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«Ce que nous avons fait», ou la schizophrénie au quotidien

, se disent les parents, c'est cette fille magnifique et brillante, fruit de leur amour mais qui, au lieu de vivre sa propre vie, souffre et parasite dramatiquement la leur.
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Un couple à l'aube de la retraite. Deux grands enfants - garçon et fille - dont la fille (sans doute l'aînée) est belle, très belle et intelligente, très intelligente. Mais schizophrène.

Quatre acteurs qui préparent l'interprétation de ces « rôles » de parents et d'enfants. Une famille ordinaire qui donne à réfléchir sur l'extra-ordinaire de la maladie mentale. Car du normal à l'anormal, la distance n'est pas si grande.

Ce que nous avons fait, se disent les parents, c'est cette fille magnifique et brillante, fruit de leur amour mais qui, au lieu de vivre sa propre vie, souffre et parasite dramatiquement la leur. Ce que nous avons fait, se demandent-ils aussi, c'est peut-être quelque chose de mal pour que ce drame arrive dans leur famille, et qu'ils ne puissent que constater leur impuissance à réparer les choses.

Ce que nous avons fait © Marilène Bastien

La fille aborde tour à tour ses parents de front et plonge directement dans leurs symptômes au lieu d'aller se faire voir ailleurs, de partir ailleurs jouer sa propre vie avec ses propres manques. Eux restent subjugués, collés au lien qu'ils ont avec elle, comme on l'est à un courant électrique passant par un fil qu'on tiendrait dans sa main; courant électrique très douloureux mais pas suffisamment fort pour les en éjecter.

Les liens dans la famille se referment jusqu'à suffocation. Ce sont des liens d'amour mais qui, pris dans un nœud coulant, serrent de plus en plus fort jusqu'à strangulation au lieu de se détendre et de laisser chacun vivre.

Quand les parents disparaîtront, le fils héritera de cette situation inextricable. Car même en leur absence, la famille reste réunie. Et il s'agit bien d'une maladie familiale, même si personne n'est coupable et même si personne n'a mal fait.

Tous sont pris dans cette maladie commune où communiquer produit de l'étouffement. Ce n'est pas qu'on ne se comprend pas. Au contraire. On se comprend si bien qu'on se prend tous ensemble et qu'on ne se sépare plus. On ne se décolle plus. On ne se laisse plus vivre et la sonnerie du téléphone, annonciatrice de crise, est là pour le rappeler.

Dans la pièce, la même scène est jouée sous trois modes pratiquement identiques. Comme pour rappeler la répétition qui enferme et qui signe l'enfermement.

En peu de mots, le texte de Pascal Brullemans va droit au but et suggère plus qu'il ne démontre. Michel-Maxime Legault qui joue le fils et signe la mise en scène est excellent, comme le sont les trois autres protagonistes, Marie-Pier Labrecque dans le rôle de la fille, Sylvie Drapeau dans celui de la mère, et Robert Lalonde, le père, qui n'est pas seulement bon écrivain mais aussi bon acteur.

Centre du Théâtre d'Aujourd'hui (CTD'A) à Montréal

Salle Jean-Claude-Germain, du 29 septembre au 22 octobre 2015

Rencontre avec l'équipe à l'issue de la représentation du 6 octobre

Cet article a aussi été publié sur info-culture.biz

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