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«Entendez-vous ces cris, ces cris de haine?»

Ce 11 juillet marque la commémoration des 20 ans du génocide des musulmans bosniaques perpétré à Srebrenica par les forces serbes.
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«Entendez vous ces cris, ces cris de haine

Venant d'un pays massacré et torturé, privé de ses droits (...)

Oohh cris de Bosnie, Oohh cris de Bosnie, Oohh cris de Bosnie

C'est l'histoire d'un peuple massacré.»

À peine âgée de dix ans, j'écoutais cette chanson, moi, la jeune lyonnaise musulmane. Je me souviens avec force que mes sœurs et moi-même connaissions les paroles par cœur. J'étais la cadette et ne maîtrisais pas forcément les enjeux politiques et géographiques de l'Europe post-communiste, et pourtant j'avais conscience que l'horreur était là.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, ces paroles sont restées gravées dans ma mémoire.

Ce n'est que ces dernières années en voyageant dans les Balkans et en rencontrant le charismatique mufti de Bosnie, Mustafa Ceric, très engagé dans le monde musulman et apôtre des relations interreligieuses et interculturelles, que j'ai compris et mesuré l'horreur. Cette horreur que j'avais vue à Auschwitz avec ma classe de Seine-Saint-Denis, et en Ukraine à Babi Yar, accompagnée de musulmans et juifs venus d'Europe et d'Amérique du Nord, pour se souvenir et dire: «plus jamais ça».

Ce samedi 11 juillet 2015 marquera la commémoration des 20 ans du génocide des musulmans bosniaques perpétré à Srebrenica par les forces serbes.

Cinquante ans après la découverte des camps de concentration et alors que le monde avait dit en chœur «plus jamais ça», alors que les guerres aux Balkans, poussées par des nationalismes exacerbés, étaient à leur paroxysme, que le monde post communiste s'écroulait, les États européens ont regardé ailleurs pendant que plus de 8 000 hommes et jeunes garçons étaient exterminés et les femmes violées.

Aujourd'hui, malgré les refus serbe et russe, de reconnaître ce génocide, il n'en demeure pas moins que les forces serbes ont commis une extermination physique intentionnelle et programmée de la population bosniaque musulmane.

Alors 20 ans plus tard, l'Europe dira à Srebrenica «plus jamais ça» en commémorant la mémoire de ces hommes et enfants, et en pansant les plaies des vivants.

Et au-delà des slogans, qu'apprendre de Srebrenica?

L'histoire des Balkans vient rappeler à l'Europe et notamment aux idéologues racistes des groupes d'extrême-droite tel Pegida que l'islam et les communautés musulmanes sont et font partie intégrante du continent et de son histoire.

Malgré les blessures et plaies entre les différentes ethnies et religions des Balkans de Bosnie, au Kosovo, en passant par la Macédoine, il n'en demeure pas moins que cette partie du monde peut offrir des exemples fascinants de résilience et d'efforts au quotidie, et de programmes pour faire vivre cette mosaïque qui sera notamment mise en lumière par le professeur de l'American University de Washington et de l'université de Cambridge, Akbar Ahmed, dans son opus et documentaire à paraître A Journey into Islam in Europe.

Le génocide de Srebrenica, c'est enfin un message d'avertissement que la haine et «l'essentialisation», et la construction de l'«autre» comme un ennemi irréductible mènent toujours vers l'horreur et que les slogans ne peuvent pas grand-chose face à la mort.

À l'heure où certains tendent à minimiser le racisme et ses méfaits, Srebrenica nous fait entendre «ses cris de haine».

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