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Mais qu'est ce qui fait courir Spirou? (1/2)

La réaction excessive des amateurs illustre parfaitement la périlleuse mission de celui qui décide de reprendre une icône, même pâlissante, comme Spirou.
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Depuis sa naissance en 1938, Spirou parcourt la planète bédé sous toutes ses latitudes. Créé par Rob Vel, Luc Lafnet et Blanche Dumoulin, le groom n'en finit plus depuis de se métamorphoser sous les pinceaux des nombreux repreneurs. Tour à tour, Jijé, Franquin, Fournier, Nic, Cauvin, Tome, Janry, Morvan, Murena, Yoann et Velhmann - et on ne compte pas tous ceux qui se sont frottés à la surprenante série Le Spirou de... - se sont attaqués au plus vieil héros encore actif de la bande dessinée belge.

À l'occasion de la sortie du Groom de Sniper Alley, nous avons rencontré Fabien Velhmann qui, avec Yoann, anime depuis 2010 les péripéties du dernier représentant de l'antique race des grooms.

«À l'origine je devais succéder à Tome et Janry. Mais Dupuis, qui n'était pas d'accord avec les dessinateurs que je proposais- dont Yoann- a préféré Jean David Morvan et Josée Luis Munuera.» Toutefois, comme prix de consolation les éditions Dupuis demandent à Velhmann et à Yoann de réaliser le tome initial d'une nouvelle collection de «one shots» consacrée à l'univers de Spirou:Les géants pétrifiés. Et si pour certains le prix de consolation pourrait laisser un goût amer, pour le scénariste cet album lui permet d'éviter les critiques souvent gratuites et acerbes des fanatiques du personnage. «Avec le recul, ça nous a peut-être rendu service de faire cet album. Prendre la suite d'auteurs aussi marquants que Franquin ou Tome et Janry peut devenir une mission suicide.»

Le scénariste sait de quoi il parle puisque, tout comme Fournier, le successeur de Franquin et Morvan et Munuera, il a dû essuyer les réactions émotives des fans: «Il y a toujours un petit groupe de gardiens du temple qui peuvent être féroces. C'est comme un jeu. On prend toujours une volée de bois vert quand on reprend une série et on espère que petit à petit ces lecteurs vont finir par nous pardonner le péché de ne pas être Franquin ou Tome et Janry.»

La réaction excessive des amateurs illustre parfaitement la périlleuse mission de celui qui décide de reprendre une icône, même pâlissante, comme Spirou. D'un coté il y a les enfants qui ne le connaissent pas et qui cherchent des bédés plus actuelles, et de l'autre les aficionados nostalgiques d'une certaine époque. «On nous demande de plaire aux deux publics», explique le bédéiste dont le Alerte aux Zorkons à su réunir les deux groupes. Toutefois, l'unanimité s'est vite effondrée: «C'est difficile de rejoindre ces deux publics, mais il faut le faire. Si on décide de ne s'occuper que des vieux lecteurs, dans 10 ou 15 ans la série sera morte parce qu'ils ne liront plus de bédés ou parce qu'ils seront morts. Pour l'avenir de la série il est fondamental de toucher les jeunes.»

Et revamper un personnage aussi anachronique que ce groom - quel hôtel emploi encore des grooms de nos jours? - n'est pas une tâche facile. «C'est tout un défi parce Spirou ce n'est pas Batman. D'ailleurs, quand on y pense, qui est Spirou? Certes, c'est un groom un peu journaliste, mais à part ca? Ce n'est pas aussi clair que Batman. Batman, c'est un enfant qui a assisté à l'assassinat de ses parents et qui est devenu très sombre.» Un trauma de départ qui explique tout et qui permet aux Américains de renouveler constamment la franchise en faisant des reboots. « On ne peut pas faire ça avec Spirou. Qu'est ce qu'on va dire sur lui? Que c'est un groom dans un hôtel? La belle affaire! Ça n'intéresse personne! Il n'y a pas de trauma. Ce sont justement ces contraintes qui rendent la reprise intéressante. Porter le flambeau d'une vieille icône franco-belge, la dépoussiérer et lui donner dix ou quinze ans de plus de vie, ça, c'est un défi motivant», souligne en rigolant celui qui a toujours refusé de reprendre des personnages créés par d'autres. «La plupart du temps les séries faites par des auteurs sont cohérentes et je considère qu'elles ne devraient pas être reprises. Il ne me viendrait pas à l'idée par exemple de reprendre Gaston parce que c'est un chef d'œuvre. Ça serait comme faire une suite à Crime et châtiment

Ce qui toutefois ne l'empêche pas d'offrir dans son nouvel album de courts mais surprenants caméos du Marsupilami, de Prunelle, de Mademoiselle Jeanne et de l'ineffable Gaston Lagaffe. « Nous complétions l'album quand Dupuis a racheté l'univers Franquin qui appartenait à Marsu Productions.» Une occasion en or pour faire un clin d'œil à l'incontournable monde de Franquin. «J'avais non seulement envie de faire un hommage aux personnages de Franquin, mais aussi et surtout à la rédaction du journal Spirou avec lequel j'ai grandi. Cette rédaction que Fantasio dirigeait et où Spirou travaillait», renchérit Velhmann qui nous confie que le célèbre Demesmaker, l'homme des fameux contrats jamais signés, pourrait bien apparaître dans une des prochaines aventures du groom.

Une perspective réjouissante, mais comme les deux bédéistes ont signé pour 5 autres albums, on ne sait pas encore quand le plus malchanceux des hommes d'affaires viendra faire son grand retour.

Un rendez-vous incontournable pour les amateurs de bédés. Les excellents dessinateurs Thierry Labrosse, Stéphanie Leduc et la peintre Jacqueline Coté s'unissent pour une exposition qui aura lieu du 18 au 24 mai à la galerie 2456, située sur Beaubien Est à Montréal, près du parc Molson, dans le quartier Rosemont. Une belle occasion pour vous plonger dans le fascinant univers de ces trois artistes.

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Avril 2018

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