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Soumises, elles aussi, comme le sont leurs maris à la loi du silence, l'omerta, ces femmes endurent sans mot dire ces tragédies qui ont façonné au fil des siècles cette société marginale qu'est la mafia. Elles jouent d'ailleurs un rôle crucial dans sa pérennité en se mariant à des mafieux et en donnant la vie à de futurs mafieux.
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Quand on regarde les vidéos et les photographies des personnes prises au sortir de l'église de Notre-Dame-de-la-défense, où étaient célébrées il y a plus d'une semaine les funérailles de Vito Rizzuto, le présumé parrain de la mafia de Montréal, décédé de causes naturelles, on remarque plusieurs femmes, toutes de noir vêtues, leur visage brisé par la douleur. Ce sont les femmes du clan Rizzuto.

L'une d'entre elles se démarque particulièrement: Libertina Manno-Rizzuto. Elle fait partie de ces «veuves de la mafia», victimes, bien malgré elles, d'une guerre sanglante entre factions rivales qui se disputent le contrôle des rackets de la mafia de Montréal depuis cinq ans. Ces tueries ont fait une vingtaine de victimes.

Le parcours de Libertina Manno-Rizzuto est typique de ces épouses et mères de mafieux, nées et élevées au sein d'une mafia rurale régie par des traditions séculaires. Originaire de Cattolica Eraclea, une petite commune située en plein cœur de la Sicile, Libertina a été la fille du chef de la mafia de ce village, Antonio Manno, avant d'épouser Nicolo Rizzuto, lui-même issu d'une famille de mafieux de père en fils, qui viendra s'installer à Montréal, en 1954, avec son épouse et ses deux enfants: Vito et Maria.

Libertina, âgée de 87 ans, a été sans aucun doute la plus éprouvée depuis l'éclatement de ce conflit qui a décimé sa famille. Outre avoir vu son propre mari assassiné sous ses yeux, en novembre 2010, elle a aussi perdu en l'espace de quatre ans un fils, un petit-fils et un gendre. Il en va de même pour Maria Rizzuto-Renda, fille de Nicolo senior, dont le mari, Paolo, n'a plus été revu depuis mai 2010. C'est le cas aussi de Giovanna Cammalleri, l'épouse de Vito et mère de Nicolo junior, assassiné en décembre 2009, et d'Eleonora Ragusa-Rizzuto, jeune veuve de Nicolo junior. C'est le constat implacable qui ressort de ces tueries interminables.

Soumises, elles aussi, comme le sont leurs maris à la loi du silence, l'omerta, ces femmes endurent sans mot dire ces tragédies qui ont façonné au fil des siècles cette société marginale qu'est la mafia. Elles jouent un rôle crucial dans la pérennité de la mafia en se mariant à des hommes de la mafia et en donnant la vie à de futurs mafieux. Le mariage cimente à jamais ces familles. Ces femmes ont été les témoins de tractations qui ont fait ou anéanti des leaders. Elles sont les gardiennes des secrets de leurs hommes, vainqueurs ou vaincus. Pourtant, si elles se mettaient à parler, elles les feraient tomber en un rien de temps. Mais fidèles qu'elles sont aux préceptes de la mafia, elles emporteront avec elles ces énigmes dans le tréfonds de leur tombe.

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