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Défendre les droits LGBTI en Haïti: Charlot Jeudy

Se battre pour les droits des personnes LGBTI ne vient pas sans son lot de défis et déceptions.
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Mikaël Theimer

Cette histoire fait partie de la série Nous sommes le changement en droits humains, à l'occasion du 50e anniversaire d'Equitas. Le blogue Un seul monde, collaboration entre l'AQOCI et le CIRDIS, relaiera quelques unes de ces capsules pour souligner et visibiliser les différentes implications des défenderesses et des défendeurs de droits humains à travers le monde.

Ce billet, rédigé par Alex Chartrand, rédacteur stagiaire chez Equitas, présente Charlot Jeudy, président de Kouraj, coach du programme Promotion de la citoyenneté engagée et participant au Programme international de formation aux droits humains (PIFDH) d'Equitas en 2012.

Être lesbienne, gai, bisexuel ou encore transgenre ou intersex en Haïti est loin d'être facile. La violence, qu'elle soit physique ou psychologique, fait partie du quotidien, et cela, Charlot Jeudy en est bien conscient. Mais il ne recule pas devant cette violence. En tant que président de l'association Kouraj, Charlot Jeudy sensibilise la population haïtienne aux droits des personnes LGBTI (lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenre, et intersexuées), malgré les défis, malgré les menaces et malgré les moments de découragement.

L'association Kouraj a pour difficile mandat de lutter contre l'homophobie, la violence et l'exclusion et de faire reconnaître les droits des personnes LGBTI en Haïti, ou de la communauté «M» en créole (Masisi, Madivin, Makomè, Miks, Monkompè). Un mandat difficile alors que l'association a subi des attaques à trois reprises depuis cinq ans. Kouraj porte bien son nom !

Kouraj est d'autant plus importante puisqu'elle est l'organisation défendant les droits des personnes LGBTQI jouissant de la plus grande visibilité en Haïti. L'association offre gratuitement un accompagnement juridique et crée des espaces de dialogue avec plusieurs institutions publiques et privées, tout en mettant sur pied des projets d'éducation pour changer les mentalités et combattre les préjugés répandus au sein de la société haïtienne.

De « provocateur » à « facilitateur »

Chaque action que posent aujourd'hui Charlot et son organisation reflète non seulement les besoins et préoccupations des communautés LGBTI, mais également une fine compréhension des rapports entre différents groupes sociaux. Rien ne se fait sans consultations.

L'importance de cette collaboration entre les différents acteurs du milieu, Charlot Jeudy l'a comprise en participant pour la première fois en 2013 au Programme international de formation aux droits humains (PIFDH) d'Equitas à Montréal, au Canada. Pour reprendre ses termes, il est passé de « provocateur » à « facilitateur » entre les groupes LGBTI et la société haïtienne. Il a réalisé à quel point la participation et l'inclusion sont deux conditions essentielles au succès de ses interventions, malgré les divergences d'opinions :

« J'ai dû revoir mon approche personnelle par rapport à la question LGBT après avoir rencontré Equitas. Ça m'a aidé à comprendre que j'ai une manière de voir la question, qui n'est pas nécessairement partagée par tout le monde. Il faut en discuter avec d'autres pour se mettre d'accord... même sur nos désaccords ! ».

C'est aussi à partir de ce moment-là qu'il a commencé à parler des droits LGBTI comme faisant partie de l'ensemble des droits humains, ce qui lui a ouvert des portes pour collaborer avec des organisations de la société civile haïtienne travaillant sur des questions de droits humains plus larges. Comme il le dit : « Les droits humains, ce n'est pas un buffet où l'on vient, on choisit ce qu'on aime et on laisse ce qu'on n'aime pas. C'est un tout, c'est un ensemble ».

Kouraj, en tant qu'association, a aussi dû faire preuve d'introspection. La formation offerte par Equitas a amené les membres à réaliser le manque de représentation des femmes lesbiennes et des personnes transgenres au sein de l'association. Kouraj s'assure aujourd'hui de les inclure dans toutes décisions et la communauté LGBTI en ressort au final plus forte et unie.

Un impact, malgré les tabous

Les résultats des actions posées par Charlot parlent d'eux-mêmes. Aujourd'hui, les membres de la communauté LGBTI se rassemblent davantage. Ils sont plus confiants, ils ont un réel désir de s'engager et de se rencontrer. Les médias haïtiens en parlent également de plus en plus, malgré le tabou entourant ces enjeux. Plus d'une dizaine de reportages ont été réalisés en cinq ans, que ce soit à la télévision ou à la radio. Kouraj est naturellement devenue la référence pour les médias haïtiens sur les droits des personnes LGBTI. L'association cherche d'ailleurs à fonder une radio qui lui serait propre afin d'accroître sa capacité à transmettre des messages positifs sur la communauté LGBTI.

Mais se battre pour les droits des personnes LGBTI ne vient pas sans son lot de défis et déceptions. Entre la timidité d'engagement d'une partie de la société civile haïtienne et une approche imposée par certaines organisations internationales qui n'est pas adaptée aux réalités des communautés LGBTI en Haïti, les embûches à surmonter sont nombreuses. À cela s'ajoutent également la faiblesse du système de justice, les discours haineux et la récupération politique; autant de facteurs qui viennent miner la protection des droits des personnes LGBTI.

Face à de telles épreuves, il peut parfois être tentant d'abandonner, mais Charlot poursuit son combat. Sa détermination et son « kouraj » lui permettront de jouer un rôle déterminant pour consolider le mouvement de lutte contre l'homophobie et pour le respect des droits des personnes LGBTI en Haïti !

N'hésitez pas à contacter Ève Claudel Valade, coordonnatrice du blogue Un seul monde, pour en savoir davantage sur le blogue ou connaître le processus de soumission d'articles. Les articles publiés ne reflètent pas nécessairement les points de vue de l'AQOCI, du CIRDIS ainsi que de leurs membres et partenaires respectifs.

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