niqab était pour moi. Je ne dis pas pour chaque femme, juste pour celles qui le désirent. Chaque femme musulmane a son rapport propre avec le voile. Certaines ne le considèrent pas comme obligatoire, certaines aiment le porter de manière moderne, d'autres sont plus traditionnelles, d'autres encore ont besoin de plus, comme moi. Et toutes les femmes ne se voilent pas au même moment de leur vie. J'avais 28 ans quand j'ai pris le niqab, mais je connais une jeune femme qui l'a pris à 19 ans. J'ai aussi connu une dame qui a pris le hijab à 60 ans, quand elle a pris sa retraite. Oui, dans quelques endroits de ce monde il y a des femmes qui sont brimées et forcées de se voiler et c'est malheureux (dans mon dernier texte justement j'explique que des femmes brimées, il y en a dans toutes les cultures), mais il existe encore plus de femmes dans ce monde qui ont pris librement le choix de le porter. Et J'en fais partie.

Donc voilà pour le pourquoi de mon niqab, à la semaine prochaine.

Paix.

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