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Le féminisme, une culture plus qu'un mouvement

Une multitude de plumes faciles ont noyé le féminisme dans les lieux communs et la redondance. Il y a perdu son sens véritable pour devenir un cri de ralliement, alors que c'est une culture visionnaire.
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La littérature permet d'élever le niveau de conscience de la société. Hélas, nous vivons une époque qui abuse de la banalité, des clichés et des redites.

C'est ainsi qu'une multitude de plumes faciles ont noyé le féminisme dans les lieux communs et la redondance. Il y a perdu son sens véritable pour devenir un cri de ralliement, alors que c'est une culture visionnaire et libertaire.

On en est venu à le dénaturer, à le réduire aux marches protestataires d'amazones ayant approximativement lu Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir un livre qui, en en vérité, et comme L'être et le néant de son compagnon Jean-Paul Sartre, s'est beaucoup plus vendu qu'il n'a véritablement été lu.

Le féminisme, c'est beaucoup plus.

C'est un comportement assumé dans l'ordinaire des habitudes, un comportement aussi omniprésent que les femmes le sont dans notre vie de tous les jours.

Les XVII et XVIII siècles ont vu s'imposer la littérature devenue «classique», celle dont on célèbre les Chateaubriand, Hugo, et autres Zola et Dumas. Mais exception faite de la magistrale George Sand, mesdames de la Fayette et de Staël, et quelques autres, la place littéraire était alors occupée exclusivement par l'écriture masculine.

Pourtant, les femmes écrivaient. Beaucoup.

Elles ont rédigé des lettres, rempli des journaux personnels, laissé des liasses de feuilles détachées au fond des tiroirs. Ces écrits révèlent le drame de vies obscures obligatoirement effacées. Comment aurait-il pu en être autrement? Leur vie se jouait en territoire restreint, telles la famille, la domesticité, la cuisine, l'éducation des enfants... Et aussi, pour certaines de castes privilégiées, dans les mondanités et autres exercices éphémères et à conséquences courtes, sauf dans leur rôle de mère, d'épouse adulée ou de maîtresse influente.

Où trouver une inspiration éclatée, nourrie à la panoplie des enjeux multiples et complexes de l'individu dans la société lorsqu'on vit en retrait de la fureur du monde? Une vie monacale n'inspirera jamais une oeuvre chevaleresque, et celle d'une ménagère le roman d'un politicien.

C'était l'époque où, en dehors de singularités rarissimes, les hommes seulement décidaient au nom des peuples, se faisaient soldats et devenaient héros, prenaient la mer pour goûter à la vastitude de leur monde, en découvrir d'autres ainsi que des peuples qu'ils conquéraient, et quoi encore. Ils se formaient ainsi le caractère, développaient les vertus du courage, nourrissaient leur âme et leur cœur d'idéaux plus grands qu'eux-mêmes, et étaient machistes avant l'heure.

Pendant ce temps, les femmes, ordinaires comme celles extraordinaires, n'avaient à raconter que le quotidien fidèle à leurs responsabilités essentielles, mais sans panache.

Leur ignorance des climats et abîmes intérieurs vécus aux théâtres des guerres, en lutte

avec les bourrasques des mers, ou encore au sein des joutes politiques, les privaient de savoir en parler et de nous en livrer leurs perspectives.

Cet handicap fut vaincu par une très lente évolution de la société qui leur a permis d'accéder à des fonctions publiques, électives, administratives, voire régaliennes, et d'exercer des professions jusqu'alors chasse gardée des hommes, comme la médecine, le droit, l'ingénierie, l'architecture.

Il a fallu du temps, beaucoup de temps et des voix fortes, des plumes acérées et des caractères trempés pour qu'elles puissent peu à peu s'affirmer et qu'on les entende.

Le féminisme, c'est toute cette évolution à travers les siècles et c'est cette autre vision de notre monde par des esprits trop longuement tus. Les femmes qui aujourd'hui vivent au diapason des hommes apportent à la conscience collective un éclairage nouveau sur l'ensemble des sujets qui font débat et provoquent la réflexion.

Et pour ma part, je suis comme Rousseau et ne crois pas à l'égalité de tous, car il y aura toujours des dirigeants et des subalternes qui voudront le devenir, des riches et des pauvres qui souhaiteront de même, cette émulation étant naturelle et nécessaire au dépassement de chacun et parce que la répartition des talents n'est pas une mise à niveau de tous les êtres humains.

C'est pourquoi j'ose dire que ne je souhaite pas l'égalité homme-femme, parce que ce serait rabaisser ces dernières au niveau de ces derniers. La parité, oui, pour qu'aucune ne soit freinée dans ses aspirations et qu'elles puissent se réaliser sans se travestir en ce qu'elles ne sont pas, des mâles en jupe.

Paraphrasant Suétone, l'auteur de Vie des douze Césars, je dirais que si les femmes, au cours de l'Histoire, n'ont pas lutté autant que les hommes pour occuper de hautes fonctions, c'est que leur ego n'en a pas besoin. Autrement dit, elles se préparent à remplir ces rôles pour les bonnes raisons, et non pour la gloriole, les honneurs factices et le clinquant.

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