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Avec le geste d'expatriation effectué par Daniel Paillé, le chef du BQ vient de signer l'arrêt de mort du Bloc Québécois. Il ne reste plus que le chant d'accompagnement funèbre. L'Avé Maria.
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La députée fédérale Maria Mourani quitte le Bloc québécois (BQ) et rompt tous les liens avec le parti pour lequel elle milite depuis plus d'une décennie. Le divorce s'est annoncé brusquement, suite aux sorties de Madame Mourani contre la Charte des Valeurs québécoises telle que proposée par le gouvernement Marois.

Le BQ, parti fédéral fondé en 1991 par une coalition informelle des membres québécois du Parti progressiste-conservateur et du Parti libéral fédéral. Lucien Bouchard, Gilles Rocheleau, Jean Lapierre, Nic Leblanc, Louis Plamondon, Benoît Tremblay, Gilbert Chartrand et François Gérin : huit députés, huit hommes, huit québécois de souche... Avec le mandat de représenter les souverainistes du Québec sur la scène politique fédérale, le BQ s'est donné pour mission de cabaler les conditions favorables à la souveraineté du Québec.

L'attentat sur l'unité du Canada que fut le référendum de 1995 donne alors le plateau pour que les souverainistes vendent leur salade aux habitants de la seule province à majorité francophone de l'Amérique du nord. Les promesses sont semées chez les Québécois de souche, les Canadiens-français, les autochtones... et tous ceux qui s'accrochent à l'illusion d'un paradis terrestre. Les immigrants, eux, peuvent embarquer ou bedon, qu'ils aillent se réinstaller ailleurs dans le RoC.

C'est par un soir d'octobre que le leader du mouvement souverainiste laisse dépasser le jupon: Jacques Parizeau, sans doute déçu des résultats, déclare qu'il a perdu son pari «à cause de l'argent et du vote ethnique».

Depuis cette date, le mouvement souverainiste, que ce soit le BQ fédéral ou le Parti Québécois provincial, chasse tant bien que mal les nuages de la xénophobie. Malgré les multiples intempéries, certains militants issus de communautés ethniques ont tenu le coup. Pour le nombre décroissant d'appuis à la séparation du Quebec au Canada fédéral, Maria Mourani figure au sein même de cette lueur d'espoir qu'un Québec souverain pourrait s'accorder avec la réalité multiculturelle qu'incarne le Canada. Son image était au centre même du site web du Bloc Québécois. À la fois immigrante et minorité visible, Mme Mourani englobe toutes les qualités idéales de l'intégration à la société québécoise. Née en Afrique, elle a adopté les convictions politiques qui, jusqu'à récemment, n'étaient propres qu'aux Québécois de souche pure laine. C'est avec un poème de Gilles Vigneault qu'elle se vide le cœur suite à son expulsion :

Notre famille voulait tellement s'intégrer au peuple québécois qu'on a adhéré à l'idée qu'il devrait être un pays francophone en cette terre d'Amérique.

Tout au long de ma militance, j'ai vu qu'il existait une tension au sein du mouvement indépendantiste. Mais les leaders du mouvement et la majorité militante réussissaient toujours à chasser les démons de l'intolérance populiste lorsque venait le temps d'élaborer des politiques.

~Maria Mourani

Maria Mourani rompt avec le Bloc et remet en question son implication au sein du mouvement souverainiste. Avec le départ, ou plutôt l'excommunication de la seule femme, et la seule minorité visible, le Bloc Québécois retourne aux souches sources. Une image vaut mille mots.

Mme Mourani soutient que la majorité des indépendantistes avaient jusque-là réussi à tenir en échec «l'intolérance populiste», mais que ce ne semble plus être le cas. Comme c'est le cas dans le RoC, les Canadiens sont libres de s'exprimer sur les projets de lois auxquels ils seront contraints. Mais quand les opinions diffèrent, les Canadiens de souche se méritent du respect civique tandis que les canadiens dont la peau est basanée, dont l'accent est étranger sont priés de se taire, menacés d'expulsion du pays -- même quand ils y sont nés.

À'a force de se faire réprimander gratuitement, les membres des communautés culturelles ont fini par comprendre que le «nous» souverainiste idéal est plus blanc que neige, que l'inclusion est intermittente et conditionnelle, que l'acceptation est sporadique et éphémère. Cette recette de citoyenneté à deux classes ne cesse de remonter à la surface d'un océan à l'autre. Mais quand l'indécence provient d'un regroupement qui dépend lui-même de la pluralité pour survivre, et encore pour croitre, c'est une tumeur cancéreuse et mortelle.

« C'est dommage de perdre un député, c'est toujours une perte importante d'autant plus que Maria était appréciée.» -- député du Bloc Québécois, Jean-François Fortin.

C'est plus que "dommage", c'est un hara-kiri que le Bloc vient d'effectuer.

Vous comprendrez que [...] je vie une grosse peine.

~ Maria Mourani

La peine est partagée par tous ceux qui vivent le deuil d'un rêve tourné en cauchemar. Avec le geste d'expatriation effectué par Daniel Paillé, le chef du BQ vient de signer l'arrêt de mort du Bloc Québécois. Il ne reste plus que le chant d'accompagnement funèbre. L'Avé Maria.

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