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Journée sans maquillage: Regard critique sur le marketing lié à l'image

Le 28 mai, nous soulignons la Journée sans maquillage. On se questionne parfois sur la pertinence de cette journée. Pourtant, ce n'est pas le procès de la coquetterie, mais une remise en question de la liberté de choisir dans une société de consommation.
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Le 28 mai, nous soulignons la Journée sans maquillage. On se questionne parfois sur la pertinence de cette journée. Pourtant, ce n'est pas le procès de la coquetterie, mais une remise en question de la liberté de choisir dans une société de consommation.

Nous vivons à une époque où l'image a tous les droits. Il s'agit d'une société marchande où le marketing règne et crée des besoins. Aujourd'hui, les personnes qui se plient au monde matériel ressemblent à la normalité, se considèrent normales. Il y a beaucoup de possibilités d'améliorer, de modifier, de transformer le corps. Le corps peut devenir une pancarte, une publicité. Dans 99 Francs, Frédéric Beigbeder met en lumière un personnage qui se considère Dieu, car il est un publicitaire qui influence les choix de vie des gens.

Le capitalisme encourage la consommation en offrant beaucoup d'options au corps. Il y a beaucoup de pression et très peu de résistance pour ne pas s'y soumettre. Cette situation peut engendrer beaucoup d'attentes et d'anxiété. C'est une société qui privilégie de paraître avant d'être. Et il est aisé de proclamer: «C'est la faute du système prostitutionnel».

Milan Kundera, dans l'Immortalité, posait une question fondamentale : Comment vivre dans un monde avec lequel on est en désaccord?

Récemment, Léa Clermont-Dion lançait La Revanche des moches, un essai sur le culte des apparences. Dans la plupart des entretiens sur le sujet, on a parlé de l'apparence de l'auteure. On lui a notamment reproché de ne pas être moche. Pourtant, Léa a précisé que l'ouvrage n'est pas une enquête, mais sa quête.Sa propre revanche. Elle explique que La revanche des moches est une façon de dire: «Woah, c'est assez» à l'industrie de l'image. Des artistes, comme Mitsou, ont témoigné de leur malaise face à la pression par rapport à l'image corporelle. D'ailleurs, l'ouvrage de Léa trouve un tel écho qu'il pourrait y avoir une version pour le public français, voire une suite à son livre.

Suite à cette publication, Céline Hequet a posé des questions intéressantes sur l'importance de la performance dans le monde contemporain. J'estime que cette quête de la performance se transpose aussi sur la recherche de la beauté. Nelly Arcan a abordé ce thème en soulignant que le corps naturel, sans artifices, n'est plus acceptable aujourd'hui.

Céline Hequet a aussi souligné que l'on voyait presque uniquement du « féminisme pop » dans les grands médias. Or, il est vrai qu'il existe aussi d'autres sortes de féminismes. Mais, il s'agit de courants féministes bien moins lisses et conformistes. Il faudrait sûrement privilégier la diversité des points de vue féministes.Léa ne semble pas s'y opposer. D'ailleurs, il est évident que son discours féministe ne représente pas toutes les féministes.

Mais, on ne peut pas négliger cette aliénation corporelle qui touche beaucoup de femmes et de plus en plus d'hommes. Je considère que ce n'est pas un objectif moins « pur » ou important que les autres enjeux discutés. On n'a qu'à considérer des dérives de certains groupes sur le web qui encouragent des conduites dangereuses pour modifier l'apparence physique.

J'estime donc que le texte de Céline Hequet pose de bonnes questions, malgré une attaque parfois trop personnelle et son côté assez incisif.

D'autre part, dans un autre papier, Céline Hequet reprend une question de Marie-Louise Arsenault: « Peut-on avoir 20 ans et ne pas être narcissique? »

Il est sans doute bon de préciser qu'il existe un narcissisme sain et un narcissisme pathologique. Il y a un passage assez troublant dans La revanche des moches: « Voilà l'aliénation qu'on ne peut nommer, car elle est trop vilaine, trop intime aussi. Cet atroce narcissisme perpétuel qui guette la fillette qui se fait vomir et qui se déteste jusqu'à vouloir mourir » écrit Léa.

Dans un entretien à Deux hommes en or, elle explique aussi que plusieurs personnes ne vivent dorénavant que pour un Like sur Facebook. C'est également inquiétant de voir les nouvelles applications pour retoucher les selfies. Le maquillage ou Photoshop ne suffisent même plus à embellir.

Fort Heureusement, il existe des campagnes pour s'accepter au naturel comme My Body, My Rights et Proud2bme ou la réjouissante série les Girls.

Au Québec, nous avons aussi la Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée. Le point fort de cette Charte est sa formule participative. Or, je pense que l'on pourrait y ajouter certaines précisions, notamment par rapport à:

- l'âge des mannequins qui représentent des adultes;

- le poids des mannequins engagés;

- la politique sur l'utilisation des retouches dans les publicités de beauté (une mention pourrait être insérée pour contrer les images irréalistes en cas d'utilisation de logiciels de retouches).

L'idée n'est pas de faire la morale, mais de permettre aux gens de faire des choix éclairés. Une journée sans maquillage ne devrait pas être une journée sans réflexion sur le marketing lié à l'image. Avoir un regard plus lucide, serait peut-être une manière de prendre une revanche.

Merci à Léa et à toutes celles et à tous ceux qui ont contribué au débat.

Jennifer Lawrence

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