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Nourriture religieuse: c'est avant tout une question de choix

Des producteurs québécois m'ont affirmé ne pas avoir d'autre choix que de faire apposer la certification religieuse cachère sur leurs aliments. Sinon, certains grands supermarchés refusent carrément de les distribuer sur leurs tablettes, m'ont-ils assuré sous le couvert de l'anonymat. « Ils ne nous disent pas que c'est obligatoire, dans ces mots-là. Mais disons que c'est fortement recommandé. Nous voulons pouvoir vendre notre miel, alors nous le faisons certifier », m'a confié un important apiculteur québécois.
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Avian Veterinary Services/Richard Jones

Des producteurs québécois m'ont affirmé ne pas avoir d'autre choix que de faire apposer la certification religieuse cachère sur leurs aliments. Sinon, certains grands supermarchés refusent carrément de les distribuer sur leurs tablettes, m'ont-ils assuré sous le couvert de l'anonymat. « Ils ne nous disent pas que c'est obligatoire, dans ces mots-là. Mais disons que c'est fortement recommandé. Nous voulons pouvoir vendre notre miel, alors nous le faisons certifier », m'a confié un important apiculteur québécois.

Même son de cloche chez un grand producteur laitier canadien. « Si vous allez à l'épicerie, vous verrez que la très grande majorité de nos fromages sont cachère », m'a dit la porte-parole.

De plus, ils ont dit qu'il leur en coûte plusieurs milliers de dollars par année pour obtenir ce type de certification.

--« C'est le consommateur qui finit par payer?», ai-je demandé.

--« À qui pensez-vous qu'on refile la facture? », m'a-t-on répondu.

Et ce n'est pas tout : l'une de mes sources m'informe qu'un rabbin arrive à l'improviste dans son usine pour effectuer un suivi serré : le processus de production doit être conforme aux préceptes de la religion juive, autrement les produits ne passent pas la rampe et doivent être mis de côté. Outre les frais de certification, ces visites surprises mobiliseraient plusieurs ressources humaines et parfois beaucoup de temps. Cela aussi occasionnerait des frais supplémentaires.

Des révélations surprenantes

Ces révélations m'ont été faites dans le cadre de ma préparation à l'entrevue que j'ai accordée en direct à l'émission Dumont le midi à V-télé sur le sujet des certifications cachère et halal, le 5 mars dernier. Il est possible de la visionner ici.

L'invitation à prendre la parole à cette émission m'a été faite par l'équipe de l'ex-politicien Mario Dumont à la suite de la publication de mon billet intitulé On mange tous cachère, publié en ces pages du Huffington Post Québec.

J'ai appelé ces deux entreprises pour être le plus préparé possible à mon entrevue télé. Par contre, les cinq minutes qu'aura duré cette entrevue n'ont toutefois pas été suffisantes pour tout expliquer aux téléspectateurs, d'où le présent billet. Ces deux entreprises ont accepté de répondre gentiment à mes questions, mais à condition de ne pas être identifiées par crainte de représailles, soit de la part des consommateurs et/ou de certains supermarchés.

Le cas du poulet halal

Le débat des certifications cachère et halal fait rage depuis près de trois bonnes semaines, au moment d'écrire ces lignes. Je ne peux que saluer le travail de l'équipe de Dumont le midi qui a levé le voile sur le fait que la totalité des poulets Olymels provenant de l'abattoir de Saint-Damase sont certifiés halal à l'insu de certains consommateurs.

D'après ma compréhension, Olymel estime qu'il n'est pas nécessaire d'apposer le sceau halal sur ces poulets parce que tous les consommateurs n'ont pas besoin d'une telle précision. J'avais eu vent de cela aussi, mais je n'avais pu le confirmer.

Une question de choix

Mais que penser de tout ceci? Je suis d'avis qu'il faut respecter le choix des communautés religieuses de consommer des aliments sanctifiés selon leurs rituels religieux, comme dans le cas des produits halal et cachère. Et comme je l'ai dit dans l'émission de Mario Dumont, je suis favorable à l'idée que les détenus consomment de la viande bénie selon leurs croyances, pourvu qu'il s'agisse d'un accommodement raisonnable. Pour le bénéfice de la discussion, admettons que le coût de cette certification est minime, voire nul, sur le prix de notre panier d'épicerie. Malgré cela, plusieurs autres questions demeurent en suspens.

Est-il acceptable que les choix des minorités religieuses se répercutent sur l'alimentation des autres citoyens, et ce, parfois à leur insu? Les consommateurs ont-ils toutes les informations nécessaires pour conserver leur liberté de choix au moment d'acheter leurs produits en épicerie ou au supermarché? Les producteurs québécois ont-ils réellement le choix de faire certifier ou non leurs aliments?

La question de fond est la suivante : avons-nous vraiment le choix ou pas? Un autre chapitre du débat est ouvert.

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