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Pourquoi l'eau devient une arme

Sans eau il n'y a plus de vie, plus de résistance. Et c'est comme ça que l'eau est devenue arme de destruction massive.
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L'eau a cette particularité qu'elle est vitale à l'Homme. On vit plusieurs semaines sans manger, on ne survit que quelques jours sans boire... Et comme la vie est ainsi faite qu'il y a un coté sombre à toute chose, l'eau, ou plus exactement l'absence d'eau, a souvent été utilisée comme arme.

Les conflits autour de l'eau dans l'actualité récente

L'actualité récente nous le rappelle sur deux fronts que tout oppose: le front irakien et le front californien.

Il y a quelques jours en effet, l'État islamique à pris Ramadi et coupé les vannes d'un barrage sur l'Euphrate. Une ambition stratégique de déplacements de troupes (en asséchant le lit du fleuve pour mieux le traverser), mais surtout une volonté stratégique de couper l'eau aux populations chiites vivant en aval du barrage. Sans eau il n'y a plus de vie, plus de résistance. Et c'est comme ça que l'eau est devenue arme de destruction massive...

Il y a quelques jours, l'actualité nous rappelait aussi que la Californie vit depuis 4 ans une sécheresse sans précédent. Malmenées par les besoins croissants de l'agriculture extensive et l'épuisement des nappes liées à une réalimentation insuffisante, les ressources en eau s'épuisent. Il faut donc rationner les usages, et quand cela ne suffit pas, c'est le vol d'eau qui se met en place de façon très concrète. Des conduites percées, des camions siphonnés, nous n'en sommes pas encore au vol à l'arraché de bouteilles d'eau, mais rien n'est impossible. Et c'est comme ça que l'eau est devenue objet de convoitise et origine de délits...

Ces deux cas d'actualité illustrent comment l'eau est, et a toujours été, un facteur de conflit à toutes les échelles. J'ai vu des familles se battre littéralement pour l'accès à une borne fontaine (des points d'eau collectifs très en vogue dans les pays du sud ou l'accès à l'eau privatif est encore un luxe), j'ai vu des responsables publics faire traîner des projets d'accès à l'eau pour garder la mainmise sur des bidonvilles indiens, j'ai vu des villages sans eau au nom de la répartition «juste» des ressources.

Le cas le plus standard est celui de la gestion de l'accès à l'eau d'une rivière ou d'un fleuve. Pour que les populations en aval soient servies, il faut contrôler les consommations en amont. Ceci est parfois obtenu au prix d'une diplomatie forte (le Nil qui court de l'Éthiopie à l'Égypte est un bel exemple), mais parfois il faut passer par une méthode plus forte et unilatérale. Le conflit israélo-palestinien est en partie lié à l'eau et à l'alimentation en eau des nappes de l'État hébreu.

Comment l'eau peut être utilisée pour diviser

En 2008, chargé d'affaire pour un bureau d'étude français, j'avais été confronté à un épisode qui est à l'origine de toute ma réflexion sur les économies d'eau et que je trouve intéressant de partager pour mieux comprendre le sens de ces économies d'eau: la mission d'origine consistait à concevoir les systèmes de captage sur trois forages, et à mettre en place des systèmes de distribution dans cinq villages du nord de la Cisjordanie alimentés par ces mêmes trois forages. Seulement voilà, les trois forages n'ont pas été acceptés et il a fallu se contenter de deux.

Je ne suis ni expert en hydrogéologie dans cette région, ni militant d'un bord ou de l'autre dans ce conflit. J'ai simplement constaté à ce moment-là que toute la ressource qui avait été jugée nécessaire n'avait pas été rendue disponible.

L'effet a été immédiat: au lieu de cinq, ce ne pourrait être que trois villages qui seraient alimentés. Dix mille personnes sorties du projet à cause de l'utilisation de l'eau comme moyen de pression, et à cause de la sacro-sainte approche par la ressource qui dit qu'on définit la ressource nécessaire sur la base des consommations d'eau standards au niveau local.

C'est à ce moment que le concept d'économies d'eau est né chez moi, au moment où je me suis dit que si nous n'avions plus que deux forages, il faudrait optimiser pour garder l'objectif d'alimenter cinq villages. Cette idée n'a pas été suivie, et deux villages ont été exclus. J'étais révolté, mais je n'avais pas les moyens de ma frustration.

Frustration d'autant plus grande que, pour revenir au sujet de ce billet, cette situation avait toutes les chances de virer au conflit avec les villages voisins se retrouvant tout d'un coup dans des situations d'accès à l'eau complètement différentes, avec ce que cela implique en termes de confort, de santé et de bénéfices économiques au travers de l'agriculture, notamment. Cela dit, je n'ai pas eu la chance d'y retourner pour constater l'évolution, et rien ne dit qu'il y ait eu de situation conflictuelle.

Mais l'eau a créé un risque... et c'est cela qu'il faut avoir en tête. J'y reviendrai plus tard, car ce risque illustre très bien la complexité de la gestion de l'eau et ses effets directs sur l'organisation sociale d'une communauté, qu'il faut absolument avoir en tête lorsqu'on se lance dans une action d'accès à l'eau pour tous.

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