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L'homme qui tua Lucky Luke: résurrection western

2016 marque le 75e anniversaire de l'homme qui tire plus vite que son ombre: Lucky Luke. Pour bien souligner le coup, Dargaud a lancé la collection Lucky Luke vue par...
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Aux yeux des traditionalistes de la bande dessinée, la reprise des héros marquants du 9e art franco-belge relève de l'hérésie. On ne touche pas au Spirou, on ne fouille pas dans le passé des compagnons de Tintin. Pourtant ce seraient de belles opportunités pour remettre ces héros au goût du jour et nous faire découvrir toute leur pertinence. Imaginez tout ce qu'on pourrait raconter en explorant les jeunes années des capitaines Haddock et Chester. Mathieu Bonhomme, Stéphan Colman et Éric Maltait, eux l'ont très bien compris.

L'éternel solitaire.

2016 marque le 75e anniversaire de l'homme qui tire plus vite que son ombre: Lucky Luke. Pour bien souligner le coup, Dargaud a lancé la collection Lucky Luke vue par... Une initiative qui permettra à plusieurs bédéistes de rendre hommage à l'un des plus importants et influents créateurs de la planète bédé. Et si ce premier opus signé Mathieu Bonhomme est représentatif du reste de la série, Dargaud va frapper tout un coup de circuit.

Par une nuit orageuse, de celle qu'on retrouve dans Unforgiven de Clint Eastwood, Lucky Luke débarque à Froggy Town. À la demande des autorités un peu pleutres de la petite bourgade minière trempée et en pénurie de tabac, le célèbre lonesome cowboy accepte d'enquêter sur une attaque de diligence attribuée à un mystérieux indien.

Dessiner un Lucky Luke était un rêve d'enfance de Mathieu Bonhomme. En entrevue au Figaro, il reconnaissait avoir été énormément influencé par la série. Et c'est justement parce que Bonhomme connaît parfaitement l'univers du mythique cowboy et du western qu'il a su si bien se fondre dans le trait de Morris sans pour autant renier son style semi-réaliste qui n'est pas sans rappeler celui du talentueux Alexis dans les géniales aventures d'Al Crane.

Comme savait si bien le faire Morris, le créateur adopte une mise en scène cinématographique digne des meilleurs Lucky Luke, la scène d'ouverture est particulièrement réussie et installe rapidement l'ambiance de cette petite ville perdue au milieu de nulle part.

Mais l'hommage va beaucoup plus loin, tout comme Morris Bonhomme truffe l'album de merveilleux petits clins d'œil non seulement à l'Ouest mythique et à ses western - en commençant par le titre hommage au film testament de John Ford The man who shot Liberty Valance, au duel final au parfum de High Noon, à la popularité de Lucky Luke inspirée de Mon nom est personne de Tonino Valerii, au Doc Wenesday qui rappelle le légendaire Doc Holiday, etc. , - mais aussi aux personnages de ses nombreuses aventures: Laura Leg qu'on avait vu dans Le Grand Duc ou encore la pierre tombale qui porte l'inscription Morris from Bevere (Maurice de Bevere le véritable nom du bédéiste.)

Bonhomme propose une aventure que Morris aurait apprécié et qui démontre sans l'ombre d'un doute la richesse de ce cowboy solitaire qui a encore beaucoup d'autres histoires à vivre.

En espérant que Dargaud permette à Bonhomme de faire un deuxième album.

Un criminel de choc

Si les Américains ont compris depuis longtemps que le passé des super-vilains pouvait être un sentier très intéressant à emprunter, pensons à l'excellente collection DC Nemesis chez Urban Comics qui se consacre aux pires vilains de l'univers DC, la tendance est moins exploitée du coté francophone. Pourtant le filon est très prometteur, du moins si on se regarde ce que Maltaite et Colman ont fait avec Choc, fondateur de la Main Blanche et ennemi juré de Tif et Tondu dont le deuxième opus des Fantômes de Knightgrave est maintenant disponible à Montréal.

J'avoue que je n'appréciais que timidement Tif et Tondu, deux héros d'une autre époque aux aventures trop proprettes, j'aimais beaucoup plus Gil Jourdan de Tillieux. Le premier tome de cette reprise consacré à Choc n'avait donc pas retenu mon attention. Quelle erreur! Ce Choc est d'une intelligence rare, une heureuse rencontre entre un dessin élégant, dynamique, tout en rythme et un scénario sans failles, aux nombreux rebondissements et aux retours en arrière terriblement efficaces.

Colman a concocté une intrigue sur plusieurs époques qui nous permet d'explorer les événements qui ont fait de ce Fantômas des années 50 un impitoyable génie du crime animé d'une insatiable soif de vengeance, un Edmond Dantes psychopathe, en quête de revanche, envoyé dans une de ces prisons, véritables manufactures de criminels violents et sanguinaires, mises en place par une société britannique sclérosée, encarcanée dans ses conventions sociales et ses non-dits hérités d'une époque victorienne mère de tous les Jack L'Éventreur et Hawley Harvey Crippen de ce monde.

Colman et Maltaite se moulent parfaitement à l'univers graphique de Will, le plus important dessinateur de Tif et Tondu, tout en lui insufflant la noirceur absente de la série originale et une narration digne des nouvelles techniques de storytelling. Sous l'égide du duo, Choc quitte enfin sa nature de papier et ses airs de guignol d'opérette, mégalomane et mythomane pour prendre vie et devenir ce véritable maestro du crime aux zones d'ombres, dont le seul nom suffit à provoquer la peur dans le cœur des policiers et du public. Comme si nous assistions à la naissance d'un Choc 2.0

Tout comme le Lucky Luke de Bonhomme, le Choc de Maltaite et Colman prouve encore une fois que ses vieux personnages de papier ont encore quelque chose à dire. N'est-ce pas réjouissant ?

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