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À part quelques endormis et heureux, nous ne sommes plus que ça : un peuple en colère. Un peuple tout entier. Parce que la colère est contagieuse et qu'elle est désormais de toutes les raisons; le pour, le contre, celui qui ne veut rien lâcher, celui qui voit son année s'envoler, celui qui prend des coups de matraque, celui qui en donne, celui qui s'est fait éclater sa vitrine, celui qui a mis trois heures pour rentrer, celui qui hurle de rage face à la surdité, ou l'autre, qui en appelle à la justice.
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Trois mois et deux cents manifestations plus tard, et on ne sait plus où donner de la colère tant l'arrogance et le dédain ont atteint les sommets inédits du mépris. Enragés de cette fausse bienveillance de ses chefs, de leur morgue, de leurs calculs malhonnêtes et insultants. Enragés de leur attitude infantilisante, de leurs ricanements et de leurs mensonges. Enragés jusqu'aux os du pourrissement et de la répression, jour après jour. On pourrait continuer la liste longtemps, y ajouter le pillage, la corruption ou la mafia, tiens. Avec le seul ciel comme limite.

À part quelques endormis et heureux, nous ne sommes plus que ça : un peuple en colère. Un peuple tout entier. Parce que la colère est contagieuse et qu'elle est désormais de toutes les raisons; le pour, le contre, celui qui ne veut rien lâcher, celui qui voit son année s'envoler, celui qui prend des coups de matraque, celui qui en donne, celui qui s'est fait éclater sa vitrine, celui qui a mis trois heures pour rentrer, celui qui hurle de rage face à la surdité, ou l'autre, qui en appelle à la justice. Et elle, qui n'en peut plus du bruit de l'hélicoptère au dessus de son lit, soir après soir, elle ne sait même plus si elle est pour ou contre. Jusqu'à l'épuisement.

J'imagine que c'est comme ça qu'on perd des guerres, quand l'épuisement l'emporte sur la colère. Parce que nous ne pouvons pas n'être que rage et furie. Parce que l'indignation ne peut pas être notre unique émotion, parce que nous sommes pleins d'autres choses. Individuellement, et collectivement. Vient alors ce besoin inéluctable de lâcher prise. De retrouver sa maison, de retrouver le sourire. Et de reparler à son voisin, celui qui était pour, quand on était contre. Et de quitter la colère.

Rire à nouveau, planter des fleurs, retrouver un peu de naïveté, planifier les vacances. S'apaiser, mais sans s'endormir. Ce sera le défi.

Et tout cela, bien sûr, sous le regard intact des chefs, qui n'avaient de qualité à avoir que la patience, et qui savaient mieux que quiconque que la colère n'a qu'un temps, et que ce temps se gère.

Dans l'épuisement général, on se dira juste à la prochaine fois, comme dirait l'autre, dans un ultime consensus en guise d'armistice. Les uns de se promettre de revenir parce que leur combat était juste, les autres de se promettre de les attendre au virage. Mais tous de respirer en attendant, et de se divertir enfin.

Et les chefs d'attendre terrasses et festivals, rires, bières et chansons. Surtout ne pas les faire voter avant. En septembre ça ira, ils ont eu la colère longue, mais ils ont la mémoire aussi courte que notre été.

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