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Nous avons vu, cet après-midi, que le Québec ne possédait pas à cette heure un chef d'État digne et capable de dénouer le conflit qu'il a lui-même laissé s'envenimer. Nous avons vu, cet après-midi, que l'homme qui occupe la fonction de premier ministre est incapable, en temps de crise, d'afficher la gravité et le sérieux que requiert pareille situation. Mépris, insouciance, condescendance? Non. Petitesse.
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Il fut un temps où un premier ministre pouvait se lever en chambre et parler, comme le faisait Bernard Landry, de la grandeur politique de ceux qui, jadis, se sont battus pour l'obtention du gouvernement responsable. Il fut un temps où, au Québec, le sens de l'État était une vertu sacrée et où l'on avait conscience du poids historique et politique de nos institutions nationales. Il fut un temps où l'on pouvait regarder son premier ministre, qu'il soit libéral ou péquiste, et éprouver une certaine fierté à penser qu'il nous représentait, tant ici qu'à l'étranger. Il fut un temps où les mots d'esprit de nos politiciens puisaient à même la culture classique, plutôt que de tomber dans le mépris et la mièvrerie de mauvais goût. Bref, il fut un temps où nos dirigeants mesuraient vraiment ce que cela signifiait que d'être premier ministre du Québec, d'être le premier des Québécois.

Aujourd'hui, après neuf semaines de mutisme et d'entêtement de la part du gouvernement, nos campus universitaires sont sous haute tension, si ce n'est pas envahis par les services de sécurité privés, patrouillés par des gardes baraqués n'hésitant pas à interpeller maîtres et étudiants. L'enceinte sacrée de l'université, lieu de débat, de réflexion, d'indépendance intellectuelle a été violée. Encore récemment, les corps policiers ont procédé, partout au Québec, à des dizaines d'arrestations, alors même que de plus en plus de professeurs et de directions appellent au dialogue et que les mandats de grève se renouvellent toujours. Le mouvement tient bon. Aujourd'hui, donc, alors que le premier ministre réunissait le gratin financier au Palais des congrès, transformé pour l'occasion en forteresse assiégée (d'écologistes? de syndicalistes? d'étudiants?), ce qui devait inévitablement arriver arriva : la confrontation, le dérapage violent. Neuf semaines de mépris et d'obstination ne pouvaient qu'échauffer les esprits, de part et d'autre du conflit. Tout ce qui traîne finit par se salir ... L'ancien ministre Claude Castonguay déplorait il y a quelques jours, sur le plateau d'Anne-Marie Dussault, la fermeture du gouvernement envers les étudiants et appelait le premier ministre à reprendre en main la situation. Devant l'échec politique apparent de la ministre Beauchamp, le père de l'assurance maladie appelait sagement le premier ministre à prendre ses responsabilités, à revêtir son costume de chef d'État et à dénouer ce qui est devenu une véritable crise sociale.

Cet après-midi, l'ancien ministre Castonguay a eu sa réponse. Alors que le centre-ville s'embrasait à quelques dizaines de mètres du premier ministre, celui-ci se permettait de blaguer, tournant au ridicule la violence des manifestations étudiantes. « Vous voyez, ils frappent à notre porte! » a-t-il lancé aux gens d'affaires, visiblement tordus de rire. Auraient-ils autant ri s'ils n'avaient pas été protégés par l'escouade anti-émeute? Présentement, des policiers comme des étudiants ont été blessés. Les arrestations se démultiplient et il est fort à parier que des actes de violence, tristes et condamnables, se répèteront dans les prochains jours. Nous avons vu, cet après-midi, que le Québec ne possédait pas à cette heure un chef d'État digne et capable de dénouer le conflit qu'il a lui-même laissé s'envenimer. Nous avons vu, cet après-midi, que l'homme qui occupe la fonction de premier ministre est incapable, en temps de crise, d'afficher la gravité et le sérieux que requiert pareille situation. Mépris, insouciance, condescendance? Non. Petitesse. Ce premier ministre est petit, tellement petit ...

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