Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Repositionner le Canada au sein des Amériques

L'Amérique latine est la région la plus inégalitaire du monde. Il est temps que le Canada s'attaque aux problèmes à l'origine de cette situation.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Ce billet du blogue Un seul monde a été écrit par Jim Hodgson et Tara Ward, coprésidents du Groupe d'orientation politique pour les Amériques, un groupe de travail du Conseil canadien pour la coopération internationale (CCCI) axé sur les questions de développement et de justice sociale dans les Amériques. Une version antérieure de ce texte est parue dans Le Devoir le 28 avril 2015.

Le septième Sommet des Amériques, qui a eu lieu au Panama les 10 et 11 avril derniers, a rassemblé pour la première fois les 35 pays de l'hémisphère. Néanmoins, l'ordre du jour a été une fois de plus éclipsé par les enjeux politiques et économiques opposant le Canada et les États-Unis aux autres pays: l'approche du développement économique et les tensions diplomatiques avec le Venezuela. Ces divisions et le désenchantement à l'égard des conceptions dominantes de l'intégration économique mondiale ont entraîné la création de groupes sous régionaux qui excluent le Canada et les États-Unis, comme l'Union des nations sud-américaines (UNASUR), l'Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA) et la Communauté d'États latino-américains et caribéens (CELAC).

Le Groupe d'orientation politique pour les Amériques représente des organisations de la société civile (OSC) canadienne qui relèvent du Conseil canadien pour la coopération internationale (CCCI), comptent collectivement sur des années d'expérience en Amérique latine et sur des liens à l'échelle des Amériques avec des milliers d'organisations de femmes, de travailleurs, de droits humains, paysannes, religieuses et autochtones. Nos recommandations reflètent ce que nous et nos partenaires des quatre coins des Amériques demandons au Canada.

En 2007, le Canada a fait de l'Amérique latine une priorité en matière de politique étrangère; jusqu'à maintenant, ses initiatives ont toutefois été étroitement axées sur la poursuite d'accords de libre-échange au détriment d'un engagement plus profond sur des questions cruciales comme l'emploi décent, le développement économique durable, la sécurité publique, la responsabilisation des entreprises, la gouvernance démocratique et les droits humains. Les OSC soutiennent depuis longtemps que le Canada pourrait rétablir sa pertinence au sein des Amériques en annonçant un engagement plus vaste envers l'hémisphère et en respectant ses diverses formes de gouvernance, sans égard aux orientations idéologiques des pays.

Pour repositionner le Canada au sein des Amériques, nous croyons qu'il est impératif que les accords commerciaux se fondent sur le respect des normes internationales en matière de droits de la personne, et que la responsabilisation des entreprises figure parmi les principales priorités. Nous soutenons également que la militarisation des régimes corrompus ne doit pas être considérée comme la solution aux problèmes de trafic de drogue et de criminalité. Il faut tenter de remédier aux problèmes de la migration en Amérique centrale en ciblant les inégalités, la pauvreté ainsi que la corruption des gouvernements et des forces de sécurité, soit les causes profondes de la croissance du crime organisé, de la migration clandestine et dangereuse, et de la violence aveugle. De plus, la criminalisation des défenseurs des droits humains doit être vue comme une menace à la gouvernance démocratique et par conséquent, vivement condamnée.

L'Amérique latine étant la région la plus inégalitaire du monde avec ses 167 millions de personnes vivant dans la pauvreté et ses 200 millions de personnes considérées comme vulnérables économiquement, il est temps que le Canada s'attaque aux problèmes à l'origine de cette situation. La mise en place de politiques publiques et de réformes fiscales visant à atténuer les inégalités extrêmes doit être activement encouragée en Amérique latine.

Si nous saluons l'investissement annoncé de 98 millions de dollars que consentira le gouvernement canadien pour diverses initiatives dans la région, nous espérons que l'utilisation de ces fonds concourra à l'obtention des résultats que nous souhaitons.

Par ailleurs, la promotion du dialogue entre le gouvernement vénézuélien et l'opposition doit être reconnue comme une solution plus efficace aux tensions que le soutien unilatéral à l'opposition et aux sanctions économiques imposées par les États-Unis. Le Canada doit aussi continuer d'appuyer le rapprochement entre Cuba et les États-Unis, reconnaissant ainsi que la meilleure façon d'améliorer les conditions de vie à Cuba est de mettre fin à l'embargo économique et de favoriser la normalisation des relations diplomatiques.

Enfin, nous exhortons le Canada à demander l'avis des citoyens, ainsi qu'à y accorder plus de poids et de considération dans le cadre des processus d'élaboration de politiques concernant la région. Le gouvernement canadien et l'Organisation des États américains ont bien mené des consultations auprès de la société civile en prévision du Sommet des Amériques, mais elles étaient limitées et n'ont généralement pas donné lieu à des résultats concrets. Dans leur format actuel, les consultations et les événements parallèles de la société civile ne peuvent pas influencer directement les délibérations des chefs d'État, et encore moins les accords finaux. En effet, la majeure partie des négociations ainsi que la rédaction des déclarations communes étaient déjà chose du passé au moment où ces consultations ont été menées. Quoi qu'il en soit, aucune déclaration commune finale n'a été réalisée au sommet de Panama.

La société civile est un important acteur sur la scène mondiale qui ne doit pas être ignoré par les gouvernements et les institutions multilatérales. La prise en compte des voix des personnes qui tissent des liens sur le terrain avec les peuples d'Amérique latine constituerait un important pas en avant pour repositionner le Canada au sein des Amériques et contrer l'isolement croissant dans lequel le Canada et les États-Unis sont placés par rapport au reste de l'hémisphère.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Sierra Leone

Les 20 pays les plus pauvres selon le FMI

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.