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Pour vaincre: faire le deuil du pouvoir provincial

Le débat sur la stratégie que nous devrons adopter dans les prochaines années s'articule autour de deux questions principales : «Doit-on faire ouvertement la promotion de l'indépendance ?» et «Doit-on aller chercher le mandat électoral de la réaliser ?»
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Comme tous les indépendantistes québécois, j'ai passé les dernières semaines à réfléchir aux problèmes du mouvement indépendantiste et aux solutions qui lui permettraient de se relever. Le débat sur la stratégie que nous devrons adopter dans les prochaines années s'articule autour de deux questions principales : «Doit-on faire ouvertement la promotion de l'indépendance ?» et «Doit-on aller chercher le mandat électoral de la réaliser ?»

Les tenants de «l'approche franche» répondent par l'affirmative à ces deux questions. J'exposerai brièvement les arguments qui la justifient et j'expliquerai pourquoi nous devons d'abord faire le deuil du pouvoir strictement provincial si nous espérons faire l'indépendance du Québec.

Parler ou ne pas parler d'indépendance, telle est la question ?

Nous sommes maintenant habitués de nourrir ce débat entre indépendantistes, mais permettez-moi de partager un certain étonnement. Si nous observions, dans d'autres pays, des partis politiques interroger la pertinence de promouvoir ouvertement leur but politique et leur raison d'être, nous les trouverions étranges.

Comment mieux réaliser son but politique en démocratie qu'en allant convaincre les citoyens de s'y rallier ? Jean-François Lisée, dans un article paru sur son blogue le 5 mai dernier, tendait à minimiser l'impact de la pédagogie de l'indépendance comme façon d'aller chercher des appuis. Cette idée, si elle devait se répandre davantage, causerait un grand tort au mouvement indépendantiste.

Nous devons cesser de nous en remettre passivement à d'éventuelles conjonctures historiques que nous ne contrôlons pas. Repensons à la façon dont chacun de nous est devenu indépendantiste. Qu'est-ce qui vous a convaincu, sinon des arguments ? Si je n'avais pas lu Pierre Falardeau, à la fin des années 1990, qui sait si je serais aujourd'hui indépendantiste? Comment espérons-nous que la jeunesse soit enthousiasmée à l'idée de créer un nouveau pays si nous sommes absents de toutes les tribunes où il faudrait la défendre ? Il ne suffit pas d'attendre que le fédéral nous inflige d'autres gifles historiques pour soulever l'indignation du peuple québécois. Il faut éveiller son désir de liberté et de dignité.

«Oui, mais... on ne se fera jamais élire !»

Le fait que Pierre-Karl Péladeau ait évoqué ses intentions de faire un pays en pleine campagne électorale n'était pas une erreur. L'erreur, c'était de ne pas avoir préparé le terrain suffisamment durant les 19 dernières années. Lorsqu'on va chercher ses appuis électoraux pour autre chose que l'indépendance, il est normal que ces appuis nous quittent en pleine campagne. Les fédéralistes, que nous avons laissé transformer le mot «référendum» en épouvantail, n'ont qu'à nous amener sur le terrain que nous avons laissé en jachère pour nous battre, ayant de leur côté la force de l'inertie du statu quo.

Pour déclencher une démarche d'accession à l'indépendance, il faut avoir un gouvernement majoritaire, c'est indéniable. Mais si nous n'allons pas chercher le mandat électoral de la faire, nous sommes pris au piège dans une situation où nous n'avons peut-être pas l'appui nécessaire dans la population pour la réaliser. Bref, nous cultivons ainsi les conditions de notre échec.

Comme l'affirmait Pierre Bourgault dans sa lettre «Une souveraineté qui a honte d'elle-même» , écrite en 1980, c'est à partir de l'opposition qu'il faut bâtir nos appuis à l'indépendance du Québec. S'affairer à dénoncer l'étau canadien et à faire voir les avantages de la liberté politique plutôt que de remettre la responsabilité de nos problèmes structurels sur l'autre parti d'alternance serait un bon début.

Par ailleurs, les jeunes et les nouveaux arrivants ne joindront pas un mouvement qui n'a pas suffisamment confiance en son projet pour mettre sa tête sur le billot en le défendant. En démocratie, lorsque nos idées n'ont pas un appui majoritaire, il ne faut pas capituler et essayer de les dissimuler. Il faut redoubler d'ardeur et renouveler notre discours. Sans cette ténacité militante, l'humanité n'avancerait pas.

L'État ou la province : il faut choisir

Être majoritaire au gouvernement en n'ayant pas le mandat ni l'appui populaire nécessaire à l'indépendance est inutile. Il faut cesser de prioriser le demi-pouvoir de la gouvernance provinciale en pensant que cela nous mènera quelque part. En faisant un compromis sur notre option fondamentale, nous envoyons le message que nous pouvons nous accommoder du statut de province pour avancer. Nous réalisons des réformes amputées qui contribuent à ce que les indécis penchent du côté du statu quo. Cette attitude autonomiste nuit à long terme à l'indépendance du peuple québécois. Si nous visons le pouvoir entier d'un État indépendant, il faut faire le deuil de la gouvernance provinciale.

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