Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.
RÉTRO 2013 - Depuis un peu plus d'un mois, les Autochtones qui se réclament du mouvement Idle No More multiplient les manifestations à travers le Canada. Des « flash mobs » rassemblent des centaines de participants qui dansent au son des tambours traditionnels. À Sarnia, dans le sud de l'Ontario, un groupe a bloqué les voies ferrées du Canadien National pendant près de deux semaines, avant de devoir démanteler ses barricades suite à une injonction des tribunaux.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
CP

Depuis un peu plus d'un mois, les Autochtones qui se réclament du mouvement Idle No More multiplient les manifestations à travers le Canada. Des « flash mobs » rassemblent des centaines de participants qui dansent au son des tambours traditionnels. À Sarnia, dans le sud de l'Ontario, un groupe a bloqué les voies ferrées du Canadien National pendant près de deux semaines, avant de devoir démanteler ses barricades suite à une injonction des tribunaux.

À Ottawa, sur l'île Victoria au milieu de la rivière des Outaouais, juste en face du Parlement canadien, la chef Theresa Spence entame sa 4e semaine de jeûne dans l'espoir de pouvoir rencontrer le premier ministre Stephen Harper. Ailleurs, certains chefs parlent d'augmenter la pression en organisant des actions de désobéissance civile, comme l'occupation de postes frontières entre le Canada et les États-Unis.

Ce bouillonnement d'activisme autochtone est largement alimenté par les réseaux sociaux. Les médias traditionnels, eux, s'y intéressent peu, de sorte que la grande majorité des citoyens canadiens n'ont toujours aucune idée des raisons pouvant expliquer la montée de ce mouvement de contestation.

Pourquoi les Autochtones protestent-ils ?

Tout d'abord, pour dénoncer les nombreux changements législatifs contenus dans le projet de loi C-35 du gouvernement Harper, qui modifie à la fois des éléments de gouvernance autochtone ainsi que plusieurs normes environnementales et ce, sans que les Premières Nations aient jamais été consultées.

Mais aussi parce que l'an dernier, lorsque le conseil de bande d'Attawapiskat a décrété l'état d'urgence en raison d'une grave crise du logement, la réponse du gouvernement fédéral a été d'accuser la communauté de dilapider les fonds publics et de la placer sous tutelle. Un geste qui a par la suite été dénoncé par les tribunaux comme « inutile » et « déraisonnable ».

Parce que depuis 1980, au moins 600 femmes autochtones sont portées disparues ou ont été assassinées, des crimes qui demeurent souvent non résolus. Les femmes autochtones sont aujourd'hui cinq fois plus susceptibles de subir une mort violente que les autres Canadiennes.

Parce que pendant plus de 100 ans, le système de pensionnats fédéraux a été l'instrument d'un ethnocide délibéré visant à éradiquer les cultures autochtones. Et parce qu'aujourd'hui, la Commission d'enquête vérité et réconciliation, chargée de faire la lumière sur ces années sombres, doit faire appel aux tribunaux pour que le gouvernement accepte de lui remettre les documents nécessaires à la réalisation de son mandat.

Parce qu'au Québec, les négociations pour signer un traité avec les Attikamekw et les Innus ont commencé en 1975, il y a 38 ans, et que rien n'indique qu'elles aboutiront prochainement. Et parce que cela n'empêche nullement l'exploitation des ressources naturelles sur les territoires revendiqués par ces nations, sans que celles-ci puissent en bénéficier de manière convenable.

Parce que de toute manière, les gouvernements - fédéral et provinciaux - n'ont trop souvent pas respecté les traités négociés avec les Premières Nations.

Parce que les effets du colonialisme canadien se font toujours sentir aujourd'hui.

Parce que le revenu médian des Autochtones qui habitent sur une réserve est de 14 000$, contre 33 000$ pour les autres Canadiens.

Parce que l'espérance de vie des hommes inuit n'est que de 64 ans, soit 15 ans de moins que pour le reste de la population masculine canadienne. Un taux qui s'apparente à celui du Turkménistan ou de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Parce que 33% des Autochtones âgés de 25 à 54 ans n'ont pas terminé leurs études secondaires, soit 20% de plus que le reste de la population canadienne.

Parce qu'en 2006, on évaluait que 45% des logements dans les réserves nécessitaient des réparations majeures, une augmentation de 10% par rapport à 10 ans auparavant.

Parce que même si les Autochtones ne représentent que 3% de la population canadienne, ils comptent pour 18% du total des délinquants sous responsabilité fédérale.

Parce que peu importe le domaine que l'on examine, les indicateurs socio-économiques sont toujours plus défavorables aux Autochtones.

Et surtout, parce qu'au bout du compte, rien n'est véritablement fait pour changer cette situation.

Mais si les Autochtones manifestent, c'est aussi parce qu'ils sont jeunes et qu'ils sont fiers. Parce qu'ils sont prêts à se battre pour leur culture et pour le droit d'exprimer leur réalité.

Parce qu'on s'attend à ce qu'ils se taisent mais qu'ils ont malgré tout quelque chose à dire.

Et parce qu'on a toujours refusé de les écouter lorsqu'ils ne haussent pas la voix.

Idle no More est le signe visible du ras-le-bol des peuples invisibles.

Manifestation Idle No More à Montréal

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.