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Les francophones du RoC et la St-Jean

Bien avant le 19e siècle, la fête populaire de la fin juin soulignait le solstice d'été. Rappelons que l'Église chrétienne a doucement évangélisé les petits peuples en s'emparant de leurs célébrations millénaires: le solstice d'hiver s'est fait avalé par Noel; le solstice d'été a fait un pivot vers la commémoration d'un saint.
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La chroniqueuse dans Le Devoir pose une question intéressante: À qui appartient la Saint-Jean-Baptiste?

La St-Jean-Baptiste souillée par les séparatistes

La fête rebaptisée «la Saint-Jean» a une connotation sociopolitique très particulière au Québec depuis les années 70. On est loin du 24 juin 1880, date historique à laquelle est chantée pour la première fois le «Ô Canada» lors d'une célébration de la Saint-Jean-Baptiste. C'était alors la fête de tous les canadiens-français. La musique, signée Calixa Lavallée et Adolphe-Basile Routhier, deviendra l'hymne nationale du Canada. Le symbole apolitique alors choisi par la Société Saint-Jean-Baptiste, c'est la feuille d'érable. Elle se retrouvera sur le drapeau national cent ans plus tard. Les semances de l'unité pancanadienne sont évidentes, quelle que soit la volonté de les dissimuler.

Bien avant le 19e siècle, la fête populaire de la fin juin soulignait le solstice d'été. Rappelons que l'Église chrétienne a doucement évangélisé les petits peuples en s'emparant de leurs célébrations millénaires: le solstice d'hiver s'est fait avalé par Noel; le solstice d'été a fait un pivot vers la commémoration d'un saint. Au fil des ans, les fêtes païenne et autochtone se sont fondues dans la religion favorisée par les colonisateurs. Maintenant que le règne du Vatican s'estompe, l'intérêt populaire pour la science de l'astrologie pure renait de ses cendres. Les Premières Nations, elles aussi, reviennent à la source pour commémorer en grande pompe la Journée nationale des Autochtones.

Le retour aux sources de la société Saint-Jean-Baptiste

De nos jours, le sens véritable du 24 juin alimente toujours les débats. Est-ce la fête d'un saint catholique, des canadiens-français de souche, des québécois, de tous ceux qui se sentent québécois, ou est-ce que c'est une fête païenne?

Malgré les nobles efforts pour rendre «la fête des Québécois» plus inclusive étant donné la diversité qui habite la Belle Province, plusieurs boudent toujours les célébrations. Soit par manque d'intérêt, à défaut de sentiment d'appartenance à la terre d'accueil, ou simplement parce qu'ils se sont fait ramasser ultérieurement par un fêtard qui a laissé entendre qu'ils n'étaient pas bienvenus dans le cercle des «vrais» membres de la grande famille québécoise. Enrobés du drapeau provincial et de la fleur de lys, des nigauds se laissent emporter par la frénésie anti-fédéraliste pour rappeler aux allophones et aux minorités visibles que «le Québec appartient aux Québécois». Les Premières nations passent aux oubliettes, comme d'habitude. Ces échappées répétées ont invariablement fini par ternir les festivités. L'interprétation moderne de la Saint-Jean reste entachée par la fougue des chicanes fédéro-souverainistes.

Refaire la St-Jean-Baptiste au QC et au RoC

Est-ce qu'on ose rêver à ce que la Saint-Jean propage l'adulation linguistique québécoise à travers le dit "Canada anglais", en passant par les communautés francophones hors-Québec? Ces nids de francophones qui comptent pas moins d'un million de canadiens survivent et jaillissent à contrecourant et dans l'ombre de la seule province majoritairement francophone. Souvent oubliés par tant de québécois, les francos du RoC reviennent soudainement aux esprits. Mais y a-t-il anguille sous roche?

Dans cette ambition à saveur néocolonialiste, les mœurs existantes devraient tomber à l'eau pour embrasser la Saint-Jean comme célébration universelle. Cette proposition est problématique à plusieurs niveaux. D'autres scenarios sous-entendent que les restes des canadiens-français du RoC sont bienvenus au Québec... à condition d'adopter la doctrine souverainiste. Cette attitude contreproductive risque d'éloigner des aspirants.

Les canadiens-francophones et la St-Jean

Les Acadiens, premier peuple francophone en Amérique, font le tintamarre lors de leur fête nationale à eux, le 15 aout. Ils ont choisi leur drapeau en 1884. Malgré les tempêtes linguistiques, la louisianisation n'a pas eu raison d'eux.

En 2010, le gouvernement de l'Ontario décerne le 25 septembre comme "Journée des Franco-Ontariens". Le drapeau franco-ontarien flotte depuis 1975. La francophonie ontarienne s'appuie sur l'intégration des immigrants francophiles pour renforcer leurs assises et répandre le fait français.

Les francophones des autres provinces ont façonné leur spécificité à leur manière, et généralement à l'insu de la plupart des québécois. De plus, la francophonie internationale joue un rôle de plus en plus grand dans ces communautés. Que dire de la connotation religieuse de cette fête nommée pour un Saint catholique? La laïcité s'impose comme le fil conducteur du ralliement interculturel.

Si les leaders québécois cherchent à designer une journée pour rassembler tous les francophones d'un océan à l'autre, l'idée est noble. Les canadiens qui choisissent de vivre en français ont intérêt à s'unir autour d'objectifs communs, face à la majorité anglophone du pays. Mais ce n'est pas tous les francophones qui vont rentrer dans le moule d'une célébration annuelle hyper politisée. La Société Saint-Jean Baptiste et ses zèles sympathisants ont répandu l'accouplement psychologique de la xénophobie cancéreuse avec la «fête nationale». La dissociation sera difficile, voire impossible.

Vaut mieux s'inscrire à l'esprit rassembleur de l'Organisation internationale de la Francophonie, qui désigne le 20 mars comme «Journée internationale de la Francophonie».

La langue française et les valeurs de solidarité et de dialogue des cultures portées par la Francophonie sont célébrées partout dans le monde, le 20 mars, Journée internationale de la Francophonie.

Cette journée se veut une fête plurielle, apolitique et universelle. Même les nouveaux arrivants s'y retrouvent aisément. En rebâtissant ainsi les ponts pancanadiens, les canado-francophones renoueraient avec la vocation originelle de la Société Saint-Jean-Baptiste: la stimulation, le sentiment de solidarité nationale et de promotion du progrès. Çà, ça mérite d'être célébré d'un océan à l'autre!

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