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«Plyball»: du théâtre sportif et expérimental qui implique les spectateurs

Au fil des rounds, le comportement de l'arbitre se modifie. Elle n'est pas aussi fiable et juste qu'on aurait pu le croire ou le vouloir. Elle a même quelques aspects inquiétants...
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Les règles du Plyball sont relativement simples. Deux joueurs face à face - un rouge et un bleu - tentent de marquer le plus de points possible en lançant les deux balles en jeu pendant la durée d'un round qui dure 2 minutes 30 secondes. La partie se gagne en plusieurs rounds.

Si la balle rebondit dans la zone autorisée et touche le mur situé derrière le joueur adverse, le joueur qui l'a lancée gagne un point. La balle ne doit pas toucher le filet ou le joueur adverse avant le mur, sinon le point ne compte pas. Le joueur ne doit pas dépasser la zone autorisée pour lancer la balle, sinon le point ne compte pas non plus. Le joueur ne doit pas mettre trop de temps pour lancer sa balle, sinon les deux balles reviennent à son adversaire. Ce temps est à la discrétion de l'arbitre qui a le dernier mot... ; et quelques règles encore... Comme tous les jeux, il comporte des règles et il faut les respecter.

Le Plyball est plus qu'un jeu, c'est un sport éprouvant qui nécessite une tenue sportive avec chaussures, short, genouillères (car les joueurs se retrouvent souvent au sol) et lunettes de protection, un peu comme le squash mais sans la raquette et avec deux joueurs qui se font face. Les balles sont lancées à mains nues. Comme le jeu est très rapide, il nécessite un arbitre. Et c'est là que les problèmes commencent...

Au début l'arbitre, une femme qui domine du haut de sa chaise surélevée les deux hommes en train de s'agiter, semble accomplir sa tâche avec sérieux. On entend son sifflet retentir de manière stridente et sa voix ordonner: «joueurs au mur - blocage - balle déviée - hors limite - faute principale - faute de pied - procédure illégale - remise - moins de 30 secondes de jeu...» tout en comptant les points pour déclarer enfin le résultat du round. L'arbitre constitue l'autorité suprême que personne n'a l'idée de contester. Pas même lorsqu'elle demande aux spectateurs de prendre parti pour l'un ou l'autre joueur sur les critères de leurs choix, habileté, beauté, intelligence, musculature des mollets ou des mains, persévérance... autant de qualités prétend-elle qu'on devrait reproduire pour que la société se bonifie et que l'on vive dans un monde qui soit meilleur.

Mais au fil des rounds, le comportement de l'arbitre se modifie. Elle n'est pas aussi fiable et juste qu'on aurait pu le croire ou le vouloir. Elle a même quelques aspects inquiétants...

On l'aura compris, le Plyball est prétexte à réfléchir sur les règles de la société et les normes des institutions, la valeur de la justice, la concurrence entre deux camps opposés, l'autorité du chef ou de l'arbitre, et bien sûr l'attitude que tout un chacun - ici les spectateurs de la pièce - peut avoir en prenant partie pour un camp contre l'autre.

Ce dernier point, qui engage vraiment les spectateurs comme le veut le texte et la mise en scène signée Gabriel Plante, aurait pu, selon moi, être poussé plus loin. Cela m'a rappelé les célèbres et terribles expériences américaines de psychologie sociale des années 60 - expériences de soumission au groupe de Salomon Ash ou à l'autorité de Stanley Milgram - qui auraient pu être davantage exploitées sur un mode humoristique par l'arbitre si la pièce avait duré quelques minutes de plus. Mais l'idée générale de Plyball est très bonne. Les trois acteurs jouent parfaitement leurs rôles. Les spectateurs participent avec beaucoup d'humour et d'à-propos. L'ensemble aurait toutefois pu être poursuivi pour donner davantage à réfléchir encore.

Plyball du 10 au 14 mai 2016, au théâtre La Chapelle à Montréal.

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