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Nudité dans les vestiaires: compte-rendu d'une expérience suédoise

Ma première réaction quand j'ai vu le signe « maillots interdits » : j'ai été choquée.
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Stéphanie Grimard

La vie m'a menée ici pour y vivre pour un temps, dans un petit village près de Halmstad, au sud-ouest de la Suède. Comme au Québec, le mois de novembre implique de s'habituer à la noirceur qui prend de plus en plus de place, sauf qu'ici malheureusement la clarté de la neige ne vient pas égayer le paysage (ou si elle le fait, c'est pour une heure ou deux seulement); l'air reste toujours juste un peu trop au-dessus du point de congélation alors il garde toute son humidité, ce qui paradoxalement est beaucoup plus efficace pour nous geler jusqu'aux os. Ce sont les inconvénients d'une vie de bord de mer, qui peuvent heureusement être contrés par un bon glög entre amis (vin chaud épicé servi dans de jolies petites tasses avec des amandes grillées et des petits raisins secs délicieux), ou encore par un festin de gravlax.

Grâce à la magie de l'internet, je reste branchée sur ce qui se passe chez nous. Et j'ai vu passer plusieurs articles sur le règlement concernant le déshabillage interdit dans un endroit où, dans ma tête du moins, c'est là que ça devrait se passer. Quelques jours plus tard, je me retrouvais dans une piscine publique à Laholm, tout près d'où j'habite. Et mon expérience a été celle d'un contraste assez frappant, c'est le moins qu'on puisse dire.

Voici à quoi ressemble le règlement (dans pas mal toutes les piscines publiques apparemment) : ici, on OBLIGE tout le monde à prendre une douche sans son maillot (c'est très important), afin d'arriver propre dans une piscine où on peut ouvrir nos yeux sans qu'ils restent rouges pour tout le reste de la journée, tellement c'est plein de chlore. Ma première réaction quand j'ai vu le signe « maillots interdits » : j'ai été choquée. Je suis de nature assez prude, et qu'on me demande ainsi de montrer mon corps à des étrangers m'a rendue inconfortable.

Je suis de nature assez prude, et qu'on me demande ainsi de montrer mon corps à des étrangers m'a rendue inconfortable.

Pour un instant. Ensuite, je me suis sentie libérée. De voir toutes ces femmes, avec leurs enfants, faire cela sans l'ombre d'un stress ou d'une gêne, avec le sourire, «go on se met propres avant d'aller jouer dans l'eau», on aurait dit qu'une sorte de contrainte artificielle avait été enlevée, et que je pouvais faire ce geste tout naturel de me laver sans être dérangée par tant de sentiments qui viennent de je sais pas où. Et aussi, c'est le triomphe de la logique derrière ça qui m'impressionne (comme c'est le cas devant plusieurs lois et manières de faire ici) : bien sûr que l'important, c'est l'hygiène, et que tous se lavent comme il faut, surtout les parties intimes (comme c'est bien montré sur les panneaux). Et la meilleure façon d'obtenir ce résultat, c'est d'exiger que les gens le fassent sans maillot, tout simplement. Ce n'est pas plus sorcier que ça.

Stéphanie Grimard

Même sentiment de surprise suivi d'une nouvelle aisance, quand après la baignade, je suis allée dans le sauna, et me suis rapidement trouvée étendue sur ma serviette, dans le bien-être et la nudité totale. Quand deux jeunes garçons, de 8-9 ans environ, sont entrés pour se sécher un peu, avec la maman qui les surveillait de l'extérieur du sauna (elle n'était pas venue se baigner, mais juste les accompagner), c'est sûr que pendant un instant, je ne savais pas trop comment me sentir. Mais encore là, ce fut un petit malaise de courte durée, qui a vite été remplacé par quelque chose comme un grand soulagement.

Il me semble que c'est comme ça que ça devrait être, entre êtres humains.

Il me semble que c'est comme ça que ça devrait être, entre êtres humains. Il me semble que ça aide à avoir un rapport plus sain au sexe, pour voir cela non pas comme quelque chose à cacher, quelque chose dont on devrait avoir peur ou dont on peut se servir pour faire peur, mais plutôt comme quelque chose qui fait partie de la vie, de l'expérience humaine, de son début jusqu'à sa fin. De voir, souvent, à quoi ça peut ressembler, un corps nu (toutes sortes de corps nus, pas juste la version plastifiée du sexe-marchandise publicisé), bref d'enlever cette aura de mystère et d'interdit, ça aiderait peut-être à changer les comportements déviants qui entourent cette envie de voir, ou de montrer.

Je dis ça, je dis rien, comme disent les Français.

Un autre élément intéressant est cet autre panneau, qui avertit les usagers que le personnel qui vient nettoyer les douches et autres aires communes peut être de n'importe quel sexe. Mais là-dessus, il y aurait trop à dire. Je vous reviens.

Avril 2018

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