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9 choses que j'ai apprises en travaillant depuis une île paradisiaque

Ce que je n'avais pas prévu, c'était que pendant ces 16 mois passés à voyager, je me retrouverais finalement à travailler régulièrement... et que j'aimerais ça.
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J'ai la chance d'avoir un métier que je peux exercer partout, à condition d'avoir Internet. C'est sans doute pour cela que la décision de démissionner de mon confortable poste salarié, d'entasser l'intégralité de mes possessions terrestres dans un grenier et de partir faire un tour du monde, mon copain sous le bras, n'aura pas été si difficile à prendre. Ce que je n'avais toutefois pas prévu, c'était que pendant ces 16 mois passés à voyager, je me retrouverais finalement à travailler régulièrement... et que j'aimerais ça.

Petit récapitulatif de ce que j'ai appris en bossant les doigts de pieds en éventail dans le sable:

  1. Aux yeux des autres, je suis une grosse paresseuse... et ce n'est pas totalement faux. Mais au moins, je suis une paresseuse qui a trouvé le bon filon. Il y a pire, je m'en remettrai.
  2. Il n'y pas que le travail dans la vie. C'est vrai. Mais le travail, c'est aussi ce qui te permet d'apprécier les moments d'oisiveté et de garder contact avec la vraie vie (juste au cas où les déclarations d'impôts, demandes de cotisation retraite et autres factures d'assurances-maladie ne suffiraient pas comme rappel).
  3. Quand tu as le malheur de séjourner dans un pays où il fait (presque) toujours beau, tu perds automatiquement le droit de te plaindre. Sachant que je suis française, de gauche de surcroît, vous imaginez bien mon désarroi... Mais j'ai dû me rendre à la triste évidence : personne ne s'apitoiera jamais sur ton sort si tu habites sur une île au soleil (c'est ce que j'appelle l'"effet palmier"). T'es fatiguée? Oui bon ben tu peux toujours aller faire une sieste à la plage. T'as pas le moral? De quoi tu te plains, tu vis sous les cocotiers. Tu t'es fait mordre par un baliste enragé en allant plonger? Ouais mais bon, au moins, toi, t'as la mer pas loin. Im-pa-rable, je vous dis.
  4. Je suis une privilégiée : pouvoir voyager tout en gagnant sa vie, c'est génial, je ne vais pas le nier. Mais je ne vais pas passer ma vie à m'excuser non plus... On oublie souvent le revers de la médaille : les destinations paradisiaques le sont généralement uniquement sur la carte postale - entre les coupures d'électricité, la mousson, les moustiques, l'absence d'eau chaude, de bacon, de gruyère et de cinéma, je me suis plus d'une fois retrouvée à envier mes copains restés à la maison, ces salauds.
  5. Je suis, certes, indépendante professionnellement parlant, mais aussi plus dépendante que jamais du dieu Internet. J'ai toujours un œil sur mon iPhone, que je glisse chaque soir religieusement sous mon oreiller, juste au cas où on m'enverrait du travail. Et quand, soudain, je rencontre un problème de connexion, c'est le drame. C'est comme ça que je me suis retrouvée plus d'une fois à devoir me taper 45 minutes de bateau, mon ordinateur serré sur mon giron pour le protéger des vagues et mon œil hagard fixé sur ma montre, espérant arriver à la civilisation juste à temps pour tenir le délai fixé.
  6. J'ai définitivement abandonné l'idée d'être prise au sérieux par mes clients. Au cours de ce voyage, j'ai accumulé le pire best-of des excuses pourries (mais vraies) justifiant un retard par rapport au délai convenu : "un singe a grignoté le cordon de mon disque dur" (la version exotique du chien qui a mangé les devoirs de math), "j'ai (encore) la dengue et ai trop de perfusions dans les mains pour pouvoir taper sur mon clavier", "on doit passer deux jours barricadés dans la cave, le temps que le typhon passe" et le bon vieux classique indémodable "Internet déconne", une phrase qui résume à elle seule le mois terrible passé à Bornéo. Pas toujours facile de communiquer une image de pro, donc. Ma parade? Ajouter en bas de mes courriels : "Cordiales salutations de Charleville-Mézières".
  7. Travailler à son rythme, c'est génial. Alors c'est vrai que question productivité, c'est pas forcément ça, mais quel plaisir de pouvoir enfin profiter du moment de la journée où l'on est le plus alerte pour travailler (pour moi, entre 17h et 2h du matin, des horaires qui font tirer la gueule à la plupart des employeurs). Seul effet pervers : ta capacité d'attention se réduit rapidement à celle d'un poisson rouge sous bêta-bloquants - si je n'ai pas 57 onglets ouverts en même temps, c'est bien simple, je m'ennuie. Le risque sous-jacent : être perdue à jamais pour la vie en entreprise. "Comment ça, je ne peux pas travailler en culotte?"
  8. L'isolement, ça rend parfois un peu triste (ou un peu fou, par exemple quand on se surprend à parler avec son ordinateur) : plus de pauses café entre collègues, de séances potins sur cette grosse pétasse de Maryline de la compatbilité et personne à qui demander comment ça marche déjà, la conjugaison des verbes pronominaux réfléchis (ou à qui raconter son week-end, bien sûr)...
  9. J'ai dû apprendre à vivre avec une mauvaise conscience permanente : quand tu rencontres des routards (les vrais, ceux qui ont une guitare, les pieds sales et ne mangent que des pâtes pour pouvoir s'acheter de la bière le soir), quand tu parles à tes parents ("Pas de pression, mais tu comptes rentrer quand?") ou à tes amis qui sont restés au pays ("Bon ben super, vous allez rater notre mariage / le baptême du p'tit / l'exorcisme de la voisine") mais aussi quand tu travailles ("Allez, lâche ton portable, t'es en vacances!"). Le bon côté de la mauvaise conscience, cependant, c'est que ça te pousse à faire du bon boulot et à donner régulièrement des nouvelles, pour qu'on t'aime à nouveau...

Ce que j'espère retirer de cette expérience une fois que j'aurai réintégré le droit chemin, celui des tailleurs-pantalons et des réveils qui sonnent à 6h30? Sans doute une meilleure résistance au stress (et accessoirement, au bruit, aux interruptions et au pire mobilier de bureau existant), davantage de tolérance face aux caprices de la technologie ("Donc vous me dites qu'Internet marchera à nouveau dans 2 heures? Ou demain? Ou en 2017 au plus tard? Bien bien..."), une capacité accrue à apprécier les petits conforts de la vie en Europe (douche chaude, j'écris ton nom...) et puis, qui sait, peut-être l'envie de repartir un jour?

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"On pense bien à vous", le tumblr de ceux qui ne partent pas en vacances

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