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L’acceptabilité sociale des grands projets: le déficit de cohérence doit être comblé

Il est illusoire de penser que les investisseurs ont le goût d'entreprendre des projets dans un contexte où règnent l'incertitude, l'arbitraire ou la confusion.
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Est-il justifiable qu'un groupe le moindrement organisé crée et diffuse de l'information négative et arrive à faire déraper un projet ?
Don Wilkie
Est-il justifiable qu'un groupe le moindrement organisé crée et diffuse de l'information négative et arrive à faire déraper un projet ?

Un récent jugement de la Cour supérieure du Québec a rejeté la réclamation en dommages que l'entreprise minière Strateco avait intentée contre le gouvernement. Strateco a déjà annoncé son intention de faire appel de cette décision.

Après avoir investi près de 200 millions de dollars et suivi toutes les exigences réglementaires, Strateco a vu son projet de développement minier uranifère Matoush stoppé en 2013. Le ministre du Développement durable, de l'Environnement, des Parcs et de la Faune lui avait alors refusé le certificat d'autorisation qui lui permettait de procéder à la phase d'exploration avancée de son projet, sous prétexte que ce dernier ne bénéficiait pas d'une acceptabilité sociale suffisante. Tout cela après que le gouvernement du Québec en eut fait un projet phare pour le développement du Plan Nord.

Entre le moment où le gouvernement appuyait le projet Matoush et celui où il le stoppait, le projet n'a pas changé ; ce qui a changé, c'est le bruit ambiant à son sujet.

L'existence même de ce litige illustre combien le flou qui entoure le concept d'acceptabilité sociale fragilise le développement et la réalisation de grands projets. Entre le moment où le gouvernement appuyait le projet Matoush et celui où il le stoppait, le projet n'a pas changé ; ce qui a changé, c'est le bruit ambiant à son sujet.

Le cas Strateco s'ajoute à des dérives récentes qui ont marqué les débats portant sur l'acceptabilité sociale de projets, voire de filières entières. Depuis quelques années, nous observons que la concrétisation de projets est de plus en plus difficile. Des projets hydroélectriques à ceux d'exploitation minière ou dans une plus vaste mesure des projets d'exploration, d'exploitation ou de transport d'hydrocarbures sont contestés ou systématiquement remis en question. Nul ne remet en question le caractère essentiel de l'acceptabilité sociale. Il est de plus en plus évident qu'en cette matière, le gouvernement doit agir davantage en fonction des intérêts objectifs du Québec et de ses collectivités, que dans le but de minimiser la controverse et le « bruit » qui en découlent. Pour le promoteur d'un projet industriel, cela nécessite de rendre son projet non seulement socialement acceptable, mais accepté quasi unanimement, idéalement sans controverse préalable.

Peu importe que ce groupe soit représentatif ou pas des communautés touchées par celui-ci ; peu importe que la controverse reflète des enjeux réels ou des allégations erronées ou mal fondées, le bruit fait foi de tout.

Est-il justifiable qu'un groupe le moindrement organisé crée et diffuse de l'information négative et arrive à faire déraper un projet ? Peu importe que ce groupe soit représentatif ou pas des communautés touchées par celui-ci ; peu importe que la controverse reflète des enjeux réels ou des allégations erronées ou mal fondées, le bruit fait foi de tout. À notre avis, la réponse est non.

Autant les exigences que le processus qui conduisent à l'autorisation d'un projet doivent être clairs, autant les règles du jeu doivent être connues et ne devraient pas être changées en fonction de certains aléas qui minent la confiance des investisseurs et des entrepreneurs à vouloir développer des projets au Québec.

Il n'y a rien de plus néfaste aux investissements que l'incertitude.

Il n'y a rien de plus néfaste aux investissements que l'incertitude. Au bruit de certains groupes de pression s'oppose le silence assourdissant des millions de dollars qui choisissent d'aller s'investir ailleurs qu'au Québec. Non pour éviter les exigences d'acceptabilité sociale, plutôt pour éviter que l'utilisation arbitraire du concept ajoute un risque politique au risque déjà inhérent à tout grand projet de développement.

À l'exigence d'acceptabilité sociale, nous disons « oui » sans réserve. Mais nous disons non à l'arbitraire et aux délais inutiles et évitables. Il est nécessaire que soit comblé le déficit de cohérence qui caractérise encore le processus d'autorisation des grands projets industriels. Le gouvernement doit donner suite à ses orientations en matière d'acceptabilité sociale publiées en janvier. Il est illusoire de penser que les investisseurs ont le goût d'entreprendre des projets dans un contexte où règnent l'incertitude, l'arbitraire ou la confusion, le cas Strateco l'illustre trop bien.

Ce billet est coécrit par Valérie Fillion, directrice générale de l'Association de l'exploration minière du Québec.

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